FN Herstal: 4.000 emplois et un écosystème fort

Olivier Mouton
Olivier Mouton Chef news

L’entreprise de Herstal a demandé à HEC Liège d’étudier son impact économique. Résultat ? Il est conséquent et implique pas moins de 1.200 fournisseurs répartis dans tout le pays.

Le secteur de la défense a le vent en poupe, en raison d’un contexte géopolitique dégradé et d’investissements croissants dans la sécurité. La Région wallonne occupe une place de choix dans le domaine et détient, avec la FN, une entreprise que le nord du pays et l’Europe nous envient. Mais quel est son impact économique réel ? Pour en avoir le cœur net, ses dirigeants ont commandité, voici un an, une étude à HEC Liège. Le rapport long de 89 pages, rédigé par quatre chercheurs (Xavier Flawinne, Henry-Jean Gathon, Barbara Sak, Jérôme Schoenmaeckers), apporte toutes les réponses. L’objectif principal, précise la FN, consistait avant tout à analyser de façon objective sa chaîne d’approvisionnement.

Depuis, l’arrivée d’un nouveau gouvernement a mis sur la table un débat concernant la participation de la Région wallonne, qui détient 100% de l’entreprise. Il n’est certainement pas question de perdre la main, mais peut-être d’ouvrir le capital. En tout état de cause, cette étude démontre l’importance de ce joyau industriel.

Plus de 4.000 emplois

Le FN Browning Group est un employeur important en Belgique, avec ses 1.721 travailleurs (en équivalents temps plein) en 2022, souligne le rapport. “Ce chiffre peut être a minima multiplié par deux si nous nous intéressons aux emplois additionnels générés en Belgique, autrement dit aux emplois directement impactés par les activités du groupe en Wallonie et de manière générale sur le territoire belge”, précise encore le document. On peut encore y ajouter 730 personnes dont les revenus proviennent de la consommation de ces travailleurs. Soit un total de 4.000 emplois, donc.

Reprise par la Région wallonne pour un euro symbolique en 1997, l’entreprise a connu, depuis, une croissance continue. Si l’on prend l’année 1998 pour référence, on s’aperçoit que le taux d’emploi en 2022 est de l’ordre de 121% par rapport aux débuts. Le contexte économique actuel devrait permettre, ces prochains mois, quelques dizaines de recrutements supplémentaires et l’installation d’une nouvelle ligne de production.

La majorité de ces emplois sont occupés par des résidents de la province de Liège pour les sites wallons et de la province du Limbourg pour le site de Zutendaal. L’étude met en lumière une population salariale relativement jeune, avec une forte représentation de la tranche d’âge 30-39 ans, et une grande diversité de niveaux de diplômes à l’embauche. Le détail du niveau de formation au regard des fonctions occupées démontre l’ouverture du groupe à valoriser l’expérience des personnes.

“L’emploi au sein des entités belges de FN Browning Group est passé, il y a une dizaine d’années, par une métamorphose significative de sa structure d’âge, ajoutent les chercheurs. Une combinaison successive de plans de mise à la prépension et d’un chiffre d’affaires à des niveaux records a permis, à l’époque, non seulement le remplacement des personnes sur le départ, mais surtout l’engagement de nombreux travailleurs, générant un accroissement net de l’emploi.”

La défense conserve une image difficile, mais cela change, notamment en raison de la situation géopolitique.

Plus de 1.200 fournisseurs

Cet impact économique conséquent en termes d’emploi peut aussi être mesuré par les dividendes versés à la Région, prolongent les auteurs de l’étude. Depuis 2015, grâce à son redressement, la société contribue chaque année au budget wallon. “Selon les années, le groupe a versé entre 6,5 et 25 millions d’euros par an à la Région wallonne, écrivent-ils. Au total, ce ne sont pas moins de 121,5 millions d’euros sur huit ans qui ont été versés.”

L’impact de la FN se mesure encore en calculant ses fournisseurs, essentiellement belges. Leur nombre est important, même s’il a légèrement décliné. Les fournisseurs sont “multiples et à l’image d’une entreprise complexe”. Sur la période étudiée (2018-2022), leur nombre a baissé, passant de plus de 1.400 fournisseurs à un peu plus de 1.200. “Géographiquement, en Belgique, le groupe traite principalement avec des fournisseurs se situant en Wallonie, soit 48 % pour l’année 2022. Vient ensuite la Flandre avec 37 %, suivie de Bruxelles avec 15 % des fournisseurs.”

Précision: la somme totale des achats en Belgique varie entre environ 180 et 220 millions d’euros, en dehors de l’année 2020 qui a enregistré une baisse due aux difficultés générées par la crise sanitaire.

Les chercheurs de HEC Liège prolongent cela en calculant l’impact élargi: “Basée sur les achats de minimum 90 % des fournisseurs de l’entité FN Herstal repris dans 57 secteurs d’activités différents, nous estimons une production additionnelle cumulée des fournisseurs située entre 54 % et 59 % pour l’année 2022. Ainsi, par exemple, pour un million d’euros d’achats réalisés par le groupe auprès de ses fournisseurs, entre 540.000 et 590.000 euros de production supplémentaire sont générés dans l’économie via ces fournisseurs, de par l’activité que cela nécessite à leur niveau.”

Le FN Browning Group est un employeur important en Belgique. © pg

Une image revalorisée

Interrogés, les principaux fournisseurs saluent la FN comme un partenaire “historique” et important pour eux en raison de sa réputation internationale. La défense conserve certes une image difficile, mais cela change: “Même si l’image du secteur de la défense a repris des couleurs auprès de la population belge (et plus généralement en Europe) depuis les faits récents que nous connaissons au niveau géopolitique, les entreprises qui travaillent même partiellement pour satisfaire les commandes associées au secteur de la défense et de l’armement peuvent subir des pressions diverses pour se tourner purement et simplement vers des clients d’autres industries.”

Autre confirmation : les banques ne sont pas toujours favorables à soutenir des investissements dans ce secteur délicat. Là aussi, cela bouge. “Heureusement, ces difficultés semblent s’estomper grâce au changement de perception vis-à-vis du secteur”, est-il précisé. Et d’ajouter: “Son changement d’image doit aussi passer par un message politique. Les dernières annonces de partenariats et d’investissements dans le secteur pour faire face au contexte géopolitique en sont un bon début.”

L’étude passe encore en revue les dépenses de la FN en matière de recherche et développement. “Depuis 2005, ces dépenses de R&D réalisées en Belgique ont oscillé entre 6 % et près de 13 % du chiffre d’affaires de la FN Herstal, pour s’établir à 9,5 % en 2022. Le nombre de salariés travaillant en recherche et développement s’avère assez variable sur la période 2005-2022. Il a augmenté de 95 en début de période à 120 en 2022, en passant par un pic à 167 en 2015.”

L’année 2000 marque un tournant car l’entreprise se lance alors dans le domaine des armes à létalité réduite et le développement de pistolets intelligents à destination des forces de l’ordre en Europe et aux États-Unis. Depuis, l’entreprise n’a cessé de se réinventer en développant des systèmes intégrés, des applications aéronautiques, des stations télé-opérées et navales… Le cap est désormais mis sur l’intelligence artificielle.

En conclusion, HEC “salue des perspectives très positives pour le développement de la production industrielle de ce groupe stratégique pour la défense belge et européenne”.

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