Derrière le gimmick des Cuisines Dovy, une vraie entreprise familiale “qui fait tout elle-même”

© Donald Muyle occupe encore un rôle actif dans la société codirigée par ses deux fils, Christ et Mario

Comme en son temps les meubles Mailleux et l’engagement de toute une équipe, Cuisines Dovy est indissociable des pubs qui mettent en scène Donald Muylle, le fondateur, et garantissent que votre cuisine est créée en Belgique. Derrière ce gimmick tout simple mais diablement efficace, se cache une entreprise familiale qui fait tout, mais vraiment tout, elle-même…

“Nous fabriquons votre cuisine en Belgique !” Que ce soit à la radio ou en télévision, impossible d’échapper aux pubs des Cuisines Dovy. Mais est-ce vraiment la réalité ? L’homme qui joue dans les spots est-il vraiment le fondateur de l’entreprise ou un gentil grand-père qui fait l’acteur ? Alors on a dit chiche à la famille Muylle ! Donald et ses deux fils, Mario et Christ, ont joué le jeu et accepté d’ouvrir les portes de leur entreprise située dans un zoning industriel dans la proche banlieue de Roulers. Au bout de quelques secondes, le doute n’était plus permis : le gentil grand-père est bien le patron des Cuisines Dovy…

“Quand nous avons lancé le slogan en 2008, beaucoup de gens se sont demandé si le monsieur de la pub existait vraiment, sourit Mario Muylle, qui gère la vente et le marketing dans l’entreprise. D’autres ne croyaient pas que c’était vraiment lui le patron…”

“En réalité, le but initial de cette pub était de montrer notre différence par rapport à une concurrence très affûtée dans le secteur, renchérit Donald Muylle. Montrer que nous étions sérieux, que nous travaillions en Belgique et pas ailleurs et que la confiance de nos clients était justifiée. Ceci dit, quand on a décidé de me mettre en scène, je n’étais pas du tout certain que j’allais y arriver. Mon truc, c’est l’atelier, pas les caméras de télévision ! (rires) “

Donald et Yvette

L’histoire a commencé en 1980. Fabricant de meubles, Donald Muylle ne voyait pas l’avenir du secteur avec optimisme. Avec le recul, force est de constater qu’il a eu raison avant tout le monde. Avec sa femme Yvette, il a décidé de lancer une petite affaire de fabrication de cuisines. Quant au nom de l’entreprise, il a suffi de s’amuser un peu avec les prénoms…

“J’ai commencé à travailler à 14 ans et je n’ai donc pas fini mon parcours scolaire, raconte Donald Muylle. Cette année, cela fera 57 ans que je travaille. Je viens encore tous les jours de 7h30 à 18h. Je suis ici à la maison. Cette entreprise, c’est mon enfant. En 1980, c’était le début de la mode des cuisines américaines et, comme finalement, le métier n’est pas si éloigné des meubles, je me suis lancé. Nous n’avions pas d’argent, pas d’héritage et personne ne nous a jamais rien donné. Les débuts ont été très compliqués mais nous avons mordu sur notre chique. Nous n’avions pas d’espace de vente ou de salle d’exposition. J’allais le soir chez les clients. Il a fallu attendre 1983 pour avoir un tout petit espace de vente avec un atelier à l’arrière. La vraie salle d’exposition est venue en 1986. Entre-temps, le bouche à oreille avait fait son œuvre. Les clients, visiblement très contents, ont fait notre publicité et l’entreprise a décollé. Vous savez, depuis 44 ans, nous vendons exactement la même chose et rien que ça : une cuisine de haute qualité à un prix abordable. Livrée et installée avec le respect du client. J’ajouterais encore ceci : chez Dovy, chaque cuisine est unique. Nous n’en produisons pas deux identiques puisqu’elle est créée ici à Roulers sur mesure pour le logement du client.”

