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Ukraine: la confiance, le mot-clé de la sortie de crise

Lire la chronique d' Amid Faljaoui Amid Faljaoui, directeur des magazines francophones de Roularta.

Je vais vous parler d’une femme extraordinaire, sans doute la plus puissante d’Europe. Ana Botin est la patronne de la banque espagnole Santander et préside également la fédération bancaire européenne.

Ana Botin vient d’accorder une interview à 4 quotidiens européens. Ce qui m’a frappé dans ces entretiens, c’est quand elle dit que son message à ses collaborateurs est, d’après elle, le même que celui qu’il faudrait délivrer à l’ensemble de la société. Que dit Ana Botin à propos de la guerre en Ukraine ? Qu’il faut d’abord s’occuper de l’urgence humanitaire, des réfugiés, de l’aide aux Ukrainiens, mais en même temps, que nous devons continuer notre vie quotidienne. Les entreprises doivent poursuivre leurs programmes d’investissement et se rendre plus compétitives. Quant aux ménages, ils doivent continuer à vivre, à consommer et à voyager.

En fait, ce que Ana Botin dit est très simple à comprendre : aujourd’hui les particuliers ont peur de l’avenir. Ils regardent leur facture énergétique flamber, ils voient le prix à la pompe exploser… Ce n’est guère mieux pour les entreprises : l’inflation leur coûte cher et réduit leur marge. Tout augmente : les salaires, l’énergie , les métaux, sans compter les temps de livraison de nombreux produits. Bref, selon Ana Botin, la peur est mauvaise conseillère et si tout le monde se met en mode ”j’attends de voir” avant de voyager, d’investir ou de consommer, alors l’économie va plonger.

Ce que rappelle ainsi cette banquière, c’est que l’économie, c’est d’abord de la confiance. C’est le mot-clé, il faut tout faire pour continuer à vivre et à investir et à consommer. Le dire et le faire ne veut pas dire qu’on est insensible au drame humain en Ukraine. Car si l’économie européenne s’effondre, ça va encore moins les aider.

En fait, comme le faisait remarquer un commentateur économique, c’est une drôle de guerre. Tout le monde nous dit qu’elle nous frappe d’abord sur le pouvoir d’achat à cause de la flambée du pétrole et du gaz. Or, regardez autour de vous. Nous vivons une crise énergétique, et il n’y a aucun rationnement, aucune restriction. Je dirai même qu’il n’y a aucune incitation à moins consommer. C’est très bizarre, non ?

Lors des chocs pétroliers précédents, on nous interdisait de rouler en voiture le weekend et on nous demandait de porter un gros pull et de couper notre chauffage. Aujourd’hui rien de tout ça. J’ai posé la question à un ami économiste et sa réponse est exactement dans la droite ligne de ce qu’a dit Ana Botin : si on demande aux ménages de réduire fortement leur consommation ou qu’on leur interdit de rouler, on risque de provoquer la panique et tout le monde se mettra à économiser. Plus personne ne sortira, plus personne ne consommera, et plus aucune entreprise n’investira. Or, à nouveau, comme je vous l’ai dit : l’économie c’est d’abord et avant tout de la confiance.

Voilà pourquoi les politiques n’osent pas nous tenir un discours de sueurs et de larmes. Il est donc, en quelque sorte, interdit de paniquer, car la confiance, c’est comme le bonheur, on se rend compte de sa valeur au bruit qu’il fait en partant.

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