Conditions environnementales pour sauver Brussels Airlines?

© belgaimage
Robert Van Apeldoorn
Robert Van Apeldoorn Journaliste Trends-Tendances

Les mouvements environnementalistes, Ecolo, souhaitent que les aides publiques aux compagnies aériennes soient subordonnées à des réductions des émissions de CO2. Le gouvernement belge est plutôt d’accord. Mais les possibilités sont limitées.

Pas d’argent public sans réduction d’émission de CO2 ? C’est le principe défendu par des mouvements environnementaux comme Greenpeace, et, en Belgique, par le parti Ecolo. Ce dernier participe au soutien de l’actuel gouvernement Wilmès.

“Il faudrait un trajet clair sur les réduction d’émission de CO2” estime le député fédéral Ecolo Gilles Vanden Burre. “Pour obtenir par exemple une baisse de 3% à 5% par an, par siège, pour respecter les accords de Paris. Puis il faudrait faire quelque chose pour des situations comme le trajet Bruxelles Marseille, souvent plus cher en train qu’en avion. On doit plutôt favoriser le train sur ces distances.”

Pas de veto d’Ecolo, mais….

Le gouvernement semble d’accord avec le principe d’une contrainte environnementale. Il “faudrait qu’on tienne compte d’aspects tels que l’emploi, l’environnement et d’autres objectifs sociétaux” a indiqué Alexander De Croo, vice premier ministre, en charge des négociations avec Lufthansa et Brussels Airlines, en commission à la Chambre. Il a répété régulièrement le principe de conditions environnementales, sans en préciser la teneur.

Ecolo aura son mot à dire sur l’aide qui pourrait être accordée, qui devrait passer par le kern cabinet. “Nous n’avons pas un droit de veto, mais une influence” indique Gilles Vanden Burre.

L’état français a subordonné ses aides à Air France à la suppression d’un grand nombre de vols intérieurs, avec l’objectif de réduire de 50% l’émission de CO2 par siège entre 2005 et 2030, plus l’utilisation de carburants alternatifs durables pour 2% de la consommation d’ici 2025.

Brussels Airlines réticent, mais volontaire

Le CEO de Brussels Airlines a indiqué, lors de la conférence de presse du 12 mai annonçant la restructuration de la compagnie, qu’il n’avait pas besoin de contrainte pour voler plus propre. “Nous allons sortir les avions les plus anciens, qui émettent le plus” promet-il, car la compagnie va réduire sa flotte d’un tiers, notamment en sortant 2 longs courriers A330 et 9 avions moyens courriers A320. Elle indique que ses émissions par siège devraient reculer de 4% à 10% d’ici 2026.

Le gain possible ? 15% à 25%, pas plus

Toutefois, réduire les émissions de CO2 par siège de manière drastique reste quasi impossible, à court et moyen terme. S’il est aujourd’hui possible de rouler en voiture 100% électrique, en zéro émission, il n’en est rien pour les avions. Le poids des batteries rend cette option inimaginable, sauf miracle technologique. La seule possibilité est de produire des avions plus efficaces. La nouvelle génération de moyen-courrier Airbus 320 Neo consomme 15% de carburant en moins, grâce à une motorisation améliorée. Si l’avion est totalement nouveau, allégé grâce à un usage abondant de fibre de carbone, ce gain monte à 25%, comme y parviennent les longs courriers Boeing 787 et Airbus A350.

Brussels Airlines a de la marge car sa flotte est plutôt ancienne. Les avions affichent en moyenne 14 à 15 ans d’âge. Il y aurait moyen de faire des gains d’au moins 15% en les remplaçant par du matériel de nouvelle génération.

Le paradoxe de l’efficacité

Certains estiment que ce genre de progrès est à double tranchant. “Lorsque vous volez avec des avions plus efficaces, vous pouvez vendre des tickets moins chers, alors les gens voyagent davantage, c’est un peu le phénomène Ryanair, et les émissions continuent à augmenter” relève Andrew Murphy, manager du secteur aérien à l’ONG Transport&Environnement. Cette dernière a mis en place un “Airline bailout tracker”, une base de données des aides aux compagnies aériennes, en collaboration avec Greenpeace et Carbon Market Watch. Il estime qu’il faut limiter les aides aux compagnies, “sinon toute la flotte restera en opération.”

Les conditions environnementales imposées à Air France par l’état français lui paraissent insuffisantes. “Elles vont dans le bon sens, mais il n’y a pas de véritables contraintes.”

Les carburants alternatifs

Andrew Murphy, comme d’autres, prône la taxation du kérosène, qui bénéficie toujours d’une exemption pour les trajets internationaux. Il mise aussi sur les carburants alternatifs, les fuels synthétiques. “Il faudrait des engagements à investir davantage pour développer des carburants durables”, qui émettent moins de CO2, “même s’ils sont plus chers.”

Il note avec satisfaction que Margrethe Vestager, la commissaire européenne à la concurrence, a indiqué que les aides devaient être subordonnées au soutien du pacte vert pour l’Europe, pour la réduction des gaz à effet de serre.

Avec ou sans contraintes environnementales, les émissions de CO2 des transporteurs aériens devraient reculer. Les compagnies tendent à réduire leur flotte pour les deux années à venir. Les modèles les plus émetteurs en CO2, donc les plus consommateurs, comme les Boeing 747, ou d’anciens avions, sont mis à la retraite. Ce qui, mécaniquement, va accélérer la réduction des émissions de CO2 par siège. Dans une certaine mesure.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content