Le consommateur aussi doit contribuer au revenu décent du cacaoculteur

Le prix du cacao a atteint des sommets et les pays producteurs comme les nations exportatrices ne s’attendent pas à un fléchissement prochainement. La question du revenu décent à octroyer aux cacaoculteurs passera donc nécessairement par le portefeuille du consommateur, a indiqué lundi l’Organisation internationale du cacao (ICCO) lors du Sommet sur le cacao qu’elle organise jusqu’à mercredi à Bruxelles.

Les raisons structurelles qui expliquent la flambée du prix du cacao, comme le vieillissement des plantations, les maladies touchant certaines cultures et le changement climatique, risquent de se maintenir à court terme. Dans le même temps, les voix étaient unanimes lundi matin à la conférence mondiale sur le cacao pour réclamer un revenu décent aux producteurs. Inaugurant cette conférence, la reine Mathilde a d’ailleurs souligné dans son discours la maigre part, entre 5 et 10%, de la valeur du chocolat acheté par les consommateurs, qui revient aux cacaoculteurs.

   Selon Michel Arrion, directeur exécutif de l’ICCO, il sera difficile de faire mieux, proportionnellement. “Personne ne veut partager sa part de tablette de chocolat“, résume-t-il. “Les collecteurs, les broyeurs, les traders, les distributeurs…, tous vont diront qu’ils perçoivent une faible marge.”

   “La tablette doit coûter plus cher et ce n’est que comme cela que l’on parviendra à fournir un revenu décent, digne et équitable aux producteurs“, enchaîne-t-il. Selon lui, les agriculteurs, qui gagnaient correctement leur vie il y a 30 ou 40 ans, ne doivent pas avoir une plus grosse part du gâteau. “Il faut un bien plus gros gâteau à partager. Ce n’est qu’en augmentant la taille du gâteau que tout le monde sera content.”

Le président de Choprabisco, l’association belge des fabricants de chocolat, pralines et biscuits, Philippe de Selliers, est du même avis. “Tout au long de la chaîne, peut-être que certains, qui ne sont même pas issus du monde du cacao, s’enrichissent de trop, mais ce n’est pas le cas pour la plupart.” Des sondages révèlent que le consommateur souhaite un chocolat plus durable, mais n’est pas prêt à débourser plus. Pour M. de Selliers, le secteur doit donc encore mener un travail d’information auprès du public. D’autres études montrent en outre que pour un produit de plaisir comme le chocolat, le consommateur serait prêt à mettre le prix. “Nous estimons qu’il y a une certaine élasticité de prix pour laquelle nous ne perdrions pas de consommateurs.”

Un chocolat plus durable mais à quel prix ?

   Michel Arrion met encore en avant d’autres éléments. Le prix doit certes être majoré pour le producteur, mais il le doit sans doute aussi pour répondre à la mise en conformité aux normes sociales et environnementales en vigueur tant dans les pays consommateurs et importateurs que dans les pays producteurs. “Si on veut du cacao durable, il faut le payer à son juste prix.”

   Il a également pointé la volatilité des prix du cacao. Ainsi, en 2016, lorsque le secteur était en surproduction de 5%, les prix ont baissé de 50%; aujourd’hui, la production a été réduite de 10%, et les prix ont grimpé de 100%. Le directeur ne plaide pas pour la mise en place d’un marché régulé, mais reconnaît qu’en matière d’agriculture, il faut peut-être des décisions et une intervention plus strictes sur les prix.

   Fondée en 1973 sous l’égide des Nations Unies, l’Organisation internationale du cacao compte 52 pays membres: 23 pays exportateurs de cacao et 29 pays importateurs de cacao dont la Belgique. Ces membres représentent conjointement 86% des exportations mondiales de cacao et 76% des importations mondiales.

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