Depuis 44 ans, nous vendons exactement la même chose et rien que ça: une cuisine de haute ­qualité à un prix abordable. ” – Donald Muylle

Cette promesse de qualité à prix abordable, Cuisines Dovy peut la tenir car l’entreprise fait tout elle-même. Ce qui élimine les intermédiaires ou les fournisseurs qui font gonfler le prix ou engendrent des retards et permet de garder les coûts sous contrôle malgré la qualité des matériaux utilisés et une production 100 % belge qui est, évidemment, loin d’être indolore en termes de coûts salariaux. Cuisines Dovy emploie aujourd’hui 600 personnes : 300 pour la production, 150 pour le placement chez le client, des chauffeurs de camion, des informaticiens, des vendeurs, des coachs pour aider les clients chez eux dans leur choix, etc. Vu la diversité de la production, le nombre de métiers exercés chez les Muylle est assez impressionnant. D’autant plus impressionnant que quand ils affirment qu’ils font tout eux-mêmes, c’est vraiment tout.

60.000 m² d’ateliers

Cuisines Dovy dispose de 10 hectares de terrain dans un zoning de la banlieue de Roulers. Six hectares ont été développés, ce qui donne une idée de la réserve de capacité de production dont dispose l’entreprise. Derrière la façade vitrée du siège social, se cachent des ateliers à perte de vue. 300 personnes y produisent chaque jour votre cuisine dans une fourmilière de près de 60.000 m².

Pour identifier le personnel, ce n’est pas bien compliqué : polar beige pour le chef de secteur, noir pour l’ouvrier qualifié, bleu pour l’étudiant venu en renfort, orange pour l’étudiant en formation alternée.

Vu la grandeur de l’usine, il est possible de s’y déplacer sur une espèce de Segway. L’ensemble de la production est réglé comme du papier à musique par un système digital unique imaginé et codé par le service informatique maison. Grâce à un code-barre, le matériau de base suit un parcours bien précis pour finir terminé ou assemblé dans le chariot destiné au client. A côté de chaque machine ou lors de chaque étape, un grand écran indique aux ouvriers le travail de la journée, l’avancée des tâches pour chaque client et les retards ou soucis éventuels. Dans chaque hall, de grands marquoirs indiquent l’heure, le n° de la semaine et le jour de la semaine. Des chiffres que l’on retrouve sur la feuille de route de chaque commande. Evidemment, les robots sont partout, singulièrement pour tout ce qui est répétitif. Il y en a même un qui place les charnières et les petits pitons de métal sur les panneaux d’armoires à assembler. Beaucoup aimeraient avoir ce robot en rentrant de chez Ikea avec leurs meubles…

“Nous avons automatisé au maximum ce qui pouvait l’être, explique Christ Muylle. Pour une question de performance et de productivité. Certaines machines ont été conçues pour nous et nous avons aussi participé à l’élaboration de systèmes techniques aujourd’hui aussi utilisés ailleurs. C’est une vraie fierté. Pratiquement, une cuisine est livrée au maximum dans les huit semaines qui suivent le bon de commande final. C’est évidemment plus long quand c’est une construction neuve et que nous devons attendre les autres corps de métier. Cette robotisation permet de nous consacrer sur ce qui fait notre valeur ajoutée : le savoir-faire et le travail artisanal de nos ouvriers qualifiés. Petit à petit, nous avons ajouté des ateliers et du savoir-faire : inox, pierre naturelle, etc. Dernièrement, la tendance va de l’inox au métal noir. On a donc amplifié ce travail-là pour répondre aux envies des clients.”

