Disons-le clairement, le salaire de 2,6 millions de belges dépendra moins du gouvernement belge que de celui de Berlin !
Depuis plus d’une semaine, patrons et syndicalistes négocient l’évolution du salaire de 2,6 millions de belges qui travaillent dans le privé. Quand je dis qu’on “négocie” l’évolution, c’est plutôt de la marge de progression des salaires qu’on parle. Disons-le clairement, le salaire de 2,6 millions de belges dépendra moins du gouvernement belge que de celui de Berlin !
Depuis 1996, en effet, patrons et syndicats se réunissent tous les deux ans pour négocier la fameuse “norme salariale”, la marge de progression des rémunérations. En ce moment, on discute de la marge salariale pour les années 2011 et 2012. Pour négocier cette marge, on compare la situation belge avec celle de ses trois voisins, qui sont aussi ses trois principaux partenaires économiques. C’est-à-dire les Pays-Bas, la France et surtout l’Allemagne. Je dis “surtout” l’Allemagne, car, dans la comparaison, elle pèse pour environ 50 % dans la moyenne de ces trois pays.
Or, et c’est le gros problème, si la compétitivité des entreprises belges est correcte par rapport à la France et aux Pays-Bas – nos salaires ont augmenté moins vite chez nous que dans ces pays – ce n’est hélas pas le cas vis-à-vis de l’Allemagne. Nous avons même un écart salarial de presque 14 % en notre défaveur.
Attention, cependant : nos salaires n’ont pas explosé ! Cela s’explique par le fait que les salaires allemands ont été très fortement corsetés, avec la bénédiction des syndicats allemands qui, pour soutenir les exportations de leurs entreprises, ont accepté de sauvegarder les emplois locaux contre une forte modération des salaires allemands.
Voilà pourquoi la négociation salariale en Belgique, qui doit se terminer avant Noël et dont le but est de déterminer la marge de manoeuvre pour une augmentation salariale, est paradoxalement déterminée non pas à Bruxelles mais à Berlin. Voici une autre triste loi de l’économie. Lorsque votre principal voisin, qui est aussi votre principal client et fournisseur, se serre la ceinture, vous n’avez d’autre choix que de serrer la vôtre également d’un cran ou deux.