Trends Tendances

“Pourquoi la BNB cache-t-elle son enquête sur l’index ?”

Pourquoi l’indexation automatique des salaires brille-t-elle par son absence dans le rapport annuel de la Banque nationale ? Selon les informations du rédacteur en chef des magazines Knack et Trends, l’enquête de la BNB est pourtant bouclée et entre les mains du Premier ministre…

Le rapport annuel de la Banque nationale de Belgique est une lecture obligatoire pour quiconque désire une analyse très approfondie et détaillée de l’économie du monde, de l’Europe et de la Belgique. Les fortes doses de prudence que toute banque centrale se doit d’exprimer dans ses déclarations régulièrement exigent de savoir lire entre les lignes.

Parfois, le flou s’avère des plus ennuyeux, mais il est amusant de trouver le vrai sens de phrases pleines de circonvolutions. Rendez l’analyse et surtout les conclusions un peu plus acérées, et le commissaire européen Olli Rehn pourra s’épargner le coût d’une étude en profondeur sur les problèmes de l’économie belge.

Le wishful thinking de la BNB

La Banque nationale met la moindre croissance mondiale en relief et donne une interprétation informative de la crise prolongée dans la zone euro. L’analyse consacrée à la santé du système bancaire reste un peu superficielle. La BNB du gouverneur Luc Coene se montre très optimiste quant aux changements récemment imprimés par les politiciens dans la gouvernance de la zone euro.

En tant que membre de la Banque centrale européenne, la BNB est directement impliquée dans les événements qui agitent la zone euro et ses environs. Il est de son devoir de tenter de rétablir la confiance (ébranlée) dans la zone euro, mais le tout est de savoir si ce but est atteint avec une analyse du contexte changeant de l’union monétaire qui a tout du wishful thinking. Bien sûr, nous n’entendons, de la part de la BNB, qu’éloges pour la politique de la BCE, même si cette politique fait tiquer de plus en plus lieu d’observateurs avisés.

Compétitivité : une loi à refaire… ou à supprimer

Pour ce qui concerne l’économie belge, la BNB prévoit cette année un recul (minime) de l’économie belge, à – 0,1 %. Un mauvais premier semestre suivi d’une lente reprise au second : ainsi pourrait-on résumer les prévisions de la BNB. Le lecteur très attentif remarquera que la BNB tient sérieusement compte d’un recul économique qui s’avérera plus important. Outre un plaidoyer passionné en faveur des améliorations durables dans les finances publiques, la BNB met en évidence, dans son rapport annuel, la nécessité d’une intervention majeure en matière de marché du travail et de compétitivité de notre économie.

La BNB attache, à juste titre, beaucoup d’importance à ce souci de compétitivité : au sein de la zone euro, comme chacun le sait maintenant, il est extrêmement difficile de corriger un faux pas en matière de compétitivité. Pour ce qui touche à notre compétitivité internationale, la BNB livre des chiffres très pertinents, en particulier sur les coûts salariaux par unité produite (voir graphique ci-dessous).

La BNB a pris 1996 comme année de référence, année durant laquelle la loi “relative à la promotion de l’emploi et à la sauvegarde préventive de la compétitivité de soutien de la compétitivité”, est entrée en vigueur. Cette loi devait empêcher nos coûts salariaux de dérailler au regard de la moyenne pondérée des trois pays voisins. En 2011, dans le secteur privé belge, les coûts salariaux par unité étaient différaient de 12 % de la moyenne des trois pays voisins – en outre, tout indique la présence d’un handicap en 1996 déjà.

Cette moyenne de 12 % cache cependant une réalité très contrastée. Nos coûts salariaux sont ainsi environ 25 % plus élevés que ceux en vigueur en Allemagne. Face à la France, notre position est restée inchangée, et nous avons même gagné en compétitivité contre les Pays-Bas.

Il est cependant clair que la loi sur la compétitivité n’a plus aucun sens et qu’il faut, de toute urgence, lui donner un sérieux coup de rabot… ou la supprimer purement et simplement.

Quid de l’étude de la BNB sur l’indexation des salaires ?

Ce qui est particulièrement frappant dans l’analyse de la BNB, pour ce qui concerne tant notre compétitivité que notre marché du travail, est qu’elle n’accorde qu’occasionnellement une attention explicite à notre système de liaison automatique des salaires à l’indice des prix à la consommation (ou plus exactement à l’indice santé).

Comme on le sait, la BNB a mené, pour le compte du gouvernement, l’enquête sur notre mécanisme d’indexation avec une attention particulière portée aux alternatives possibles. Interpellé à ce sujet lors de la conférence de presse, Luc Coene a assuré que l’étude n’était pas encore terminée et qu’elle ne serait bouclée de manière définitive que dans le courant du mois de mars.

Etrange. Car deux régents de la Banque nationale, deux sources internes à la BNB elle-même, et un ministre fédéral nous confirment que l’étude a été achevée et transmise par le gouverneur au Premier ministre Elio Di Rupo. Coïncidence ou pas, Alexander De Croo, président de l’Open VLD, a demandé hier la publication de cette étude.

Le Premier ministre ne veut en aucun cas sortir du bois maintenant avec cette étude. Elio Di Rupo estime sans doute que le prochain (et imminent) contrôle budgétaire s’avérera suffisamment rude pour sa coalition. Mener simultanément un débat – forcément très difficile – sur l’avenir de notre visage mécanisme d’indexation est évidemment trop, vraiment trop. Mais la discussion sur l’index est super-urgente.

Johan Van Overtveldt

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content