Double Dutch, un tonic créé par des jumelles
Les jumelles Joyce et Raissa de Haas, fondatrices de Double Dutch, une marque belgo-anglaise de mixers et de tonics premium ont construit une entreprise valorisée en millions en à peine dix ans. A l’âge de 28 ans, elles ont été incluses par Forbes dans leur prestigieuse liste “30 Under 30”. Retour sur un parcours entrepreneurial inspirant et atypique.
Deux jumelles, un esprit d’entreprendre, de l’ambition et vous obtenez les parfaits ingrédients de l’entreprise Double Dutch, une marque spécialisée dans les mixers et tonics premium. Sortie tout droit d’une thèse universitaire rédigée par Joyce et Raissa de Haas, cette marque est devenue un acteur clé sur le marché des boissons. “Nous avons toujours aimé fabriquer nos propres mixtures lorsque nous organisions des fêtes à l’université”, se rappelle Raissa de Haas. “Le gin était très tendance, mais le choix de boissons était limité, ma sœur et moi préparions donc un grand pot de nos propres eaux toniques avec différentes saveurs.”
Surnommées les “tonic twins” grâce à leurs créations de mix faits maison, les deux sœurs ont ainsi identifié un vide sur le marché des tonics et mixers premium savoureux. En créant Double Dutch Drinks, elles offrent une alternative aux saveurs originales à ces éternels colas, tonics ou jus de fruits avec leurs soft-drinks à peine sucrés. “Nous avons créé 12 saveurs différentes comme concombre-pastèque – qui est la saveur la plus vendue – ou grenade-basilic”, expliquent-elles. Ces boissons regroupent à chaque fois deux saveurs, une référence à leur lien de jumelles.
C’est à Londres que l’histoire de l’entreprise débute, il y a pratiquement dix ans. Après avoir étudié et travaillé brièvement dans la finance en Belgique, les jumelles déménagent au Royaume-Uni et réalisent un master complémentaire à l’University College de Londres. Le sujet de leur thèse ? Le manque d’innovation sur le marché des mixers et la recherche de solutions. Une fois diplômées, les jumelles prennent un départ fulgurant puisque leur thèse leur vaut le prix de la start-up la plus prometteuse, accompagné d’une somme de 10.000 livres. “Ce qui nous a permis de payer la première production et le branding, comme le design de notre logo et le site web. Ensuite, nous y avons injecté nos propres économies”, expliquent les jumelles. Elles démarchent ensuite les entreprises via LinkedIn et décrochent un contrat avec The Dorchester et Novikov, respectivement un des hôtels les plus luxueux et un des bars les plus trendy de Londres.
“Etre jumelles est une véritable force dans le business” – Joyce et Raissa de Haas
Disponible dans plus de 40 pays
Aujourd’hui, Double Dutch est disponible dans plus de 40 pays, principalement en Europe et dans les Emirats arabes unis. “La Belgique est un marché clé pour notre business”, explique Joyce de Haas. “Au-delà du fait que c’est le pays dans lequel nous avons grandi, les consommateurs belges sont friands de boissons qualitatives et artisanales”, ajoute-t-elle. Le Brexit a d’ailleurs contribué au développement de notre pays comme relai puisque les jumelles y ont installé un hub pour desservir les consommateurs européens. Il y a à peu près un an, les deux entrepreneuses se sont également lancées à la conquête de l’Asie, notamment de Singapour et Hong Kong qui sont des marchés en croissance. Elles se lanceront prochainement en Thaïlande, en Malaisie et en Indonésie. “Bangkok compte à elle seule un nombre important de bars référencés comme les meilleurs d’Asie. C’est donc un marché très intéressant.”
Raissa et Joyce de Haas estiment cependant que l’important n’est pas tellement l’ouverture de nouveaux marchés. “On doit augmenter notre taux de pénétration sur les marchés existants, poursuivent-elles. Cela doit passer par un focus plus important sur la distribution dans les supermarchés.”
