Après les biotech, Charleroi mise sur les cleantech

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Christophe De Caevel
Christophe De Caevel Journaliste Trends-Tendances

L’aménagement d’un District Cleantech sur l’ancien site de Carsid bénéficie de 100 millions d’euros de subsides européens.

Créer l’industrie de demain sur les ruines de celle d’hier, tel est le credo du projet de District Cleantech, imaginé sur une quarantaine d’hectares de l’ancien site de Carsid à Charleroi. Il sera centré sur trois domaines (la transition énergétique, la construction durable et la circularité), pour lesquels on retrouvera des entreprises de toutes tailles, des start-ups en incubation, des centres de recherche et de la formation. « L’ambition est de monter tout un écosystème, confie Marc Van Den Neste, directeur de ce District Cleantech. 56 entreprises nous ont déjà rejoints dans cette ambition, y compris de très grandes comme Carmeuse ou AGC. »

Le gouvernement wallon vient de valider un financement de 100 millions d’euros pour ce district. Les moyens proviennent du Fonds européen pour une transition juste, qui aide les territoires les plus impactés par la fin programmée des énergies fossiles. En Belgique, les arrondissements de Charleroi, Mons et Tournai ont été retenus.

60% de ce montant servira à la rénovation de deux bâtiments emblématiques du site. Les anciens vestiaires des ouvriers de Carsid accueilleront des espaces de coworking, des salles de conférence, et des bureaux, ils deviendront ainsi le lieu de connexions et d’interactions entre les différentes activités du district. Les vestiaires sont présentés comme « le cerveau de l’écosystème Cleantech », ils devraient être réhabilités d’ici 2026. A côté, l’ancienne centrale électrique sera, elle, dévolue à des activités productives, avec des équipements permettant à des start-ups ou des petites PME de tester leurs process avant de passer au stade industriel. Le chantier devrait être mené d’ici 2029.

Rénovation durable, hydrogène vert…

La « Centrale » abritera notamment le Renolab, porté par Buildwise et Sirris pour développer la rénovation durable et circulaire en Wallonie. « L’idée est de développer la pré-fabrication de parois et toitures isolantes, explique Marc Van Den Neste. Celles-ci pourront ensuite être appliquées à grande échelle sur chantier. En quelques jours, on peut ainsi isoler complètement tous les bâtiments d’une seule rue et même y installer des panneaux photovoltaïques. En massifiant la production, on réduit les coûts et on accélère la rénovation énergétique. » C’est d’autant plus utile que le secteur de la construction est composé essentiellement de très petites entreprises, qui n’auraient pas les moyens de passer, seules, à une phase plus industrielle.

Dans le même esprit, le District Cleantech prévoit le prototypage de projets de production et de stockage d’hydrogène vert, avec la collaboration du von Karman Institute for Fluid Dynamics (VKI). Ce centre de test travaillera en concertation avec celui envisagé au port d’Anvers, qui planchera surtout sur l’importation et la distribution de l’hydrogène, ainsi que son application dans l’environnement offshore. A Charleroi, on privilégiera les applications en lien avec le tissu wallon, notamment l’industrie lourde (le site voisin d’Industeel produit des aciers spécifiques pour la filière hydrogène), la production d’hydrogène, les matériaux ou l’aérospatial.

Évoluer en synergie

La complémentarité, le District Cleantech la recherche aussi avec les structures wallonnes, à commencer par le Biopark voisin, dont le succès a inspiré l’initiative. « Il y a 25 ans, c’était un champ, comme nous avons aujourd’hui un terrain pollué, pointe Marc Van Den Neste. J’espère que dans quinze ans, nous aurons la même efficacité. Nous essayons de reprendre les éléments qui ont permis le succès du Biopark, tout en retenant aussi ce qui aurait pu être mieux fait. » Il n’y a sans doute pas de recette du succès mais certainement une série d’éléments à prendre en considération. Le directeur du Biopark, Dominique Demonté, en pointe au moins trois. «A la différence des pôles de compétitivité, les hubs ont une réalité géographique, une implantation locale, dit-il. Il est essentiel d’y aménagement des infrastructures de recherche – ce que le District Cleantech fait- pour soutenir l’activité. Au Biopark, nous le faisons à travers le centre d’imagerie CMMI, utilisé par de nombreuses entreprises, y compris des grandes, ainsi que des académiques. Il faut aussi animer l’écosystème, mettre en place une dynamique qui fait que les gens se croisent. Enfin, il faut trouver une bonne articulation entre le fonctionnement local et régional. L’aspect local, géographique, est important pour un hub mais les structures doivent évoluer en synergie avec les initiatives régionales. »

Ce dernier point est fondamental pour éviter l’écueil d’une compétition stérile entre les sous-régions et les différents hubs, ce que l’on a un peu trop souvent vécu en Wallonie. Marc Van Den Neste y répond en organisant dès le départ une gouvernance wallonne dans le domaine des cleantech. L’idée est que, quelle que soit sa localisation, une PME puisse tester ses innovations grâce au district et qu’elle les développe ensuite à l’échelle industrielle. «Le but, c’est que nous travaillions tous sur des projets différents et que nous accélérions, ensemble, le développement des techniques dans les entreprises wallonnes », conclut Marc Van Den Neste.

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