Présidentielle française: Macron devant Le Pen avant un second tour incertain

Le président sortant Emmanuel Macron est arrivé assez nettement en tête dimanche du premier tour de l’élection présidentielle française, devançant de quelques points la dirigeante de l’extrême droite Marine Le Pen qu’il affrontera le 24 avril dans un duel qui s’annonce serré.

Selon les estimations, le président sortant est un peu en dessous de 30%, plus haut qu’anticipé dans les sondages avant le vote, à l’issue d’une première partie de campagne fortement perturbée par la pandémie et la guerre en Ukraine.

“Macron président!”: agitant drapeaux français et européens, près d’un millier de militants macronistes ont laissé exploser leur joie dimanche soir, soulagés du score d’Emmanuel Macron, scandant “et un, et deux, et cinq ans de plus”.

Marine Le Pen arrive deuxième un peu en dessous de 25%, selon les estimations, devant le chef de la gauche radicale Jean-Luc Mélenchon aux alentours de 20%.

L’abstention est particulièrement forte, entre 26,2% et 29,1% selon deux estimations, marquant le dédain croissant des Français vis-à-vis de leur classe politique. C’est plus que les 22,2% de 2017, alors que le record est de 28,4% en 2002.

Appel au barrage

Immédiatement, de nombreux candidats éliminés ont appelé à faire barrage à Mme Le Pen, dont M. Mélenchon. “Il ne faut pas donner une seule voix à Marine Le Pen”, a-t-il répété.

Communistes, socialistes, écologistes ont fait les mêmes appels, de même que la candidate de la droite Valérie Pécresse.

Pour autant, la portée de ces appels reste incertaine, tant l’abstention est forte chez les Français, et la personnalité d’Emmanuel Macron parfois clivante chez certains électeurs de gauche.

Le président va devoir “aller chercher les électeurs de gauche et écologistes un par un”, a mis en garde une cadre du parti écologiste Les Verts, Sandrine Rousseau. Sinon, “vous ne passerez pas”.

Malgré ce front auquel elle fait face, Marine Le Pen, qui avait été défaite par Emmanuel Macron en 2017, n’a jamais semblé aussi proche d’une possible victoire selon les sondages réalisés avant l’élection qui la donnent perdante de très peu, dans la marge d’erreur.

Zemmour pour Le Pen

Mais elle semble avoir une relativement faible réserve de voix pour le second tour au vu des estimations de score de l’autre candidat de l’extrême droite Eric Zemmour, aux alentours de 7%.

“Je ne me tromperai pas d’adversaire”, a déclaré M. Zemmour devant ses partisans, en les appelant à “voter pour Marine Le Pen”.

Une victoire de Mme Le Pen pourrait avoir d’importantes conséquences internationales, étant donné ses positions hostiles à l’intégration européenne et sa volonté, par exemple, de sortir du commandement intégré de l’Otan.

“Ce qui se jouera le 24 avril sera un choix de société et de civilisation”, a lancé Mme Le Pen, en promettant notamment de “restaurer la souveraineté de la France”.

Ce sont “deux visions de la France qui vont s’affronter”, a aussi estimé depuis l’autre bord le ministre de l’Economie et des Finances Bruno Le Maire.

L’élection de Mme Le Pen créerait une double première: première accession au pouvoir par les urnes de l’extrême droite et première femme présidente.

“En 2017, Marine Le Pen n’avait pas de réserve significative. Là elle devrait pouvoir aller beaucoup plus loin. Macron va devoir aller à la pêche aux voix chez Jean-Luc Mélenchon”, a estimé le politologue Pascal Perrineau sur Arte.

“C’est une nouvelle élection qui commence”, a estimé sur France 2 Louis Aliot, un des cadres du Rassemblement national (RN) le parti de Mme Le Pen, appelant au “rassemblement” ceux qui ne veulent pas d’un second mandat d’Emmanuel Macron.

Le débat télévisé

Un moment clé des deux semaines de la nouvelle campagne qui commence sera le 20 avril lors du traditionnel débat télévisé de l’entre-deux tours.

En 2017, le phénomène Emmanuel Macron dynamitant la gauche et la droite par le centre, avait nettement dominé Marine Le Pen.

Mais cette année, la fille de l’ancien et sulfureux tribun Jean-Marie Le Pen, qui avait été le premier à conduire l’extrême droite au deuxième tour en 2002, semble nettement mieux préparée.

Elle a conduit une campagne de terrain, axée sur le pouvoir d’achat, principale préoccupation des électeurs, tandis qu’Emmanuel Macron, accaparé par la guerre en Ukraine, s’est peu impliqué dans ce premier tour.

La campagne électorale a été inédite, car complètement perturbée par la pandémie de Covid 19 et par la guerre.

Déboussolés ou lassés, de très nombreux Français se sont abstenus ou ont hésité jusqu’au dernier moment avant de choisir leur candidat parmi les douze prétendants.

Comme Françoise Reynaud, une électrice de 55 ans à Marseille (sud): “Sur les 12, j’en avais sélectionné quatre hier soir, et je me suis décidée ce matin”.

A Pantin, en région parisienne, Blandine Lehout, comédienne de 32 ans, expliquait qu’elle n’irait pas voter: “C’est la première fois de ma vie”. “Là, je les déteste tous. On est à un stade où ils me font peur”.

Dans l’entourage de M. Macron, on admet que ce réflexe, dont il avait bénéficié lors de son élection en 2017, n’est plus une évidence.

Sentant la menace, le président candidat avait accéléré sa campagne en fin de semaine et multiplié les attaques contre une extrême droite “banalisée”.

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