Que fait Instagram avec vos photos ?

© instagr.am

Après avoir évoqué une possible utilisation commerciale du contenu publié par ses utilisateurs, Instagram, le réseau de partage de photos sur téléphone mobile, propriété de Facebook, opère une courbe rentrante.

Instagram a modifié ses conditions générales d’utilisation, provoquant un tollé sur Internet. Les nouvelles règles semblaient ouvrir la porte à une utilisation commerciale des photos postées sur Instagram par les 100 millions de membres de cette application très populaire. Instagram fonctionne sur le principe de Twitter, et permet de modifier des photos prises sur mobile grâce à des filtres colorés, avant de les partager avec ses ” abonnés “.

Suivant les nouvelles conditions générales, insérées en catimini sur le site de l’entreprise américaine, l’utilisateur accepte qu'” une entreprise ou toute autre entité ” puisse rémunérer Instagram pour publier le nom, le profil ou des photos ” en lien avec des contenus payants ou sponsorisés, sans que cela ne donne droit à une compensation [en faveur de l’utilisateur].” En clair : l’utilisateur autorise Instagram à vendre ses photos à des annonceurs, sans pouvoir prétendre à une quelconque indemnisation.

A l’heure d’écrire ces lignes, la disposition litigieuse n’a pas encore été retirée (voir Rights, point 2. http://instagram.com/about/legal/terms/updated). Mais le co-fondateur d’Instagram, Kevin Systrom, a pris sa plus belle plume pour tenter de rassurer les membres de son réseau, dans un post sur son blog, intitulé ” Thank you and we’re listening ” (Merci, nous vous écoutons). http://blog.instagram.com/post/38252135408/thank-you-and-were-listening ” Il n’est pas dans notre intention de vendre vos photos”, écrit Kevin Systrom, plaidant le malentendu de manière peu convaincante.

Et la vie privée ?

Les conditions d’utilisation seront donc reformulées. Ce serait effectivement plus sage. Selon l’avocat Raphaël Bailly, associé chez De Wolf & Partners, et spécialiste en matière de nouvelles technologies et de propriété intellectuelle, un problème pourrait en effet se poser au niveau de la protection de la vie privée. ” L’utilisation de photos est soumise à un consentement libre, spécifique et informé, rappelle l’avocat. Dans le cas présent, le consentement ne semble pas suffisamment informé dans le chef de la personne qui publie la photo. En acceptant les nouvelles conditions générales, l’utilisateur ne possède en effet aucune indication, tant sur l’identité des sociétés qui pourraient utiliser ses photos à des fins commerciales, que sur le contexte dans lequel elles pourraient être publiées. ” Un consentement par écrit devrait normalement s’imposer pour toute utilisation d’une image publiée sur Instagram. ” Si l’on fait une lecture stricte de la loi, Instagram devrait faire une demande pour chaque photo, et pour chaque traitement de cette photo, poursuit Raphaël Bailly. Dans ma pratique, lorsque l’on rédige un contrat pour le droit à l’image, il faut être très précis : taille de la photo, support de diffusion, média concerné, etc. ”

Instagram devra donc trouver une autre solution pour rentabiliser son service. Rachetée par Facebook pour la somme énorme d’un milliard de dollars, l’application peine à trouver la formule magique pour monétiser son audience mobile. Elle exclut pour l’instant les bannières publicitaires, jugées perturbatrices pour l’utilisateur. Elle explore par contre la possibilité de rentabiliser au mieux les comptes commerciaux détenus par de grandes marques. Au risque de se brûler les ailes en prenant des initiatives très limites au regard de la protection de la vie privée de ses utilisateurs.

Gilles Quoistiaux

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