Harmonisation des systèmes de sécurité sociale européens : un casse-tête sur le point de prendre fin ?

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Naviguer entre les différents systèmes européens de sécurité sociale reste très compliqué pour les travailleurs et les entreprises. La Commission européenne s’attaque enfin au problème.

C’est LE casse-tête des travailleurs frontaliers, des entreprises exerçant des activités dans d’autres pays de l’Union européenne et des administrations nationales : la sécurité sociale. Chaque pays a son système, des systèmes souvent difficilement compatibles. Pourtant, c’est un enjeu clé du marché unique.

Si l’on veut que les entreprises se développent en Europe, si l’on veut que les travailleurs puissent traverser les frontières facilement, il est indispensable de concevoir un cadre efficace pour la sécurité sociale. Et forcé de constater qu’on en est loin : sur le site de l’Union européenne, quand l’on tape “sécurité sociale”, seuls six petits paragraphes de quelques lignes nous expliquent la règle générale, sans mentionner par exemple les documents A1 ni S1, pourtant indispensables aux travailleurs étrangers. Bref, on se débrouille.

Mais cela va-t-il bientôt changer ? C’est en tout cas ce que semble vouloir la Commission européenne.

En ligne de mire : le passeport européen de sécurité sociale

En 2021, 16 millions de personnes originaires de l’UE, de l’espace économique européen (EEE) / Association européenne de libre-échange (AELE) ou de Suisse vivaient, travaillaient dans un autre pays de l’UE, de l’EEE/AELE ou en Suisse. En 2021, environ 235 millions de personnes en Europe détenaient une carte européenne d’assurance maladie.

La Commission avoue que “malgré les précédentes initiatives” visant à améliorer la circulation transfrontière d’informations en matière de sécurité sociale, cela reste compliqué, en raison d’une interopérabilité insuffisante entre les systèmes nationaux. Les entreprises peuvent en effet être confrontées à des coûts et à des obstacles administratifs, notamment lorsqu’elles envoient leurs salariés travailler temporairement à l’étranger. Ces obstacles pourraient avoir un effet dissuasif sur les citoyens à exercer leur droit à la libre circulation et sur les entreprises prêtes à faire des affaires à l’étranger et récolter les fruits du marché unique.

La communication présentée aujourd’hui […] permet aux entreprises, aux autorités nationales et aux services d’inspection du travail de réaliser des économies considérables et de gagner énormément de temps. Nous avons mis les outils en place: nous comptons désormais sur les États membres pour en faire bon usage.

Nicolas Schmit, commissaire européen à l’emploi et aux droits sociaux

Et c’est donc dans un document de dix-sept pages adressé cette semaine à l’ensemble des institutions européennes que la Commission annonce vouloir coordonner les systèmes de sécurité sociale, et ce grâce au numérique. Elle parle de mettre en place des “mesures concrètes”, l’enjeu principal étant de réduire la charge administrative pour les citoyens et les entreprises.

Les mesures proposées pour harmoniser ces différents systèmes demandent à ce que les Etats membres :

  • accélèrent la mise en œuvre du système d’échange électronique d’informations sur la sécurité sociale (l’EESSI) à l’échelon national, de sorte qu’il soit pleinement opérationnel dans toute l’Europe d’ici à la fin de l’année 2024. Ce système informatique spécifique à la sécurité sociale permet de numériser les échanges entre les institutions nationales “afin de s’écarter des procédures sur support papier, qui sont chronophages et fastidieuses”.
  • permettent un suivi entièrement en ligne, de sorte que les personnes aient rapidement accès aux prestations auxquelles elles ont droit. La Commission invite les Etats membres à s’appuyer sur le portail numérique unique, qui prévoit que les citoyens et les entreprises pourront, à partir du 12 décembre 2023 au plus tard, accéder entièrement en ligne à certaines procédures administratives importantes.
  • participent aux tests du passeport européen de sécurité sociale. Ce dernier est actuellement soumis à une expérimentation et doit permettre de rationaliser les documents pour ainsi faciliter les échanges entre les citoyens ou entreprises et les administrations nationales.
  • œuvrent à la mise en place de portefeuilles européens d’identité numérique, qui permettront aux citoyens de l’UE de détenir des versions numériques des documents relatifs à leurs droits, tels que la carte européenne d’assurance maladie, ce qui facilitera la vérification instantanée de ces documents par les institutions de sécurité sociale, les services d’inspection du travail et les prestataires de soins de santé.

La Commission aidera les États membres dans leur mise en œuvre de ces mesures en débloquant des fonds européens. Le choix du tout numérique, s’il facilitera de facto les échanges de données, pose forcément des questions de sécurité et de protection des données, auxquelles la Commission devra aussi répondre.

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