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Gary Becker est mort

Gary Becker est décédé, il y a quelques jours… Sa mort est passé inaperçue auprès du grand public alors que cet économiste de l’école de Chicago avait reçu le prix Nobel d’économie en 1992.

Ce départ en toute discrétion de ce bas monde est un peu dommage, car qu’on soit d’accord ou pas avec Gary Becker, c’est sans doute l’un des économistes les plus originaux de ces dernières décennies. Il a décroché son prix Nobel car il a étendu le calcul économique à tous les aspects de la vie quotidienne, que ce soit le mariage, le racisme, le crime ou l’école. Tout était économie selon lui, même le mariage, car pour cet économiste américain, chacun cherche à “maximiser son utilité” dans son couple comme dans le reste de l’existence. “Et le mariage, je le cite, est un marché comme les autres, avec une offre et une demande, et une concurrence parfois féroce”.

En réalité, si je parle de Gary Becker aujourd’hui, c’est pour rappeler que son enseignement a marqué des générations d’économistes, et qu’aujourd’hui, la science économique s’intéresse à tout, y compris… à la mort (1). Prenez le cas du Fonds de compensation des victimes du 11 septembre. La question s’est posée aux Etats-Unis d’indemniser les blessés et les familles des personnes décédées dans les attaques terroristes du World Trade Center et du Pentagone en 2001. Mais comment évaluer le prix d’un mort ? L’expert en charge de l’indemnisation a résolu la question en évaluant les sommes qu’aurait reçues le défunt s’il avait continué à vivre et on tenait compte aussi de son âge, de son état civil et du nombre de personnes à charge.

Le hic, c’est que cette méthode de calcul purement économique a entrainé d’énormes variations entre les montants octroyés selon la “qualité” des morts. En effet, les salaires des morts qui travaillaient pour la société Cantor Fitzerald au 105e étage de la Tour avaient des salaires nettement supérieurs au clandestin péruvien qui, lui, travaillait au restaurant Windows of the World, cinq étages plus haut !

En conclusion, la valeur des morts était à l’image de l’inégalité qu’ils avaient connue de leur vivant ? Les banquiers valent plus que les concierges et les jeunes valent plus que le vieux. Les hommes de la trentaine valaient environ 2,8 millions de dollars, alors que ceux de plus de 70 ans en valaient moins de 600.000… Quant aux femmes salariées qui ont été tuées le 11 septembre, elles gagnaient moins que les hommes, bref, l’indemnité reçue pour leur famille était aussi plus faible !

Bien entendu, ces différences entre les morts sont choquantes sur le plan moral. C’est la raison pour laquelle, l’expert qui a calculé ces indemnités a avoué plus tard, que si c’était à refaire, le Congrès américain devrait verser la même indemnité pour toutes les victimes : “La famille du financier et celle du plongeur devraient recevoir le même montant” a-t-il même écrit. Mais c’était trop tard. Gary Becker est mort Gary Becker est décédé, il y a quelques jours… Sa mort est passé inaperçue auprès du grand public alors que cet économiste de l’école de Chicago avait reçu le prix Nobel d’économie en 1992. Ce départ en toute discrétion de ce bas monde est un peu dommage, car qu’on soit d’accord ou pas avec Gary Becker, c’est sans doute l’un des économistes les plus originaux de ces dernières décennies. Il a décroché son prix Nobel car il a étendu le calcul économique à tous les aspects de la vie quotidienne, que ce soit le mariage, le racisme, le crime ou l’école. Tout était économie selon lui, même le mariage, car pour cet économiste américain, chacun cherche à “maximiser son utilité” dans son couple comme dans le reste de l’existence. “Et le mariage, je le cite, est un marché comme les autres, avec une offre et une demande, et une concurrence parfois féroce”.

En réalité, si je parle de Gary Becker aujourd’hui, c’est pour rappeler que son enseignement a marqué des générations d’économistes, et qu’aujourd’hui, la science économique s’intéresse à tout, y compris… à la mort (1). Prenez le cas du Fonds de compensation des victimes du 11 septembre. La question s’est posée aux Etats-Unis d’indemniser les blessés et les familles des personnes décédées dans les attaques terroristes du World Trade Center et du Pentagone en 2001. Mais comment évaluer le prix d’un mort ? L’expert en charge de l’indemnisation a résolu la question en évaluant les sommes qu’aurait reçues le défunt s’il avait continué à vivre et on tenait compte aussi de son âge, de son état civil et du nombre de personnes à charge.

Le hic, c’est que cette méthode de calcul purement économique a entrainé d’énormes variations entre les montants octroyés selon la “qualité” des morts. En effet, les salaires des morts qui travaillaient pour la société Cantor Fitzerald au 105e étage de la Tour avaient des salaires nettement supérieurs au clandestin péruvien qui, lui, travaillait au restaurant Windows of the World, cinq étages plus haut !

En conclusion, la valeur des morts était à l’image de l’inégalité qu’ils avaient connue de leur vivant ? Les banquiers valent plus que les concierges et les jeunes valent plus que le vieux. Les hommes de la trentaine valaient environ 2,8 millions de dollars, alors que ceux de plus de 70 ans en valaient moins de 600.000… Quant aux femmes salariées qui ont été tuées le 11 septembre, elles gagnaient moins que les hommes, bref, l’indemnité reçue pour leur famille était aussi plus faible !

Bien entendu, ces différences entre les morts sont choquantes sur le plan moral. C’est la raison pour laquelle, l’expert qui a calculé ces indemnités a avoué plus tard, que si c’était à refaire, le Congrès américain devrait verser la même indemnité pour toutes les victimes : “La famille du financier et celle du plongeur devraient recevoir le même montant” a-t-il même écrit. Mais c’était trop tard. L’économie avait démontré que le prix des morts variait en fonction de ce qu’ils valaient lorsqu’ils étaient…. vivants !

(1) Eduardo Porter, The Price of Everything.

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