Lucia, la supercalculatrice wallonne
Dotée d’une puissance de calcul comparable à 5.000 ordinateurs portables et 6.000 consoles de de jeux, Lucia aidera les entreprises wallonnes à mettre au point des produits innovants. Elle est installée sur le site A6K à Charleroi.
La nouvelle supercalculatrice wallonne a été officiellement mise en service ce mardi. Elle est capable de réaliser quatre millions de milliards d’opérations à la seconde, au service des programmes de recherche des entreprises, centres de recherche et universités de Wallonie. “Le calcul haute performance et la simulation numérique sont devenus des outils incontournables pour la compétitivité des entreprises, assure Philippe Geuzaine, directeur général de Cenaero, le centre de recherche qui gère cet outil. Les industriels recourent de plus en plus souvent à ce type de supercalculateur pour réaliser des activités de R&D en vue de la mise sur le marché de produits innovants.” La puissance de calcul permet de limiter le recours à l’expérimentation -et donc de gagner du temps et de l’argent- pour le développement de nouveaux produits. Prenons l’exemple des compresseurs pour pompes à chaleur et climatiseurs conçus par Emerson Climate Technologies à Welkenraedt . “Pour faire cela, nous avons besoin d’un outil complexe qui couple la mécanique des fluides et la mécanique de manière à pouvoir calculer et simuler le comportement réel des produits, explique Pierre Poysat, Director Advanced Engineering. Le recours au supercalculateur nous permet de diminuer de 30 à 60% le temps et le coût de développement, d’accélérer l’innovation et d’arriver avec un produit mature lors du prototypage et du test physique.”
On comprend dès lors tout l’intérêt de ces supercalculateurs. La Wallonie en possède un, baptisé Zénobe, depuis 2013. Cela a aidé les recherches tant de grandes entreprises comme Safran ou Sonaca (pour réduire de 10% les matériaux nécessaires à la construction de certaines pièces d’un avion) que de start-ups comme Matgenix, une spin-off de l’UCLouvain, spécialisée dans les matériaux. L’outil a aussi été utilisé par des chercheurs du GIEC pour étudier la fonte de la calotte glacière ou par des ingénieurs de Tractebel pour traiter les microfissures des centrales nucléaires de Doel et Tihange. Les technologies évoluant, il était temps d’investir dans une nouvelle machine. Le gouvernement wallon a débloqué 10 millions d’euros pour remplacer Zénobe par Lucia -une référence à la chimiste Lucia de Brouckère, première femme à enseigner dans une faculté des Sciences en Belgique-, qui affiche une puissance de calcul douze fois supérieure à son prédécesseur. “Il est fondamental d’accroître notre compétitivité au travers de l’innovation et le supercalculateur Lucia est un atout supplémentaire en la matière “, résume le ministre de l’Economie Willy Borsus (MR).
“On constate un intérêt croissant pour ce type d’outil, poursuit Philippe Geuzaine. Un virage important a été pris avec tout ce qui tourne autour de l’intelligence artificielle. Il faut vraiment d’importants moyens de calcul pour se développer dans ce domaine.” La supercalculatrice sera aussi précieuse pour le développement de projets dans l’internet des objets, la cybersécurité mais aussi la santé, l’agroalimentaire, l’énergie, les télécoms ou l’environnement.
Lucia permettra par ailleurs de faire le lien entre, d’une part, les ordinateurs des entreprises et des universités, et d’autre part les calculateurs les plus puissants de la planète, dont celui du consortium européen EuroHPC hébergé en Finlande et auquel contribuent la Belgique et la Wallonie. Si Zénobe était installé sur un terrain de l’aéropole de Gosselies, Lucia est, elle, placée au coeur d’A6K, un centre d’innovation autour des sciences de l’ingénieur à deux pas de la gare de Charleroi. L’idée est bien d’en faciliter l’usage par toutes les entreprises de Wallonie. Celles-ci représentent 15% des quelque 300 utilisateurs de Zenobe.
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