En fait, c’est simple : à part l’électroménager qui dispose d’une tour de stockage flambant neuve, tout est travaillé à Roulers…

“Pour vous donner un exemple, nous ne travaillons avec aucune agence de pub ou de communication, sourit Mario Muylle. Nous avons un service marketing & communication très étoffé. Nous créons nos slogans, nous écrivons les textes et les scénarios des pubs TV et radio. Pour la TV, nous engageons juste une équipe de tournage et un régisseur de plateau. On crée les pubs pour les journaux ou magazines de A à Z et nous les livrons. Nous avons une équipe dédiée pour le site internet et pour les réseaux sociaux. Un photo-­vidéographe maison occupé à temps plein s’occupe des clichés et des films pour nos supports. En ce compris les témoignages de nos clients. On fait tout nous-mêmes pour deux raisons. D’une part, parce que je pense que nous le faisons mieux. D’autre part, parce que cela nous permet, entre autres dans la communication, de rester fidèles à nos valeurs et à l’ADN de l’entreprise.”

“Il y a une autre raison, renchérit Christ Muylle, en charge de la production et du placement pour l’entreprise familiale. Cela nous confère, en termes de production technique, une agilité rare. Nous pouvons réagir très vite et sauter tout aussi vite dans le train des nouvelles tendances. Notamment en termes de matériaux ou de design.”

Cinq magasins de plus 
en Wallonie !

Depuis une petite dizaine d’années, Cuisines Dovy connaît un essor incroyable. En 2017, elle fabriquait (et donc vendait puisqu’aucune cuisine n’est de stock !) 4.000 cuisines par an. On tourne autour des 6.500-7.000 aujourd’hui. Le chiffre d’affaires suit une courbe identique : 100 millions d’euros en 2021 et 130 en 2022 (+30 % donc !). Pour 2023, même si les chiffres ne sont pas encore consolidés, le résultat va avoisiner les 120 millions d’euros. Un recul qui n’inquiète pas la famille le moins du monde.

“Alors que certains de nos concurrents étaient déjà en recul, nous avons réalisé une année 2022 vraiment exceptionnelle, confie Donald Muylle. Donc on s’attendait un peu à ce que 2023 soit moins bonne mais elle reste largement au-dessus des autres années. Il y a aussi deux explications purement conjoncturelles : avec l’inflation, l’immobilier s’est ralenti l’an dernier. Moins de maisons se sont vendues et les projets de rénovation ont fatalement suivi le mouvement. Ensuite, la législation a changé en Flandre. Depuis le 1er janvier 2023, les logements avec un PEB E ou F doivent impérativement au moins devenir D dans les cinq ans de l’achat. A l’arrivée, la cuisine n’est plus, comme avant, la première pièce que l’on rénove. La priorité est mise sur l’efficacité énergétique : isolation, chauffage, panneaux photovoltaïques, double ou triple vitrage, etc.”

L’ensemble de la production est réglé par un système digital unique imaginé et codé par le service

Cette croissance, tant industrielle que financière, est évidemment liée à l’expansion du nombre de magasins/salles d’exposition. Il y en a 40 aujourd’hui: 26 en Flandre, 13 en Wallonie et 1 en France. Dans la vaste majorité des cas (35), ­Cuisines Dovy est propriétaire de ses murs. Elle préfère aussi construire du neuf à sa façon plutôt que de rénover un espace existant. Ce nombre de magasins va encore augmenter.

“Pour la Flandre, je pense que le maillage sera complet avec deux magasins supplémentaires, confirme Mario Muylle. Nous sommes arrivés en Wallonie en 2012. A Tournai, tout près de chez nous, donc. Cela marche très bien et si nous sommes top of mind en Flandre pour le secteur des cuisines, on y arrive progressivement en Wallonie grâce, entre autres, à papa et aux pubs. La concurrence y est rude avec des marques bien implantées. Mais la Wallonie est clairement un relais de croissance essentiel et je peux vous annoncer que nous allons ouvrir cinq nouveaux magasins dans les prochains mois. Les projets sont en cours. Mais je ne vous dirai pas encore où tant que tout n’est pas ficelé au niveau administratif.”

