Organisé depuis 1994 par Vinopres, une entreprise familiale belge créée par Louis Havaux, le Concours Mondial de Bruxelles (CMB) décerne chaque année des milliers de médailles à des vins dans les compétitions qu’elle organise dans le monde entier. Par son sérieux et sa diversification, elle fait aujourd’hui jeu égal avec les géants britanniques du secteur.
À l’origine, le Concours Mondial de Bruxelles (CMB) a été créé pour soutenir le Mondial du Vin, un salon ouvert au grand public que Vinopres organisait dans les palais du Heysel. Vinopres, c’est une petite PME familiale créée par le Nivellois Louis Havaux. À la base, c’est une simple agence de communication et d’événements axée sur le monde du vin.
En 1994, lors de sa création, le CMB n’était qu’un petit concours de dégustation à l’aveugle avec les vins des exposants du salon. La sauce a rapidement pris et les choses ont pris de l’ampleur. Le concours est resté en Belgique jusqu’en 2005. Depuis cette date et son organisation au Portugal grâce à Amorim, le leader mondial du bouchon de liège, il n’a cessé de bouger. En fait, le CMB est belge, mais il ne se déroule plus à Bruxelles depuis des lustres. Chaque année, il embarque près de 700 dégustateurs chevronnés (acheteurs, journalistes, sommeliers et œnologues internationaux) aux quatre coins du monde pour juger une bonne dizaine de milliers de vins dans les différents concours qu’il organise.
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Epouser le fil des saisons
Le grand concours originel a été divisé en quatre pour épouser le fil des saisons et le calendrier commercial : les rosés (en Roumanie, en mars, cette année), les blancs et les rouges (à Yinchuan, en Chine, juste avant cet été), les effervescents (à Chisinau, en Moldavie, la semaine dernière) et les vins doux et fortifiés (à Catane, en Sicile, la semaine prochaine). Mais ce n’est pas tout…
“Nous organisons aussi des concours nationaux appelés Selection by CMB, explique Baudouin Havaux, le président du CMB et fils du fondateur. C’est le cas au Mexique, au Brésil et en Afrique du Sud. Ce le sera sous peu au Pérou et en Bolivie. Dans les trois pays sud-américains, ce sont les gouvernements qui nous l’ont demandé. J’ai été reçu récemment par les présidents péruvien et bolivien à cet effet. Il est tout de même incroyable que ces pays fassent appel à une petite société comme la nôtre pour organiser leur compétition nationale. C’est une immense fierté.
Être intègre et indépendant, c’est très compliqué dans un concours national. C’est notre chance. Ces cinq pays ont une excellente image de nous grâce au sérieux de notre travail, à l’indépendance et la qualité de nos juges et à la réputation des médailles que nous décernons. Nous n’en décernons qu’à 30% des vins et spiritueux présentés. C’est une loterie et c’est très bien comme ça. Nous choisir, c’est aussi s’ouvrir à la diversité. La Bolivie, par exemple, souhaite que ses vins et spiritueux soient goûtés par des journalistes et des acheteurs internationaux.”
Asseoir sa réputation
Le CMB organise aussi des concours axés sur les cépages : le sauvignon, le vranec (à la demande de la Macédoine) et le marselan (à la demande de la Chine). Tous ces petits concours ne rapportent rien à Vinopres (135.000 euros de chiffre d’affaires cette année pour le Brésil, le Mexique et l’Afrique du Sud), mais asseyent sa réputation et gonflent sa notoriété. Ils servent aussi à pousser les producteurs à participer aux grands concours. Les sessions classiques du CMB vont générer un chiffre d’affaires de 2,395 millions d’euros cette année. Il reste encore Spirits, la session mondiale réservée aux spiritueux (650.000 euros de chiffre d’affaires attendus).
“C’est devenu le plus grand concours du monde, sourit Quentin Havaux, le CEO du CMB et petit-fils du fondateur. De ces jours-ci, à Jalisco au Mexique, nos juges dégustent environ 2.800 échantillons. Toutes les catégories sont représentées et c’est un véritable exploit. Cette année, nous aurons donc reçu et dégusté 15.000 vins et spiritueux dans nos différents concours. Malgré la situation compliquée du marché du vin, nous n’avons rien perdu en 2025. Ce qui n’est pas le cas de Decanter et d’IWSC, nos deux principaux concurrents. Tous deux Britanniques et soutenus par des fonds d’investissement. Nous, les petits Belges, nous sommes désormais au-dessus d’IWSC, et nous nous rapprochons de Decanter qui annonce 17.000 échantillons.”
“Nous devrions devenir leaders dans les trois ans, renchérit Baudouin Havaux. C’est inouï quand on se rappelle que nous sommes partis de rien il y a 30 ans et que nous avons une structure de coûts qui est à cent lieues de celle de Decanter.”
“Nous devrions devenir leaders du marché des concours dans les trois ans.” – Baudouin Havaux (CMB)
Gonfler sa notoriété
Comment expliquer une telle performance ? Le CMB a beaucoup travaillé sur la crédibilité de ses dégustations. Outre le choix de juges professionnels et indépendants, il a fait appel à la Faculté des Sciences de l’UCLouvain et au professeur Christian Ritter. Ce dernier a développé un logiciel statistique qui, sur base des caractéristiques propres à chaque dégustateur qu’il étudie lors de chaque session (sévérité, répétabilité, discrimination, etc.), normalise les résultats et équilibre les différentes tables. Sans quoi, 20% des tables de dégustateurs décerneraient 80% des médailles.
