Grâce à son kéfir, Kult triple son chiffre d’affaires et poursuit 
son expansion à l’international

Kéfirs de fruits La quantité de sucre y est quatre fois plus faible que dans des sodas classiques.

Kéfir, kombucha… les boissons fermentées se multiplient 
dans l’horeca et le “retail”. La start-up belge Kult est même 
la première à faire entrer le kéfir de fruits en listing national dans la grande distribution.

Depuis quelques années, un nouveau segment prend de l’ampleur dans les magasins bios et s’étend, petit à petit, aux grandes surfaces : les boissons fermentées. Celles-ci se déclinent surtout en deux versions : le kombucha, qui est sans doute le plus connu, et le kéfir. “C’est le kombucha qui m’a d’abord inspirée”, avoue Mathilde Riga, fondatrice de Kult Kéfir, start-up belge qui propose des boissons à base de kéfir de fruits. Sa découverte avec ces produits remonte à ses années passées en Angleterre, où Mathilde effectuait son master de bioingénieure et où les rayons débordaient déjà de ce type de boissons fermentées.

Passionnée par la science et la bonne alimentation, la jeune entrepreneuse – à peine 25 ans lorsqu’elle crée son entreprise en 2020 – décide dès lors de s’intéresser de plus près à ce marché. “A cette époque, dans les rayons belges, il n’y avait pas beaucoup de propositions”, se souvient-elle, même si le kombucha commençait à se faire connaitre. Bien plus populaire que le kéfir, le kombucha est préparé à partir d’infusion de thé, ce qui le rend plus acide. “Notre conviction est que le kéfir est plus accessible et moins clivant que le kombucha en matière de goût.”

Mathilde Riga entourée par Dorian Lefèvre et Edouard Dubois: “Nous formons une équipe très complémentaire”.

Si ces boissons reviennent au goût du jour, elles se consomment en fait depuis des millénaires. La naissance du kéfir remonterait à l’Antiquité, dans la région du -Caucase : il était d’abord fabriqué à partir de lait de brebis ou de vache, versé dans un sac de cuir dans lequel on ajoutait des grains de kéfir, une sorte de levain. Puis on le laissait environ deux jours en l’agitant de temps à autre avant de le consommer. Deux sortes de kéfirs coexistent aujourd’hui : une version lactique et une autre à base d’eau et de fruits. Dans le kéfir de fruits, l’une des versions véganes les plus courantes, le lait est remplacé par de l’eau et des fruits frais ou secs. “Le point de départ est une eau citronnée à laquelle on ajoute du sucre de canne et des grains de kéfir, explique Mathilde Riga. Pendant la fermentation, ces grains vont consommer les sucres présents dans la limonade et les transformer en acide organique, qui va conférer à cette boisson un goût assez doux.”

Résultat : la quantité de sucre est quatre fois plus faible que dans des sodas classiques. “C’est sans doute l’un des éléments qui explique le succès de ces boissons fermentées”, ajoute la fondatrice qui fait référence à la génération des milléniaux, aussi appelée génération bien-être, friande de ces aliments “fonctionnels”. En plus d’être moins sucré, le kéfir présente en effet de nombreuses vertus, à commencer par le confort digestif qu’il apporte et ses capacités à améliorer le système immunitaire. Cependant, impossible pour Kult de communiquer sur ces avantages : l’Agence européenne de sécurité des aliments n’a jamais officiellement reconnu de telles propriétés à ces produits.

Les Pays-Bas et la Suisse sont deux marchés où il n’y a pas tellement de producteurs locaux, contrairement à la France” – Mathilde Riga, fondatrice de Kult Kéfir

Marché tiré par le bien-être

Ces aspects santé combinés à une demande croissante de boisson sans lactose stimulent pourtant aujourd’hui la croissance du secteur de ces boissons fonctionnelles. La taille du marché mondial du kéfir était évaluée à 1,23 milliard de dollars en 2019 et devrait atteindre 1,84 milliard en 2027. Un marché dopé par la sensibilisation croissante des consommateurs à la prévention en matière de santé, auxquels répondent notamment les aliments probiotiques.

Converti sur le tard, le Vieux Continent est aujourd’hui celui qui connaît la croissance la plus rapide de son chiffre d’affaires, notamment parce que malgré l’Agence européenne de sécurité des aliments, l’usage de probiotiques est aujourd’hui conseillé par de nombreux médecins et est entré dans les habitudes des ménages. En France, le nombre de références de kombuchas et de kéfirs de fruits a par exemple grimpé de 65% en deux ans.

Mais en Belgique, aussi, le kéfir suscite l’intérêt des consommateurs. C’est pour cette raison que Mathilde Riga a complété son équipe. Edouard Dubois, en charge de l’aspect financier, et Dorian Lefèvre, responsable commercial, l’ont désormais rejointe. “Nous sommes très complémentaires et nous challengeons mutuellement”, assure la fondatrice qui s’occupe de la gestion du produit et du marketing. Pour le reste, elle s’est associée à un brasseur d’Anvers chez qui elle sous-traite la production. Sur une année, ce sont 750 hectolitres de Kult qui sont brassés, l’équivalent de 250.000 bouteilles et canettes.

