Coronavirus: jusqu’où faut-il soutenir les compagnies aériennes?

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Brussels Airlines, TUI Fly et Air Belgium négocient l’aide des pouvoirs publics pour traverser la crise. Des critiques s’élèvent, mais les pouvoirs publics vont-ils prendre le risque de ne plus avoir de compagnie basée en Belgique ?

Le point commun entre Brussels Airlines, TUI Fly et Air Belgium ? Ces compagnies immatriculées en Belgique négocient avec le gouvernement un soutien financier pour traverser la crise, qui a mis à l’arrêt les vols pour un mois ou davantage.

Ce type de demande s’est multiplié en Europe et aux Etats-Unis. La Grande-Bretagne envisage d’entrer dans le capital de transporteurs (British Airways, Virgin Atlantic, etc.).

A l’heure où nous bouclons ces lignes, aucune décision n’a été prise en Belgique, hormis des garanties pour des prêts bancaires pour toutes les entreprises. Des aides plus importantes ne font pas l’unanimité. Etienne de Callataÿ, économiste et professeur de finances publiques à l’UNamur, a critiqué l’idée dans les colonnes de L’Echo. Il est réticent à l’idée que l’Etat aide des compagnies privées, indistinctement, surtout si leur situation n’était pas très bonne avant la crise. Si TUI Fly est généralement rentable, Brussels Airlines, filiale du groupe Lufthansa, a annoncé des pertes opérationnelles de 25,9 millions d’euros pour 2019, alors qu’Air Belgium est une nouvelle compagnie.

” Il y a une dimension éthique, nous explique Etienne de Callataÿ. Les profits versés aux actionnaires sont justifiés par les risques qu’ils prennent, pourquoi la collectivité devrait-elle éponger les pertes ? ” Il ajoute une dimension environnementale. ” Est-ce à la collectivité de soutenir une activité polluante ? ” En concluant : ” En Belgique, nous avons vécu le traumatisme de la fin de la Sabena, mais c’est absurde : rien n’oblige à avoir une compagnie belge, il y aura toujours des transporteurs en Belgique “.

Laisser le marché à Ryanair ?

Le raisonnement est abrupt. Cette logique pourrait conduire à ce que Ryanair devienne le transporteur dominant en Belgique. Déjà très présent, il dispose de 4 milliards d’euros de cash. Etienne de Callataÿ reconnaît que la perspective est embarrassante, “notamment si les pratiques sociales sont irrespectueuses”. L’économiste fait allusion aux relations assez rudes de Ryanair avec son personnel. D’autres compagnies, mieux soutenues par leurs Etats, pourraient aussi capter le marché belge, comme Air France KLM, profitant de la latitude que va maintenant laisser la Commission européenne en matière d’aides publiques.

Dieter Vranckx, CEO de Brussels Airlines, met pourtant en avant l’importance nationale de sa compagnie, qui opère une flotte de 50 avions. ” Nous jouons un rôle économique crucial, avec plus de 4.000 salariés, et les emplois chez nos fournisseurs. Il est important de disposer d’un système de transport aérien stable. ” Revenant sur la santé de la compagnie aérienne, le CEO précise que des mesures d’économie – baptisée plan Reboot – avaient été prises et mises en oeuvre avant la crise pour améliorer la rentabilité, et que la discipline financière du groupe est saine. ” Nous sommes membre du groupe Lufthansa, l’un des mieux financés en Europe dans l’aérien “, ajoute-t-il.

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