De Bruxelles à New York: Court 16, le rêve américain d’Anthony Evrard
L’entrepreneur belge Anthony Evrard baigne dans le tennis depuis tout petit. C’est depuis New York qu’il a décidé de faire briller le savoir-faire belge en lançant Court 16, une chaîne de clubs de tennis pour enfants et adultes débutants qui combine technologie et tradition.
A quelques pas seulement de l’endroit où se déroule l’US Open, un court de tennis pas comme les autres est situé dans un des bâtiments de Long Island City dans le célèbre quartier new-yorkais du Queens. Il appartient à Court 16, une chaîne de clubs de tennis destinée aux enfants et aux adultes débutants. Derrière le concept ? Anthony Evrard, un entrepreneur belge passionné par la balle jaune. Si la création de l’entreprise remonte à 2014, l’histoire débute bien plus tôt pour ce Belge expatrié aux Etats-Unis. En 1999, il décide de venir y étudier un an et intègre la prestigieuse première division de la NCAA (National Collegiate Athletics Association), au sein de la Loyola Marymount University à Los Angeles, où il y accomplit un cycle complet de quatre années qui lui permet de combiner étude et sport. Un rêve pour le jeune homme qui a toujours eu envie “d’utiliser le tennis pour voyager”. Toujours aux Etats-Unis, il travaille ensuite dans une agence marketing où il collabore avec de nombreuses marques de sport avant de devenir responsable marketing international chez Puma. “Toutes ces opportunités professionnelles, je les ai eues grâce au tennis”, avoue Anthony Evrard qui explique avoir rencontré les bonnes personnes sur le terrain.
Son amour pour la balle jaune ? “C’est de famille”, précise-t-il. Depuis tout petit, le Bruxellois manie la raquette et foule les terrains du Royal Leopold Club. Le nom de son entreprise est d’ailleurs une référence à son terrain préféré : le court 16. “Le deuxième terrain sur la gauche quand on rentre dans le club, se souvient-il. Celui où j’ai mes premiers souvenirs et où l’on m’a appris le sport, mais également transmis des valeurs.” C’est cette vision qu’Anthony Evrard souhaite véhiculer au sein de ses clubs : apprendre le tennis ainsi que les valeurs et la discipline qui en découlent. Et finalement, on n’oublie jamais vraiment là où tout a commencé, c’est pourquoi Anthony Evrard souhaite faire de ses clubs de tennis des lieux uniques. Objectif ? Créer des rituels pour les familles.
“On a voulu développer un endroit qui ne donne pas l’impression aux parents d’être punis lorsque leur enfant fait du sport”, développe l’entrepreneur. Le Court 16 combine terrains de tennis et open space où il est possible de travailler, discuter librement, mais également se divertir grâce à des activités telles que des projections. Récemment, Court 16 a participé au lancement du film Challenger qui met en avant une ancienne joueuse de tennis devenue entraîneuse.
Initialement, le projet s’adressait aux enfants à partir de deux ans et demi. “Notre objectif n’est pas nécessairement de former le prochain champion de tennis”, précise Anthony Evrard qui rappelle qu’il y a beaucoup d’étapes avant de pouvoir devenir professionnel. “Cela n’empêche pas de créer des vocations, mais on essaie d’avoir une vision plus globale du sport et montrer que cela peut aider à tout niveau, que ce soit dans le mode de vie ou le business.” Celui-ci salue d’ailleurs le respect qu’ont les Etats-Unis pour les athlètes de tous niveaux, sans forcément être numéro un. “Il suffit d’avoir joué à l’université pour que les employeurs reconnaissent cette qualité qui induit de pouvoir gérer et organiser son temps correctement pour performer.”
Des terrains modulables grâce… à du LED
Aujourd’hui, plus de 2.000 enfants sont inscrits à l’année et s’entraînent sur les terrains new-yorkais. “Sans compter tous les enfants qui viennent durant les stages pendant les vacances scolaires”, note Anthony Evrard. Il y a quelques années, le projet a été étendu et ouvert aux jeunes adultes. Court 16 est donc passé d’une marque enfant à une marque pour nouveau joueur. “On a réussi notre transition puisqu’aujourd’hui notre clientèle est répartie entre les enfants et les adultes débutants à 50/50.”
