Deal 2024 – En vendant BNP pour acheter Ageas et Euroclear, la SFPI fait trois deals pour le prix d’un
La SFPI, le bras financier de l’Etat, est nominée dans la catégorie « Deal of the Year » non pas pour un, mais pour trois opérations formant un plan qui a mis plus d’un an à être bouclé, entre janvier 2022 et mars 2023.
En quatorze mois, la SFPI est entrée au capital d’Ageas, a renforcé sa position dans Euroclear et a, pour financer l’opération, vendu des actions BNP Paribas. Une des particularités de ce plan est que la SFPI a acheté avant de vendre. Une autre est l’absence de fuite dans la presse pendant cette opération d’envergure. Le CEO de la SFPI, Koen Van Loo, en est encore étonné aujourd’hui. « Il y avait une trentaine de personnes au courant, et rien n’a fuité ».
Un bloc d’Ageas à vendre
Tout a commencé au début de 2022. « L’urgence, explique Koen Van Loo, était motivée par la volonté de Ping An de vendre les 6,3% qu’il détenait dans Ageas. Des banquiers (Goldman Sachs) nous ont approché avec ce dossier. Nous nous sommes dit qu’il était important d’ancrer le capital d’Ageas en Belgique ».
Mais il s’agissait de beaucoup d’argent. « Nous avons donc proposé de diminuer notre exposition dans BNP Paribas, poursuit-il. Et, de façon un peu opportuniste, nous nous sommes dit que puisque nous voulions vendre un 2,7% du capital de BNP pour 2 milliards d’euros, et puisque l’opération Ageas représentait 600 millions, il restait 1,4 milliard que nous pouvions utiliser. Pourquoi donc ne pas utiliser l’argent restant pour renforcer notre position dans Euroclear ? La présidente du conseil d’administration Laurence Bovy et moi-même nous avons approché notre conseil d’administration, et puis le kern (le conseil des ministres restreint) la même semaine. Et en parallèle, nous négocions déjà avec Ping An ».
Agence de la dette
Le gouvernement accepte très vite l’idée. Et dix jours plus tard, au tout début de février 2022, la SFPI devient actionnaire d’Ageas à hauteur de 6,3%, en déboursant 593 millions. « Mais nous n’avions pas de financement, parce que le cours de BNP Paribas n’était pas au niveau voulu, poursuit Koen Van Loo. Par ailleurs, BNP était encore détenu en direct par l’Etat et n’était pas encore dans notre bilan. L’Agence de la dette a donc bien voulu sécuriser une ligne de 2 milliards d’euros en notre faveur.»
Puisque la SFPI bénéficie de cette ligne de crédit, elle peut aussi en 2022 et 2023, renforcer sa position dans Euroclear. « Nous avons ainsi acheté, avec la Caisse des dépôts française, la participation de 9,85% que détenait Ice et nous avons acquis aussi la participation de BNP Paribas, déboursant 707 millions d’euros au total », ajoute-t-il. Le poids de la SFPI dans Euroclear passe ainsi de 3,1% à près de 13%. Et autour de la SFPI, un groupe d’actionnaires belges (Belfius, Ethias, PMV, Wallonie Entreprendre et les Assurances Fédérales) s’est également fédéré pour renforcer l’ancrage.
Un peu de stress
Mais lorsque l’année 2023 débute, le bloc de 2,7% d’actions BNP que la SFPI veut vendre n’est toujours pas cédé. « Il y avait un peu de stress », avoue Koen Van Loo. Ce n’est que dans les derniers jours de février 2023 que le cours de BNP évolue vers le seuil à partir duquel la SFPI peut vendre. Le 28 février 2023, le cours de BNP est suffisamment élevé ». On saura plus tard que ce sera le cours le plus élevé de l’année.
« Il faut parfois avoir un peu de chance, sourit le patron de la SFPI. En principe, poursuit-il, ce genre de transaction se décide en tout début d’ouverture de marché. Mais le matin, le cours n’est pas encore suffisamment élevé. Et puis à midi, j’étais en déplacement, je reçois un coup de fil : Koen, tu as vu l’évolution du cours ? Nous avions atteint le seuil de 66,15 euros que nous nous étions fixés. Nos conseils nous disent que c’est encore jouable, mais il faut décider tout de suite. J’ai donc prévenu Laurence Bovy, et nous y sommes allés. Il y a encore eu quelques heures de stress, car la transaction avait été décidée pendant la séance, mais était effectuée après la clôture de la Bourse. Le cours pouvait encore évoluer. C’était stressant aussi parce que ce type d’opération se fait avec une décote par rapport au cours, décote que l’on ne connaît pas à l’avance. Mais cette vente de BNP pour 2,035 milliards a été selon une étude de BNP Paribas la meilleure transaction de l’année, avec une décote de 1,8 % (soit un cours de 64,96 euros par action) ce qui, pour un tel montant, était très faible. Et le prix auquel nous avions vendu était au centime près le même que celui auquel l’Etat avait déjà vendu des actions BNP en 2017», ajoute Koen Van Loo.
CFO 2024
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