Odoo Expérience 2025: dans les coulisses du plus grand salon tech et business d’Europe

Le week-end dernier s’est clôturé l’événement Odoo Experience 2025 présenté par son CEO Fabien Pinckaers comme “le plus grand salon tech et business d’Europe”. Avec 40.000 visiteurs au Heysel, cette grand-messe annuelle est une formidable carte de visite et surtout un “team building” géant pour la licorne wallonne. Reportage en coulisse.

La scène est impressionnante. Dans les deux sens du terme. Sur le vaste plateau de l’auditorium 2000, au sein de Brussels Expo, le CEO fondateur d’Odoo est accueilli comme une véritable rock star. Tendu mais hilare, Fabien Pinckaers donne le coup d’envoi de sa traditionnelle Odoo Experience version 2025 devant un parterre de quelque 2.000 spectateurs dont certains ont trouvé refuge sur les marches de l’auditoire. Ce n’est que la partie émergée de l’iceberg événementiel. Car sur les trois journées dédiées à cette manifestation d’envergure, ce ne sont pas moins de 40.000 visiteurs qui auront déambulé dans les quatre palais d’exposition réservés pour cette nouvelle Experience 2025 “dont 80% sont venus de l’étranger”, précise Fabien Pinckaers, le gourou d’Odoo.

Gourou est un grand mot. Quoique. Sur la scène boostée par les immenses écrans de l’auditorium 2000, le Wallon plutôt discret fait penser à un certain Steve Jobs, ancien CEO d’Apple dont chaque keynote était disséquée à l’envi. Comme lui, Fabien Pinckaers apparaît toujours avec le même uniforme – jeans, baskets tricolores et polo pourpre brandés Odoo – dans une posture de rock star malgré lui. Ou plutôt d’un joueur de tennis de classe mondiale dont les points décisifs sont salués par une vague d’applaudissements fébriles : à chaque annonce “spectaculaire” du patron belge relative à la toute dernière version de son logiciel de gestion d’entreprise Odoo 19, les acclamations fusent et les bravos retentissent, comme dans une finale de Roland-Garros.

Et le patron de marteler, tout au long de sa keynote, “Let’s go further !” (“Allons plus loin !”), comme pour mieux repousser les limites de la compétition…

Un public acquis

Mais ici, pas d’affrontement entre deux adversaires. Le public ne vient voir qu’un seul champion et se révèle entièrement acquis à la cause de l’entreprise. “Il y a beaucoup d’énergie, témoigne Fabien Pinckaers, la nuque et le polo mouillés après deux heures de prestation scénique en anglais. C’est vrai que j’ai transpiré, mais il ne s’agit pas vraiment d’un exercice physique. C’est plutôt mental. Ce n’est d’ailleurs que mental ! La keynote, ce n’est pas difficile en soi car c’est la fin du processus. C’est tout ce qu’il y a avant qui demande des efforts. Sortir de nouvelles fonctionnalités dans le produit, préparer l’événement… Tout cela représente plusieurs mois de travail et les dernières semaines sont très dures. Et puis, évidemment, il faut que la présentation soit parfaite. Cela demande beaucoup de concentration.”

Et les applaudissements des supporters ? Ne sont-ils pas un peu surfaits ? “Ce qu’il faut comprendre, c’est que la plupart des gens présents dans la salle vivent grâce à Odoo, enchaîne le CEO. C’est leur métier, quoi ! Donc ce qui semble être, probablement pour vous, de petites fonctionnalités que l’on montre à l’écran ont, en réalité, un vrai impact pour eux. Ils se disent : ‘Ah, je vais pouvoir vendre ça au client’ ou ‘J’ai justement eu ce problème-là hier et vous avez trouvé une solution avec Odoo 19 !’ Donc, c’est vraiment leur day to day. IIs le ressentent, ils sont contents et ils s’expriment par des applaudissements.”

“Mon meilleur team building”

Portée par 400 conférences durant l’événement et autant d’exposants dans les travées des quatre palais réquisitionnés, la grand-messe annuelle d’Odoo est aujourd’hui présentée par son CEO comme “le plus grand salon tech et business d’Europe”. Un salon qui accueille collaborateurs, clients, partenaires et prospects, mais qui a surtout un coût : 3,5 millions de budget.

Et qui n’est a priori pas rentable : “Il y a des tickets VIP, des jours de formation pour la nouvelle version du logiciel et la plupart des stands qui sont payants, détaille Fabien Pinckaers, mais comme la grande majorité des entrées sont gratuites, on va sans doute perdre au final un demi-million d’euros sur l’événement. Mais le but n’est pas de faire du bénéfice car les retombées indirectes de l’Odoo Experience sont gigantesques et ça, on ne les compte pas dans nos revenus. Ici, nous formons tous nos partenaires avec la nouvelle version, et ils vont la vendre chez les clients et, pour nous, ça facilite le travail.