Pour ses cours, Anthony Evrard emploie une méthode particulière inspirée de ce qui se fait en Belgique. “On a un énorme savoir-faire sur l’apprentissage du sport en Belgique, c’est quelque chose dont on n’est pas assez fier”, observe-t-il. L’entrepreneur utilise différents types de balles qui rebondissent beaucoup plus bas et fait jouer ses élèves sur des plus petits terrains. “La particularité de nos terrains est qu’ils sont modulables”, affirme-t-il. Les lignes ? Ce sont des lampes LED qui s’allument en fonction des besoins. “Ce ne sont pas des lignes pixelisées dans la surface, elles sont directement projetées sur le terrain grâce à du hardware”, détaille Anthony Evrard. Ce procédé permet ainsi d’éviter d’avoir des entrelacements entre les lignes qui perturberaient les joueurs et d’obtenir des formats de terrains différents, modulables très rapidement selon les besoins. “On travaille avec des innovations qui ont déjà fait leurs preuves, l’objectif n’est pas de faire de la recherche et développement”, poursuit le fondateur. Ce qui n’a pas empêché Court 16 d’être précurseur en lançant le premier simulateur de réalité virtuelle pour tennis durant la crise sanitaire. “On a eu une liste d’attente énorme lorsque le projet a été lancé, mais finalement les clients y jouaient une à deux fois et revenaient sur les terrains”, poursuit Anthony Evrard. Le projet a donc été abandonné par la suite. “Ça a été une bonne leçon, analyse-t-il. Il faut de l’innovation, mais pas à n’importe quel prix, elle doit apporter de la valeur ajoutée à l’entreprise.”
Alors qu’il avait débuté avec un club de 700 m2 à Brooklyn, Anthony Evrard possède aujourd’hui trois clubs new-yorkais d’une surface totale de 6.000 m2. Ces derniers se situent à Brooklyn, Long Island – il en est d’ailleurs le propriétaire – et à Manhattan dans le quartier financier. “Chacun d’eux dispose d’une localisation unique”, affirme l’entrepreneur. De par les différents lieux, Court 16 séduit des publics très différents. “80% de notre clientèle habite dans un rayon de trois kilomètres autour du club, précise Anthony Evrard. Dans le quartier de Long Island, nous avons un gros business sur les jeunes professionnels, là où à Brooklyn ce sont plutôt des familles.”
Créer une marque unique
Si le nombre de clients ne cesse de grandir, Anthony Evrard est bien conscient que cela doit continuer à évoluer, car “New York est une ville de transit”. Afin d’attirer de nouveaux clients, l’entrepreneur renouvelle sans cesse ses clubs afin de surprendre les membres. “Au mois de septembre, le club ne doit plus ressembler à ce que les clients ont connu en juin, affirme-t-il. Ça permet de les surprendre et de créer une marque qui est difficilement copiable.” Et pour surprendre, le responsable s’inspire de ses expériences en marketing et noue des partenariats avec des marques comme Lacoste – des polos ont été cobrandés – mais aussi des influenceurs et des sportifs comme Carlos Alcaraz ou encore… Kim Clijsters.
Prochainement, Court 16 va s’exporter en dehors de New York puisqu’Anthony Evrard compte ouvrir un nouveau club à Philadelphie en collaboration avec le promoteur immobilier Asana qui est le plus grand propriétaire de magasins Patagonia. “C’est intéressant, car il y a toute une approche sur la durabilité des matériaux”, poursuit-il. Cette nouvelle ouverture se fera sans nouvelle levée de fonds. En 10 ans, l’entreprise a levé 3 millions au total. Entre-temps, l’entreprise française spécialisée dans le tennis, Babolat, est entrée dans le capital à hauteur de 5%. “On va accélérer notre plan de croissance”, affirme Anthony Evrard.
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