Malgré un ralentissement des recrutements, la guerre des talents est loin d’être terminée en Belgique
En Belgique, le taux d’embauche a diminué de 15 %. Dans ce contexte quelque peu tendu, qu’est-ce qui départagera les nouveaux arrivants sur le marché du travail : l’expérience professionnelle ou les compétences diverses ?
Bien que le marché du travail reste favorable au recrutement, la prudence est de mise en cette rentrée. Cela se traduit par un recul, souligne Page Personnel, spécialiste du recrutement. En effet, le volume des recrutements a chuté de 15 % par rapport aux deux dernières années, qui étaient particulièrement prospères, et les salaires sont revenus à leurs niveaux d’avant la crise sanitaire.
Ce ralentissement des recrutements se manifeste dans presque tous les secteurs. Là où l’on déroulait habituellement le tapis rouge aux candidats, les recruteurs se montrent désormais plus exigeants pour attirer les talents.
Soft skills vs hard skills
Il n’y a pas si longtemps, un jeune candidat arrivant sur le marché du travail, mettant en avant une expérience professionnelle ou des connaissances techniques spécifiques à l’emploi, était avantagé. Aujourd’hui, les recruteurs ne se limitent plus à ces critères. Les expériences extra-professionnelles, telles qu’un Erasmus, une expérience dans un autre secteur, voire même des jobs étudiants, peuvent constituer des atouts pour un candidat en début de carrière.
Cependant, en Belgique, les qualifications, le bilinguisme et la formation restent prioritaires pour les recruteurs. Il vaut donc mieux investir dans une année linguistique que dans une année sabbatique.
La guerre des talents est-elle finie ? Non ! Bien que le marché reste favorable aux talents, la pression sur les employeurs a diminué, et l’incertitude économique entraîne des délais.
Explications avec Olivier Dufour, Managing Director chez Page Personnel.
À quelles causes attribuez-vous cette baisse des intentions de recrutement ?
Les raisons de cette diminution sont liées au ralentissement économique que nous connaissons aujourd’hui (post COVID-19, tensions commerciales internationales, et plus récemment, la crise énergétique, la guerre en Ukraine, le conflit au Moyen-Orient…). Ces causes sont exacerbées par l’incertitude concernant l’avenir (élections américaines, politiques protectionnistes…) ainsi que par la hausse des coûts liée à l’inflation.
Dans ce contexte, il est crucial de se démarquer. Qu’entendez-vous par là ? Et comment se démarquer des autres ?
Les entreprises savent que lorsqu’elles recrutent un jeune diplômé, elles devront lui enseigner un métier et sa technicité. En revanche, elles attendent en retour des personnes non seulement motivées, mais surtout autonomes et ayant un sens des responsabilités. De nombreux jeunes diplômés ont déjà pu démontrer ces qualités via un engagement sportif, associatif, ou dans les mouvements de jeunesse. Ces expériences sont toujours valorisées.
Le recruteur belge accorde-t-il vraiment plus d’importance aux compétences techniques qu’à l’expérience professionnelle ?
Le recruteur belge continue à valoriser la formation en premier lieu, mais accorde de plus en plus d’importance aux soft skills (compétences comportementales). Cela est d’autant plus évident sur le marché des primo-entrants, qui n’ont généralement pas d’expérience technique. En recrutement, le savoir-être devient un critère de choix de plus en plus important.
La guerre des talents, dont on a tant parlé, est-elle vraiment terminée ?
Au contraire, elle bat toujours son plein. La pénurie de nombreux profils techniques ou multilingues reste une réalité. Face aux incertitudes du marché, les employeurs pensent être en position de force, mais le choc démographique lié au départ de la génération du baby-boom est bien présent. La conséquence ? Les employeurs sous-estiment la tension sur le marché des candidats. Ils sont moins réactifs, proposent parfois des salaires peu attractifs, et les processus de recrutement s’allongent, ce qui décourage les candidats.
Quels sont, selon vous, les défis futurs du marché du recrutement et de l’emploi ?
Il est toujours difficile de prédire l’avenir. Néanmoins, sur la base de ce que nous observons et de nos études de marché, nous constatons que la pression démographique crée des défis aujourd’hui et continuera de le faire pendant plusieurs années. L’organisation de la flexibilité du travail après la crise sanitaire reste un casse-tête pour de nombreux employeurs. De plus, l’importance croissante du bien-être au travail et de la protection de la santé mentale pour les jeunes générations augmente la nécessité de soigner la marque employeur et d’ajuster les politiques RH. Enfin, les bouleversements potentiels liés à l’IA restent difficiles à évaluer à ce jour.
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