Tax shift : la “machine truquée” démontée par le PTB

Johan Van Overtveldt (N-VA) © BELGA
Vincent Degrez Journaliste

Le ministre des Finances a donc dévoilé sa calculatrice en ligne, permettant de calculer les bénéfices que chaque salarié tirera du tax shift dans les années à venir. Un ramassis de “contre-vérités”, dénonce le PTB, qui déconstruit l’énième opération de “com’ com’ com'” du gouvernement.

Johan Van Overtveldt, ministre des Finances, a lancé mardi le site Internet Montaxshift.be où les salariés peuvent calculer ce que leur rapporteront les mesures décidées par le gouvernement voici une dizaine de jours en introduisant leur salaire brut.

“Le site permet aux citoyens de se familiariser avec les mesures du tax shift et explique également nous prenons ces mesures”, a indiqué le ministre dans un communiqué. “Il ne s’agit pas d’une campagne promotionnelle : le site donne une image objective de toutes les mesures. En effet, le tax shift comprend aussi des augmentations d’accises, par exemple. Ces recettes sont nécessaires pour réaliser l’importante réduction de charges sur le travail. Le résultat final est un meilleur équilibre fiscal qui crée des emplois et favorise la croissance économique.”

Ce service en ligne n’a pas fait l’unanimité, loin de là. Et la contre-attaque ne s’est guère fait attendre. “Pour tenter de faire croire le contraire, le gouvernement – par l’entremise de son ministre des Finances – a lancé une calculatrice qui montre que le tax shift rapporterait bien à tous : problème, la machine est truquée !”, a dénoncé mercredi Benjamin Pestieau, membre du conseil national du Parti du travail de Belgique, dans un communiqué.

“Selon cette machine, un couple de travailleurs (gagnant respectivement 3 000 et 1.600 euros bruts) ayant 2 enfants devrait recevoir 1.700 euros nets en plus dès 2016 via des réductions d’impôts”, continue le PTB. “Rien que ça ! Pourtant, la machine à calculer du gouvernement, si elle contient bien la fonction ‘+’, semble ne pas contenir la fonction ‘-‘, et encore moins la fonction qui comptabilise tout ce que le gouvernement va nous faire perdre.” Et le parti travailliste de lister les quatre “manquements” majeurs au service Mytaxshift.be du ministre Van Overtveldt.

1. Diminutions d’impôt

Sur Montaxshift.be, le ministre des Finances permet, au moyen d’une calculatrice, de calculer, à partir de son salaire brut, la proportion de “salaire net supplémentaire par moi”. Par exemple, un salaire mensuel brut de 1.500 euros rapportera, cette année, 23 euros nets en plus grâce au tax shift, et jusqu’à 146 euros en 2020. Un salaire mensuel brut de 10.000 euros (le maximum envisage par Montaxshift.be) donnera respectivement 6 et 74 euros de salaire net en plus.

En petits caractères, on découvre néanmoins que “le calculateurs (sic) calcule l’impact sur l’impôt de base, sans prise en considération des déductions fiscales et de la composition de ménage”. Le PTB pointe dès lors les limitations intrinsèques de ce moteur de calcul – et, partant, son aspect purement “communicationnel” : “La machine truquée du ministre des Finances surestime les diminutions d’impôt. Si vous gagnez moins de 1.500 euros bruts par mois, vous ne pouvez pas faire fonctionner la machine ! Tous les travailleurs à temps partiel, les pensionnés et les autres allocataires sociaux sont tout simplement exclus du calcul.”

En outre, “pour les autres, le gouvernement les considère comme des isolés. Mais bon nombre de réductions d’impôt sont beaucoup plus petites, voire nulles, pour les familles. Pour notre famille (couple de travailleurs ayant 2 enfants), les diminutions d’impôt devraient être de maximum 1.200 euros en 2016 (voir calculateur de la CSC).”

2. Saut d’index

Montaxshift.be “ne tient pas compte du saut d’index”, ajoute le PTB, soit “- 1.280 euros pour notre famille”.

3. TVA sur l’électricité

La TVA sur l’électricité “est ramenée à son taux initial de 21% au lieu de 6%”, écrit encore le ministère des Finances sur le site dédié au tax shift. “Le gouvernement agit ainsi sur la base des recommandations de l’OCDE et du FMI. Les recettes permettront de faire baisser d’autres taxes de sorte que le pouvoir d’achat des gens n’en sera pas affecté. L’augmentation du taux est intégrée à l’index, de sorte que via l’index, il n’y aura pas d’effets néfastes.”

Et pourtant, le Parti du travail ne croit visiblement à cette “annulation” de l’effet d’une TVA à 21% sur l’électricité sur le pouvoir d’achat des Belges. Selon le PTB, en effet, le moteur de calcul ne tiendrait pas compte de cette augmentation, soit une perte supplémentaire de 120 euros pour l’exemple de cette famille avec deux enfants.

4. Augmentation d’accises et taxes

“La machine truquée du ministre des Finances ne tient pas compte de l’augmentation de nombreuses accises et taxes dès 2016 : – 240 euros pour notre famille”, peut-on enfin lire dans le communiqué du PTB. Taxe santé (sur les boissons rafraîchissantes), diesel (tandis que les accises sur l’essence diminueront), tabac (le ministre soulignant l'”important coût social” entraîné par le tabac), alcool (surtout les alcools forts, tandis que les augmentations des accises sont plus limitées pour la bière et le vin) : le gouvernement tire tous azimuts, arguant que “les recettes provenant de l’augmentation d’un certain nombre d’accises seront affectées à la réduction des impôts pour les citoyens et les entreprises”.

Une diminution d’impôts ? Non, une opération de com’ !

“Comme son nom l’indique, un tax shift est un glissement de la fiscalité”, résume le gouvernement sur le site Mytaxshift.be. “Mais dans les faits, le tax shift est bien plus qu’un glissement, c’est une diminution des impôts. Cette diminution résulte du fait que le tax shift est en partie financé par des économies réalisées par les autorités elles-mêmes. En rendant le fonctionnement des pouvoirs publics plus efficace, nous économisons de l’argent. Cet argent est utilisé pour financer les réductions d’impôts. Ces réductions d’impôts sont toujours supérieures aux nouvelles recettes perçues par l’Etat. Le tax shift ne réduit donc pas seulement les impôts pour les citoyens et les entreprises, il abaisse également la charge fiscale totale ainsi que les prélèvements publics.”

Illusoire, conclut de son côté le PTB, qui affirme que “le gouvernement Michel-De Wever va faire perdre à notre famille 1.640 euros en 2016”. Au yeux du parti de gauche, tout ceci n’est donc qu’une opération de com’ de plus, “au prix de propager des contre-vérités”.

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