Interdiction des vols de nuit : Brussels Airport et DHL dénoncent un projet contraire au cadre européen
L’exploitant de l’aéroport de Bruxelles et la multinationale du transport de colis DHL ont dénoncé vendredi le projet du ministre de la Mobilité Georges Gilkinet d’interdire les vols de nuit à Zaventem, comme étant contraire au cadre européen.
DHL, qui exploite un important centre de tri à l’aéroport de Bruxelles, a dénoncé “un énième effet d’annonce politique”. D’après elle, les “propositions floues” du ministre “sont en contradiction avec le cadre européen”.
“Le secteur aérien belge, nos employés et les riverains se retrouvent confrontés régulièrement depuis plus de vingt ans à des propositions politiques divergentes, alors qu’un dialogue honnête et de la clarté bénéficieraient à tout le monde.
Une proposition lourde n’apporte pas cette clarté et freine tout investissement durable. Cela risque d’engendrer des inquiétudes et de polariser le dossier, mais n’offre pas de solutions”, selon l’entreprise détenue par la poste allemande.
Déjà une forte réduction des nuisances
De son côté, la compagnie Brussels Airport rappelle l’importance économique de l’aéroport, “deuxième moteur de croissance économique du pays, employant 64.000 personnes (directement et indirectement) et représentant 2% du PIB”.
Elle souligne déployer “beaucoup d’efforts pour rendre ses activités plus durables en attirant des avions plus silencieux avec des tarifs plus avantageux, en travaillant sur des procédures de vol plus efficaces, en éliminant complètement ses propres émissions de CO2, etc.”
Selon elle, ces nombreuses initiatives ont déjà conduit à une forte réduction des nuisances, qui se poursuivra dans les années à venir. Le projet du ministre est lancé “sans aucune consultation ou coordination avec l’aéroport et le secteur de l’aviation“, ajoute l’exploitant.
“La procédure européenne visant à imposer des restrictions d’exploitation n’est pas non plus respectée”, selon lui. “De telles propositions, aussi extrêmes et non étayées, ne font que créer de l’incertitude, de l’anxiété et de la polarisation. Elles compliquent la recherche de solutions durables et équilibrées dans l’intérêt de toutes les parties prenantes”, ajoute Brussels Airport.
La mesure phare de ce projet est la suppression totale des vols de nuit, soit entre 23h00 et 06h00 du matin.
Comme annoncé par le ministre à la Chambre, l’arrêté sera déposé d’ici le 21 juillet. Il vise à actualiser le système dit des « quota counts » (QC), soit le niveau de bruit maximum autorisé pour chaque avion à l’atterrissage ou au décollage. Ces normes n’avaient plus été révisées depuis 2009. Cette révision vise une réduction totale du niveau de bruit de 20% qui se ventilera de la manière suivante: 100% de silence en plus durant la nuit (23h00-06h00), 30% de silence en plus en soirée (21h00-23h00) ; 20% de silence en plus en matinée (06h00-07h00) et 7% de silence en plus en journée (07h00-21h00).
Les nouveaux QC diffèreront également selon que l’on soit en semaine ou en week-end/jour férié. Au cours de ceux-ci le niveau de bruit toléré sera plus bas, y compris en journée.
Les valeurs autorisées seront réduites à zéro la nuit
Le projet d’arrêté ministériel introduit en outre des valeurs individuelles pour chaque avion, et des valeurs annuelles maximales. La nuit, les valeurs autorisées seront donc réduites à zéro, tant pour les décollages que pour les atterrissages. Quelques exceptions sont prévues comme les transports gouvernementaux ou les missions militaires, de police ou de secours ainsi qu’en cas de catastrophes ou pour des raisons météorologiques. En journée, tous les avions de nouvelles génération pourront voler ainsi que presque toutes les générations d’avions moyen-courriers. L’intention du ministre est d’aboutir à une entrée en vigueur à l’hiver 2024-2025.
Des milliers d’emplois en jeu, plaide le syndicat chrétien
L’ACV-Transcom, branche du syndicat chrétien, fustige samedi la proposition de supprimer les vols de nuit à l’aéroport de Zaventem, émise par le ministre fédéral de la Mobilité Georges Gilkinet. Plusieurs milliers d’emplois sont en jeu, avance le syndicat.
“Non seulement DHL Aviation, mais aussi beaucoup de personnel et d’activités économiques des secteurs adjacents, tels que la manutention, les compagnies aériennes, la logistique et l’aéroport lui-même, subiront d’énormes dommages”, souligne l’ACV-Transcom. Le syndicat déclare qu’il ne permettra pas que “des campagnes politiques soient lancées sur le dos de milliers de travailleurs”. “Gilkinet ferait mieux de travailler sur un cadre juridique solide pour Brussels Airport, sur une politique coordonnée au niveau national pour nos aéroports et nos secteurs de l’aviation. Il y a certainement moins de votes à gagner avec cela”.