Maturité digitale des entreprises: du bon usage de la numérisation

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A l’heure de l’IA, nombre de petites entreprises et d’indépendants œuvrent encore à la numérisation de leurs activités. Faisons le point avec le baromètre de maturité numérique des entreprises wallonnes et explorons les pistes à suivre.

Aujourd’hui, toutes les entreprises sont connectées mais toutes n’évoluent pas digitalement à la même vitesse, et ce pour de multiples raisons. En outre, les écarts peuvent grandement varier selon le secteur d’activité. La taille de l’entreprise joue également un rôle important.

A l’image du pays, le tissu économique wallon est constitué à plus de 95% d’entreprises comptant moins de cinq travailleurs. Autant dire que les enjeux numériques doi­vent être évalués à cette aune. Les besoins d’un indépendant ne correspondent pas à ceux d’une PME. Afin de disposer d’une bonne photographie de l’évolution numérique des entreprises, l’Agence du Numérique (AdN) publie un baromètre de la maturité numérique des PME – le même existe pour les citoyens. Le baromètre 2022 nous offre ainsi une série de données riches d’enseignements et de perspectives encourageantes pour les PME.

De l’infrastructure à la stratégie

Ce modèle se base sur quatre axes (infrastructure, organisation, processus et stratégie) regroupant quelque 120 indicateurs.
L’infra­structure mesure la présence des outils technologiques numériques et leur usage au sein des entreprises.
L’organisation comprend le volet humain de la digitalisation sous l’angle de la conduite des projets numériques, de l’implication du management dans le chan­gement ou encore de l’impact des technologies sur les formes de travail, les compétences et la formation du capital humain.
– Le volet processus correspond à l’intégration des technologies numériques et, dans la foulée, la numérisation de ces processus de travail pour des entreprises agiles et productives en passant par la centralisation des données, la qualité du traitement de ces informations et la fluidité de la communication entre les parties prenantes de l’activité commerciale.
– Enfin, le dernier axe évalue l’importance croissante de l’intégration des usa­ges des technologies numériques dans les stratégies commerciales, de l’innovation et environnementales des entreprises.

HÉLÈNE RAIMOND (Agence du Numérique): “Ce qui est important à comprendre pour le dirigeant est qu’il doit intégrer la numérisation dans une stratégie globale afin qu’elle soit efficiente.”

Quelques chiffres avant d’entrer dans le vif du sujet. Ainsi, l’univers 2022 de ce baromètre se compose de 287.892 entreprises (+15.290 par rapport à 2020) ayant un siège social en Wallonie, quels que soient leur taille et leur secteur d’activités. ” Ce qui est nouveau par rapport au baromètre précédent, c’est qu’il intègre pour la première fois les entreprises de l’économie sociale, détaille Hélène Raimond, senior digital strategist à l’AdN. Celles-ci obtiennent des résultats équivalents, voire supérieurs dans certains domaines. Précisons également, pour être complet, que sont exclues de ce baromètre les entreprises dont le siège social ne se trouve pas en Wallonie et qui contribuent pourtant au PIB régional, ainsi que le secteur des administrations publiques.”
Au total, plus de 3.000 questionnaires complets (200 questions) ont été reçus comprenant trois quarts d’entreprises classiques et un quart d’entreprises d’économie sociale.

Perception numérique du dirigeant

Sans surprise, le rôle du dirigeant est essentiel dans la numérisation de l’entreprise. On note dans le baromètre que 40% d’entre eux ont plus de 55 ans, 78% sont des hom­mes et 61% sont diplômés de l’enseignement supérieur. Sans surprise également, il appert que plus le dirigeant est jeune, plus il est favorable à la transformation numérique au sein d’une stratégie globale. En comparaison avec 2020 où les patrons se répartissaient à tiers équivalents entre convaincus, utilitaristes et sceptiques, la part des premiers a augmenté alors que celle des derniers a légèrement baissé. En 2022, on compte 45% (+10) de patrons wallons désormais convaincus du numéri­que pour 25% d’utilitaristes (-8) et 30% de sceptiques (-2). Soulignons que le taux de convaincus atteint 50% dans l’économie sociale.

