Il ne suffit pas de se réinventer, encore faut-il que le sens l’emporte sur le recyclage. Depuis sa première apparition discographique en 1981 dans le groupe Grauzone avec son frère Martin, Stephan Eicher a bourlingué à travers les genres, tout en ne donnant jamais l’impression de trahir son ADN intime. Alors qu’il pratique la pop synthétique en solo au milieu des années 1980 – époque où on le découvre à Bourges – le beau Suisse va gagner d’impressionnants galons commerciaux dans un répertoire davantage orienté chanson. Avec l’écrivain Philippe Djian, il forme une paire qui décroche la lune, celle des tubes et d’un très grand succès public. Un bon quart de siècle après Déjeuner en paix, Eicher continue à expérimenter : après une tournée remarquée avec des automates ( ! ), de sérieux problèmes de dos et un conflit avec son label, il pose un nouveau jalon en reprenant son répertoire et une paire de nouveaux titres avec Traktorkestar. Cette fanfare bernoise délurée, composée de trois percussionnistes et neuf cuivres, propose en compagnie du quasi- sexagénaire (il est né en 1960) une formidable relecture fruitée et dansante de Combien de temps ou Pas d’ami (comme toi). Avec quelque chose de tzigane dans l’air, rappel plus ou moins conscient des origines yéniches d’Eicher, groupe semi-nomade dont il a de toute évidence hérité les désirs de voyage sans fin.
En concert le 3 juin à l’Ancienne Belgique, www.abconcerts.be