Très vite, le CMB a cru au potentiel de l’IA et de l’utilisation des données. Il a ainsi investi dans Winespace, une start-up bordelaise qui a développé une expertise unique dans l’analyse des notes et commentaires de dégustation.
“Nous sommes aujourd’hui capables de fournir à chaque producteur un rapport complet sur le vin soumis, confie Quentin Havaux. Avec un commentaire qui synthétise l’avis écrit par les juges, la note, une roue des arômes, etc. Ils en sont très contents, mais nous nous sommes rendus compte que 80% n’utilisaient pas ce rapport à des fins commerciales et de communication. Notre cible, c’est le consommateur. C’est pour lui que nous travaillons. Pour qu’il choisisse dans les rayons un vin médaillé par le CMB en toute confiance. Ces données de dégustation, nous les mettons à sa disposition sous différentes formes, notamment une carte de visite qui reprend les trois arômes principaux et les trois caractéristiques principales du vin. Par exemple, au restaurant de l’hôtel Smy à Alghero, en Sardaigne, la carte des vins, exclusivement composée de vins médaillés CMB, propose ces arômes et ces caractéristiques.”
La médaille CMB devient incontournable
Ces fiches de dégustation et les médailles plaisent énormément aux distributeurs. Ainsi, de nombreuses enseignes de supermarchés dans le monde entier présentent les vins médaillés du CMB dans des présentoirs spéciaux. C’est le cas de Pam en Italie, de Continente au Portugal ou d’El Palacio de Hierro, les Galeries Lafayette mexicaines. Bien sûr, les médailles du CMB font vendre, mais elles sont, surtout, un gage de qualité.
“Le plus bel exemple vient de Cavavin, le grand caviste français qui dispose de près de 200 magasins dont trois en Belgique, à Bruxelles, Gosselies et Frameries, poursuit Quentin Havaux. Pour être crédibles, notamment sur le marché français, ils nous ont demandé de sélectionner des vins étrangers pour enrichir l’offre de leurs cavistes. Nous aurons sous peu des étagères CMB dans l’ensemble des points de vente. On voit tout de suite l’intérêt pour les producteurs de proposer leurs vins dans nos concours et de tenter de décrocher une médaille. Cette demande monte dans le monde entier chez les revendeurs classiques ou la grande distribution. Lentement, mais sûrement, la médaille CMB devient incontournable et gonfle notre notoriété. J’aimerais développer un format standard qui permette de donner de l’info dans tous les points de vente qui proposent les vins médaillés.”
Tout récemment, des Italiens ont monté une société appelée 5Hats. Elle a pour vocation de vendre dans le monde entier uniquement des vins médaillés CMB. Au bout de quelques semaines, leur catalogue s’est enrichi d’une centaine de référence et quelques gros acheteurs ont mordu à l’hameçon.
“Lentement, mais sûrement, la médaille CMB devient incontournable et gonfle notre notoriété.” – Quentin Havaux (CMB)
Des bars à vin et des corners
Comment parvient-on à faire quasi jeu égal avec Decanter ? En proposant les vins médaillés directement aux consommateurs. Ainsi, depuis cinq ans, avec un partenaire, le CMB dispose d’un bar à vins au centre de Mexico City. Il y propose des vins médaillés venus du monde entier. En collaboration avec United Airlines, il propose aussi une sélection CMB aux passagers qui ont accès au lounge de l’aéroport de Mexico City. Le succès est tel que des corners identiques sont envisagés à Heathrow et à Tokyo. Le 29 mars dernier, une Wine & Spirits Experience by CMB a ouvert à Gangnam, en plein centre de Séoul.

“À Séoul, nous avons mis en place une franchise avec un entrepreneur très dynamique, sourit Baudouin Havaux. Le bar a ouvert sur quatre étages et 2.000 m² avec uniquement des vins médaillés. Le succès est colossal. Il est tel que le même entrepreneur entend ouvrir une vingtaine de magasins et discute aussi pour placer les vins dans d’autres restaurants.”
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Dans le monde entier
Après Cotonou, au Bénin, vient aussi d’ouvrir un Wine Corner by CMB à Rapallo, une station balnéaire italienne chic. “Il se trouve au sein du Bistrot Pedol Oyster and Fish Bar, poursuit Baudouin Havaux. C’est la continuation d’un partenariat noué avec Tasty Life, le groupe spécialisé dans l’alimentaire et la food tech propriétaire de la marque Bistrot Pedol. Nous étions déjà partiellement présents à Milan avec Pedol au sein de deux mercatos. Cette nouvelle adresse qu’ils ont créée à Rapallo était un test. Le client n’a que nos vins médaillés sur la carte et, via un petit espace de vente, peut même en ramener à la maison. Comme le succès est au rendez-vous, une adresse du même style va ouvrir en plein centre de Milan cet automne.”
D’ici à la fin de l’année, des adresses similaires vont s’ouvrir en Espagne et au Portugal. Présent sur chacune des médailles arborées par des millions de bouteilles, l’hôtel de ville de Bruxelles fait désormais le tour du monde grâce à une petite entreprise familiale originaire du Brabant wallon…