“Ce qui est important à compren­dre pour le dirigeant est qu’il doit intégrer la numérisation dans une stratégie globale afin qu’elle soit efficiente, souligne Hélène Raimond. Or, on observe que seulement 20% des entreprises ayant conduit des projets numériques ont formalisé une stratégie globale de transformation numérique. Trois secteurs sont significativement en dessous de la fourchette moyenne qui oscille entre 18 et 28% : l’industrie lourde (10%), l’agriculture (6%) et la construction (1%). Si l’on n’a pas une réflexion globale, on risque de grosses désil­lusions et des pertes d’argent. C’est, par exemple, le cas dans l’e-commerce où certains ont littéralement acheté un chat dans un sac avec des systèmes de gestion de contenu où ils ne pouvaient pas eux-mêmes changer ce contenu. Le problème est lié à la taille, les indépendants et les TPE ne disposent souvent pas du temps nécessaire pour mener et suivre un projet de numérisation.”

Si l’entreprise n’a pas une réflexion de numérisation globale, elle risque de grosses désillusions et des pertes d’argent.

Freins et leviers à la numérisation

Parmi les principaux freins à la digitalisation, on note l’inutilité perçue des technologies numériques, le manque de temps et les compétences. En revanche les leviers en faveur de la digitalisation, cités par les patrons des entreprises ayant mené un projet numérique entre 2020 et 2022, sont essentiellement de deux ordres. D’une part, des gains de productivité escomptés et, d’autre part, les exigences des clients. Cependant, il reste encore pour beaucoup de TPE et PME du chemin numérique à parcourir dans les années qui viennent. Et celles qui s’arc-bou­tent contre la numérisation se préparent à un avenir difficile et à de sérieuses déconvenues. Pour autant, si tout n’est pas parfait, l’évolution globale du paysage numérique est positive et de nom­breux outils sont mis à la disposition des dirigeants et indépendants pour autant qu’ils trouvent le temps. On peut notamment citer les webinaires, ateliers de formation, coachings, événements sectoriels, etc.

Si l’on parcourt les quatre axes du baromètre, les progrès sont notables. En ce qui concerne l’infrastructure, 99% des entreprises wallonnes sont connectées à internet (avec un bémol, seulement 14% le sont via la fibre), 96% disposent d’au moins un terminal numérique (ordinateur, tablette, smartphone) et 48% disposent d’un site web (71% pour les entreprises d’économie sociale). “Parmi les indicateurs en progrès, ajoute Hélène Raimond, figurent le cloud computing, les logiciels collaboratifs et de messagerie et le nombre de travailleurs équipés d’un smartphone professionnel.” Pour l’axe consacré à l’organisation, 47% des entreprises (71% pour celles qui emploient plus de 10 personnes) ont mené un projet de numérisation (implémentation de logiciels, acquisition d’un serveur, numérisation d’une ligne de production, etc.).

Développement du télétravail

“On constate une augmentation du télétravail, analyse Hélène Raimond. C’est un effet notable de la crise sanitaire que nous avons traversée. Ainsi, 41% (+9) des entreprises wallonnes employant du personnel ont autorisé le télétravail en 2022. Au sein des entreprises employant 10 travailleurs et plus, ce taux grimpe à 60%. L’économie sociale se distingue également dans ce domaine avec un taux de 71%. Un à deux jours de télétravail sont aujourd’hui prévus pour les collaborateurs dans beaucoup d’entreprises qui en ont la possibilité. De plus, si une entreprise souhaite attirer des personnes de moins de 40 ans, deux éléments jouent dorénavant : un véhicule hybride ou électrique et le télétravail.”

92% des entreprises wallonnes ont réalisé la numérisation complète ou partielle d’un ou plusieurs processus métiers.

Si l’on regarde les processus, 92% des entreprises wallonnes ont réalisé la numérisation complète ou partielle d’un ou plusieurs processus métiers, le plus souvent des processus administratifs et comptables. Parmi les logiciels métiers, deux sont en progression : CRM et ERP. Enfin, les stratégies s’adaptent de plus en plus à la mobilité. Aujourd’hui, tant sur le plan professionnel que privé, le smartphone prime souvent sur l’ordinateur pour la consultation de sites ou l’utilisation de services. Si 40% (+19) des entreprises wallonnes mettent en œuvre des stratégies de digital marketing, 55% (+17) possèdent au moins un profil sur les réseaux sociaux. “Il s’agit de progressions significatives et inédites, note Hélène Raimond. Enfin, 63% (+8) des entreprises dotées d’un site web l’ont adapté aux terminaux mobiles.”

En conclusion, si le nombre de convaincus numériques ne cesse de croître de même que la présence en ligne, il reste encore du pain sur la plan­che pour développer de nouvelles applications ainsi que la vente en ligne.

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