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Voyages aériens: interdire de voler plus de 3 à 4 fois dans une vie ?

Lire la chronique d' Amid Faljaoui Amid Faljaoui, directeur des magazines francophones de Roularta.

Il y a des personnes qui ont une parole en or. C’est le cas de Jean-Marc Jancovici, l’expert français dans les questions énergétiques.

Ca fait plus de 30 ans que Jean-Marc Jancovici bourlingue autour des questions énergétiques et comme il est polytechnicien de formation, sa parole est prise très au sérieux. Récemment encore, il était venu en Belgique à l’invitation d’une entreprise et il a fait salle comble auprès des patrons, mais aussi des étudiants de l’université libre de Bruxelles. Son dernier fait d’armes a fait tiquer pas mal d’auditeurs. Normal, il a osé déclarer devant les micros de nos confrères de France Inter qu’il faudrait sans doute limiter à 3 ou 4 le nombre de vols par avion réalisables sur toute une vie.

La raison de ce tour de vis drastique ? Selon Jean-Marc Jancovici, l’avion est né avec le pétrole et va mourir avec le pétrole, car il n’y a pas, toujours selon cet ingénieur écolo, de solution technique viable à l’échelle pour le remplacer. Partant de ce constat et par souci d’égalitarisme, Jean-Marc Jancovici préfère gérer ce problème de pollution par les quantités plutôt que par les prix. Pareille déclaration a fait bondir pas mal d’auditeurs et d’auditrices, dont l’expert belge Damien Ernst, bien connu des médias belges pour son expertise sur les questions énergétiques. S’il reconnait que la majorité des avions utilise du kérosène comme énergie, matière première fabriquée à partir du pétrole, Damien Ernst rappelle aussi qu’il est possible de fabriquer du kérosène à partir d’autres sources d’énergie et notamment à partir d’électricité. Le même Damien Ernst évoque la possibilité de le faire avec des énergies renouvelables comme l’éolien et le photovoltaïque.

Selon lui, Jean-Marc Jancovici se plante complètement, et je le cite, “par manque d’ambition technologique”. Un autre auditeur, Jean-François Rial, PDG de Voyageurs du Monde, un spécialiste du voyage sur mesure et d’aventure est plus nuancé dans sa critique de Jean-Marc Jancovici. Si lui aussi estime qu’il y a des technologies qui permettront au secteur aérien de se décarboner, il reconnait qu’en termes de délai et de coûts, dans l’état actuel des choses, on n’y arrivera pas. Le patron de Voyageurs du Monde estime qu’il est injuste de pointer du doigt uniquement le secteur aérien, car le ciment, l’agriculture ou le numérique sont aussi très pollueurs. Pour lui, beaucoup d’usages liés au numérique (j’imagine qu’il parle de ceux et celles qui passent leur vie sur Tik Tok et les réseaux sociaux) ne sont pas “utiles” alors que les voyages, eux, rapprochent les personnes de civilisations différentes. En plus, des tas de pays ne pourraient pas vivre sans l’aviation. Allez, en effet, dire aux Egyptiens, aux Sri-Lankais ou habitants de Marrakech que du jour au lendemain, tout va s’arrêter. C’est faire fi du fait que supprimer le transport aérien, c’est menacer 10% des emplois mondiaux nous dit le PDG de Voyageurs du Monde.

Le débat suscité par Jean-Marc Jancovici est très intéressant. Il pose la question de la surconsommation de l’aérien. Pour les uns, il dit vrai même si c’est pénible à entendre comme solution. Pour d’autres, ce que préconise Jancovici est du même ordre que le programme assez baroque de Ferdinand Lop, un homme politique de la IV république, qui préconisait, je vous cite pêle-mêle, de prolonger le boulevard Saint-Michel de Paris jusqu’à la mer. Le même qui préconisait la fin de la pauvreté après 22 heures, ou encore l’octroi d’une pension à la veuve du soldat inconnu et l’installation de Paris à la campagne pour que ses habitants profitent de l’air pur. Bien sûr, ces suggestions font sourire. Mais vous, vous en pensez quoi de l’idée de notre ami Jancovici? A prendre à la lettre ou à nuancer ?

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