Donc, c’est un bon investissement, l’impact est clairement positif, mais ce qui compte vraiment pour moi et ce qui a le plus d’impact, c’est que cet événement est mon meilleur team building. Toute l’année, chacun est dans son département et là, d’un coup, on mélange tout le monde, on se retrousse les manches, on pèle les patates ensemble, on s’entraide, on fait le service, on se dépasse, on se saoule avec les clients (rires) et ça, pour moi, ça vaut de l’or parce que ça fait un super team building ! Cet événement est un des piliers fondateurs de notre culture d’entreprise.”

Objectif 10.000 employés

Outre sa dimension fédératrice, cette Odoo Experience permet aussi à l’entreprise wallonne de mettre un coup de projecteur sur ses activités et d’attirer de nouveaux talents. Aujourd’hui, Odoo compte près 7.000 collaborateurs à travers le monde dont environ 1.500 personnes en Belgique et devrait franchir le cap des 10.000 employés en 2027. D’où l’importance du recrutement dans ce genre d’événement.

Avec un réseau de 10.000 partenaires dans le monde (qui génère 250.000 emplois indirects) et une communauté de 15 millions d’utilisateurs, la société se porte bien et ne cesse d’élargir sa toile. Aujourd’hui, Odoo possède une petite vingtaine de bureaux à l’international (Inde, États-Unis, Australie, Mexique, Kenya, etc.) et table sur un chiffre d’affaires de 650 millions d’euros en 2025 qu’elle devrait porter à un milliard dans les deux ans qui viennent. Avec quelle marge bénéficiaire ?

“J’espère proche de zéro, sourit Fabien Pinckaers. Si je fais trop de bénéfices, cela veut dire que je n’ai pas assez réinvesti dans l’entreprise. Mon but, c’est de dépenser tout ce qui rentre et non pas de laisser de l’argent dormir sur un compte en banque. Sinon, on perd du temps. Or, mon objectif, c’est de grandir. Et pour grandir, il faut investir vite !”

Une valorisation bondissante

Spectaculaire, la croissance d’Odoo (44% en moyenne par an) se répercute d’ailleurs dans la valorisation de l’entreprise qui a encore bondi de deux milliards en l’espace d’un an.

“Nous sommes passés de cinq milliards l’année dernière à sept milliards aujourd’hui, enchaîne le CEO. Il ne s’agit pas d’une levée de fonds. Ce sont simplement des échanges de parts entre différents actionnaires. Donc, cela ne change rien pour Odoo. De toute façon, la valeur n’est pas la motivation première. Ce qui importe, c’est le business et nos clients. Tous les entrepreneurs raisonnent de cette façon. D’ailleurs, je ne connais même pas le détail des transactions (sourire)… Je sais que j’ai toujours 56% des parts, mais encore une fois, la valeur n’est pas un objectif en soi. L’important, c’est ce que nous faisons, c’est la présentation d’Odoo 19 et le ressenti de nos partenaires.”

Une marque en puissance

Pour renforcer encore son poids à l’international, Fabien Pinckaers mise donc sur la qualité de son produit, la force de la marque et ses grands événements. Le pluriel est important car une autre Odoo Experience a été organisée le mois dernier en Inde, un pays où a vécu le CEO belge durant plusieurs mois, à la charnière des années 2023-2024, pour développer sa filiale locale qui compte aujourd’hui 1.300 employés. Là-bas, c’est une salle de 7.000 personnes et quelque 100.000 visiteurs qui sont respectivement venus boire les paroles du gourou d’Odoo et découvrir ce salon de la tech durant deux jours à Gandhinagar.

Le point commun entre les salons bruxellois et indien ? Les conférences, les formations, le networking, bien évidemment, mais aussi cet Odoo Shop qui glorifie encore un peu plus la marque dans cet événement de prestige. Gourde (10 euros), t-shirt (15 euros), sac à dos (35 euros), polo (20 euros), casquette (15 euros), baskets (65 euros), chaussettes (7 euros)…

Tous ces vêtements et accessoires, vendus avec le logo Odoo bien mis en évidence et réunis dans un espace dédié, renforcent davantage l’appartenance à une vraie communauté.

Des livres sélectionnés avec soin

Cerise sur le gâteau du vrai-faux gourou : tout un mur de cette boutique éphémère porte l’inscription bien visible Fabien’s book selection (La sélection livres de Fabien) avec des ouvrages non pas signés par le CEO d’Odoo, mais bien sélectionnés par ses soins pour leur force d’inspiration. Soit une quinzaine de livres, majoritairement en anglais, qui vont de Zero to One (De Zéro à Un) de Peter Thiel à The Art of War (L’Art de la Guerre) de Sun Tzu, en passant par The Hidden Life of Threes (La Vie Secrète des Arbres) de Peter Wohlleben.

“Je trouve que les gens ne lisent pas assez, conclut Fabien Pinckaers qui avoue ne pas avoir de télévision à la maison. Il y a des livres de gestion qui sont extrêmement intéressants et j’essaie de pousser les gens à lire un peu plus, parce qu’ils n’en ont tout simplement pas l’habitude. Ce ne sont pas mes livres, mais une sélection de quelques titres, et je profite de l’événement pour les mettre en lumière.”

De quoi garder le lien jusqu’à la prochaine keynote bruxelloise qui, en 2026, pourrait bien se tenir à l’ING Arena, vu le succès croissant de l’événement.