“Je n’ai plus envie de distinguer la Flandre de la Wallonie, renchérit Donald Muylle. Je parle désormais de couverture nationale. Finalement, le client wallon n’est pas foncièrement différent du flamand. Même sur le plan du prix d’achat ou des matériaux choisis. Je dirais seulement que le Wallon est sans doute plus convivial et plus spontané que le Flamand, qui est plus direct. Logiquement, nos vendeurs le sont aussi…”

Reste le cas de la France où Dovy s’est implantée à la fin 2022. Au boulevard Carnot dans le centre de Lille. L’expérience n’est pas concluante. “C’est même une catastrophe !, assène Donald Muylle. Nous n’avons pas choisi la bonne équipe de vendeurs. En outre, le boulevard a été éventré par des travaux toute l’année. Il n’a été rouvert qu’en décembre. Bref, c’est un faux départ. Nous n’avons pas eu de chance mais nous avons beaucoup appris.”

“On continue en tout cas, renchérit Mario Muylle. Avec une autre équipe. C’est plus compliqué à Lille car nous ne sommes pas connus et une campagne de pub importante pour un seul magasin, ce n’est pas possible. Mais nous sommes persuadés que cela va marcher et allons ouvrir dans les prochains mois deux autres points de vente dans le nord de la France. Comme pour Lille, à proximité de Roulers.”

Sa promesse de qualité à prix abordable, Cuisines Dovy peut 
la tenir car l’entreprise fait tout elle-même.

Troisième génération

Donald Muylle, en plus de ses apparitions radio-TV, gère toujours les investissements, les projets de construction ou de rénovation des points de vente et de l’usine et du développement de certaines techniques. Sa succession est réglée depuis longtemps, mais celle de Christ et de Mario, tous deux quinquagénaires, est aussi en marche.

“Ma fille cadette est entrée dans l’entreprise il y a un an, explique Christ Muylle. Le fils aîné de Mario a fait de même au début de cette année. La troisième génération est donc dans l’entreprise et s’y intéresse. Cela se présente donc bien pour l’avenir.”

“Mon père m’a toujours dit qu’il fallait travailler dur, renchérit Mario. Il nous a donné la liberté de le faire. Comme mon frère, je suis passé par tous les métiers de l’entreprise avant de la codiriger. J’ai placé des cuisines chez les clients, j’ai travaillé des pièces dans l’atelier, etc. C’est essentiel pour bien appréhender la réalité d’une entreprise, pour gagner le respect des employés et, surtout, bien comprendre leur quotidien. Nos enfants vont suivre le même trajet éducatif.”

Quant au slogan de la pub, il n’y aucun doute : il est amplement ­justifié…

Formation et 
recrutement

“La région de Roulers, si je ne me trompe pas, dispose du taux de chômage le plus bas de Flandre, en dessous des 4 %, rappelle Christ Muylle. C’est compliqué du coup de recruter. Mais nous avons pris les devants. D’autant que nous avons peu de demandes de Wallons pour venir travailler chez nous alors que Mouscron et Tournai, c’est vraiment tout près. On a eu quelques Français, par contre.”

Clairement, pour répondre à ses objectifs de croissance, Cuisines Dovy met l’accent sur les formations. En face du siège social, l’entreprise dispose d’un centre de formation destiné aux placeurs pour qu’ils apprennent à utiliser les produits et se mettent en phase avec les standards, élevés, de qualité demandés par la famille. Il faut savoir que ces placeurs, situés dans toute la Belgique, partent depuis leur domicile, la cuisine ayant été livrée par camion un peu avant chez le client. Dans le bâtiment principal, une autre école s’occupe plus particulièrement des vendeurs pour qu’ils s’imprègnent de la culture et de l’esprit de l’entreprise. Mais ce n’est pas tout.

“Nous avons un accord avec une école technique de Roulers dans le cadre de la formation en alternance, confie Christ Muylle. Les étudiants viennent chez nous pour le côté pratique de leur cursus. Fatalement, certains restent chez nous une fois le diplôme en poche. Surtout les profils motivés qui ont encore envie d’évoluer.”

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