A l’origine, les deux responsables ont commencé à distribuer leurs produits via l’horeca. “Nous avions d’ailleurs sous-estimé le rôle des distributeurs dans le secteur, avouent-elles. Les établissements horeca choisissent rarement leurs marques eux-mêmes, ce sont donc les grossistes qu’il a fallu convaincre.”
Aujourd’hui l’horeca reste le cœur de métier de Double Dutch, bien que l’entreprise se soit diversifiée grâce au retail et à l’e-commerce. “L’horeca représente toujours 80% de nos revenus”, précise Raissa. Si la part de l’e-commerce reste assez faible concernant les revenus, les jumelles y voient un grand potentiel afin de mieux connaître leur consommateur. “La vente digitale est un bon moyen d’analyser les besoins des clients, c’est un canal de distribution qui va évoluer prochainement”, confirment-elles. Discrètes sur leurs revenus, elles affirment connaître une croissance annuelle composée de 80%, depuis la création en 2015.
Les produits Double Dutch répondent aux tendances du marché, à savoir les préoccupations pour la santé et la durabilité. “Nos produits sont réalisés à partir d’ingrédients naturels et sont peu caloriques”, pointe Raissa de Haas. “La crise sanitaire a été un moment clé pour les consommateurs qui se sont de plus en plus souciés de leur santé.”
Le sans-alcool est une autre tendance qui a accéléré le développement et modifié leurs produits. “C’est une demande de plus en plus importante de la part de la jeune génération”, observent les jumelles qui ont alors développé des produits qui se suffisent à eux-mêmes, sans ajout d’alcool. En termes d’innovation, les entrepreneuses s’attellent à développer de nouvelles saveurs notamment pour Noël. “Il faut sans cesse continuer d’expérimenter”, souligne Joyce qui rappelle que les goûts sont sensiblement différents d’une région à l’autre.
Richard Branson et la famille Heineken
Récemment, Double Dutch a obtenu la certification B-Corp dès sa première demande, avec un score impressionnant de 86,9 (la médiane étant de 50,9 points). “Ce n’est pas juste un label, mais le reflet de notre engagement et de nos valeurs”, explique Raissa de Haas. Si le score obtenu est déjà très élevé, les jumelles sont convaincues qu’elles peuvent encore le faire évoluer. “Double Dutch surveille continuellement son impact environnemental et vise à réduire constamment son empreinte écologique. Il faut regarder à chaque maillon de la chaîne et continuer de s’améliorer.”
Ainsi, la marque est neutre en CO2 et a réduit son utilisation de plastique de 30 %. “Nos bouteilles en verre sont fabriquées à partir de 20 % de verre recyclé”, notent les entrepreneuses. La marque a également lancé sa gamme de boissons en canettes en aluminium, recyclables à 100 % et à l’infini, avec une empreinte carbone inférieure à celle des bouteilles en verre.
Pour développer une entreprise valorisée en millions en à peine dix ans, les jumelles ont pu compter sur des soutiens de poids dans le secteur. En 2017, elles ont ainsi reçu l’appui de Richard Branson, l’homme d’affaires britannique à la tête du groupe Virgin qui possède notamment une maison de disques et une compagnie aérienne. Mervyn Davies, ancien ministre du Commerce au Royaume-Uni, siège au sein de leur conseil d’entreprise et fait également partie des actionnaires à l’instar de quelques pointures du monde de l’industrie. Plus récemment, en 2020, c’est la famille Heineken qui est entrée dans l’actionnariat à hauteur de 20%. “Leur expérience et réseau nous aide énormément à grandir”, assurent les jumelles.
Si travailler en famille n’est pas toujours facile, cela sonne comme une évidence pour ces sœurs. “Etre jumelles est une véritable force dans le business, estiment-elles. Nous avons confiance à 100% l’une envers l’autre, nous partageons la même vision et un regard suffit à se comprendre, ça aide beaucoup lorsqu’il faut prendre des décisions rapidement.”
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