Nouveaux clients

Kult a triplé son chiffre d’affaires entre 2022 et 2023 et prévoit d’atteindre un million cette année grâce à l’acquisition de nouveaux clients en Belgique et à l’export. En volume de kéfir, cela reviendrait à 2.500 hectolitres. La start-up vient tout juste de démarrer un partenariat avec Delhaize et entre ainsi dans le listing national du distributeur au Lion, ce qui pousse son nombre de points de vente à 700 en Belgique et aux Pays-Bas. La stratégie commerciale de Kult était simple : s’implanter et faire ses preuves dans le réseau bio, très ouvert aux innovations, avant d’envisager un autre canal de distribution. “Nous n’avons pas ressenti de crise du bio mais c’est aussi parce qu’en parallèle, on continuait à accroître le nombre de points de vente”, reconnaît l’entrepreneuse.

© Alexandre de Terwangne

La start-up s’est ensuite attaquée au canal de la restauration avec un focus “lunch on-the-go” : Kult s’est ainsi développé dans les Delitraiteur mais est également disponible dans des enseignes horeca tels que Jeanbon, Knees to Chin, Makisu, Mix ou Bon with Love. “Pour moi, l’horeca et le retail sont complémentaires”, poursuit Mathilde Riga qui rappelle combien l’horeca est idéal pour faire connaître un produit. Mais pour passer à l’étape suivante, soit rendre l’accès au kéfir beaucoup plus simple, une distribution nationale s’imposait. D’où le choix de Delhaize. “Mais il était essentiel que cela s’opère dans le respect de notre marge, c’était un point de non-discussion pour nous”, ajoute la fondatrice qui fait référence à la pression sur les prix qu’ont subi les acteurs de l’agroalimentaire, en raison de l’inflation, ces deux dernières années.

Preuve de ces difficultés, sur les trois concurrents directs qui existaient lorsque Kult s’est lancé sur le marché, il n’en reste plus qu’un : Eau Vertueuse. “On se différencie de ce dernier car il propose un kéfir sans sucre et est plutôt tourné vers l’apéro là où nous nous positionnons en alternative aux sodas, note Mathilde Riga, qui dit appréhender très positivement la concurrence. Plus on est sur le marché, plus le nombre de références augmente, ce qui donnera davantage de visibilité à ce type de boissons.”

Il y a un véritable processus de brassage, ce n’est pas un simple mélange d’eau, de CO2, de sucre et d’arômes.

Acquisition grâce à la canette

Mais on l’a vu, la start-up ne vise pas que le marché belge. Elle a étendu son offre au Pays-Bas où se trouve son plus gros client, Udea, un distributeur bio qui couvre une grande partie du parc local et possède ses propres magasins, baptisés Ekoplaza. Kult se lancera également en Suisse, aussi bien dans le retail bio que dans l’horeca, dès le printemps de cette année. “Ce sont deux marchés où il n’existe pas tellement de producteurs locaux, explique la fondatrice. Et ce, contrairement à la France.” Voilà pourquoi, chez nos voisins hexagonaux, Kult vise plutôt le marché de l’horeca, y rodant actuellement une -formule-test.

Une expansion rendue possible grâce à ses canettes ! A l’origine, Kult se distribuait en effet exclusivement dans des bouteilles en verre – c’est toujours le cas dans les enseignes bios –  mais la fondatrice y voyait deux contraintes : d’une part, la production en bouteille est compliquée à massifier; d’autre part, elle présente une date limite de consommation assez courte: quatre mois contre 18 pour une canette. “Les canettes étant pasteurisées, elles ne contiennent certes pas les bactéries vivantes mais conservent les acides de la fermentation, ceux qui confèrent des bienfaits à la digestion”, précise Mathilde Riga. Grâce à la canette, Kult propose ainsi une alternative qui répond au besoin de la grande distribution mais aussi de l’horeca, lui aussi demandeur de date de conservation plus longue. “Le packaging est plus léger et se prête idéalement à l’on-the-go”, ajoute-t-elle.

A noter que la start-up a conçu plusieurs goûts afin de répondre à la demande croissante des consommateurs : l’original est complété par des saveurs comme le yuzu (qui est le best-seller en bouteille); gingembre et romarin; chai et hibiscus; passion; gingembre et citron. “A l’avenir, on va aussi développer des goûts saisonniers mais également multiplier les formats”, complète Mathilde Riga. Les prix? Le kéfir de Kult s’écoule entre 2,49 et 2,99 euros selon qu’il est vendu en bouteille ou en canette. “On est plus chers que les sodas classiques, reconnaît l’entrepreneuse. Mais il y a un véritable processus de brassage, ce n’est pas un simple mélange d’eau, de CO2, de sucre et d’arômes.” Et de rappeler que l’ensemble des ingrédients utilisés sont bios et que la totalité de la boisson est produite et brassée en Belgique.

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