Philippe Buelen: “Wallonie Santé se porte bien “

Philippe Buelen, l'homme à la tête de Wallonie Santé © BelgaImage

A l’occasion du premier anniversaire du fonds d’investissement Wallonie Santé, ” Trends-Tendances ” a rencontré Philippe Buelen, son patron, afin de tirer un premier bilan.

Wallonie Santé est un fonds d’investissement logé au sein de la Sogepa (la société wallonne de gestion et de participations), détenu à 100% par la Région et dédié au financement des acteurs de la santé et de l’action sociale en Wallonie. Sont visés les hôpitaux, bien sûr, mais aussi les maisons de repos (MR), les maisons de repos et de soins (MRS), les résidences services, les centres de soins de jour et de nuit, ainsi que les établissements pour personnes handicapées. Et ce, qu’ils soient publics ou privés et peu importe leur taille. Mais il est clair que le rôle de Wallonie Santé sera très différent selon qu’il intervient sur des petits projets ou des structures intermédiaires, ou en vue de soutenir des projets ou des hôpitaux qui visent une reconstruction totale ou partielle.

” Nous avons logé Wallonie Santé au sein de la Sogepa pour ne pas créer un organisme supplémentaire, explique Philippe Buelen, le patron et par ailleurs premier vice-président de la Sogepa. Nous avons le même comité de direction et le même conseil d’administration. En termes de gouvernance, cela veut dire qu’il n’y a pas de jetons de présence supplémentaires ni de coût de structure additionnel. ”

Naissance en cabinet

Ce dernier parle de Wallonie Santé comme de son bébé. Il faut dire qu’il a procédé, après avoir identifié avec l’appui de Deloitte les besoins croissants et nombreux défis du secteur, à l’accouchement du fonds lorsqu’il était le directeur de cabinet du ministre wallon de l’Action sociale Maxime Prévot. ” Et après un an d’existence, je peux vous dire que le bébé se porte bien “, expose l’heureux papa.

Un bébé qui ne doit pas tarder à grandir tant les défis qui l’attendent sont nombreux. Il s’agit de rencontrer les futurs besoins de nos sociétés, qui seront liés entre autres au vieillissement et à l’évolution des besoins en matière de santé.

Un enjeu majeur qui est à nos portes et que Philippe Buelen évoque en s’appuyant sur quelques images fortes issues d’un livre de Pascal Bruckner, Une brève éternité : Philosophie de la longévité (éditions Grasset). Un ouvrage que ne quitte plus le gestionnaire wallon.

Plus de couches-culottes pour aînés que pour bébés

Dans son ouvrage, l’essayiste français rappelle qu’en un peu plus de deux siècles, l’espérance de vie a triplé. Aujourd’hui, une fille sur deux naissant en France sera centenaire. En Allemagne, les couches-culottes pour les aînés ont dépassé les ventes de celles pour nouveaux-nés. De ce vieillissement de la population découle un enjeu sociétal, à savoir un accès égal aux soins de santé. Un enjeu parfaitement illustré par cette statistique : les 5% de personnes les plus riches vivent 13 ans de plus que les 5% les plus pauvres.

La santé est le premier secteur d’activité en Wallonie en termes d’emploi et le troisième en valeur ajoutée.

Au niveau économique, le secteur de la santé est en pleine expansion en Wallonie. ” En 2016, le secteur de la santé et de l’action sociale représentait 180.000 emplois, soit 15% de l’emploi total en Wallonie et 8 milliards d’euros de valeur ajoutée, ou 10% du PIB wallon, avance Philippe Buelen. Il s’agit du premier secteur d’activité en Wallonie en termes d’emploi, et il est troisième en valeur ajoutée (derrière l’industrie et le commerce). ”

Définancement structurel

Néanmoins, ce secteur fait face à un définancement structurel qui s’explique notamment par l’application des règles européennes en matière d’investissement et par la mise en place d’un nouveau système de financement au niveau régional depuis le 1er janvier 2019. ” Depuis la sixième réforme de l’Etat, le mécanisme de financement des infrastructures hospitalières a été complètement revu par le gouvernement wallon en passant d’un système de couverture des charges d’amortissement via le BMF (budget des moyens financiers) au prix d’hébergement. Ce faisant, il y aura un financement moindre “, analyse Philippe Buelen. ” Aujourd’hui, le financement d’infrastructures est plafonné à 72,5% dans le mécanisme du prix d’hébergement, quels que soient les travaux de construction réalisés, complète-t-il. Par ailleurs, il est mis fin au mécanisme cements “, prévient le CEO de Wallonie Santé.

Mais attention, le but n’est ni de suppléer les banques, ni de prendre des parts dans les structures soutenues. ” Nous voulons jouer un rôle de levier aux côtés des banques, pour compléter un tour de financement et permettre, par exemple, un investissement innovant “, précise Philippe Buelen.

100 millions de capital et 100 millions de garantie

Pour cela, Wallonie Santé dispose d’un capital de 100 millions d’euros, utilisable pour des interventions financières, auquel s’ajoute un volant de manoeuvre de 100 millions d’euros dédié à l’octroi de garanties en couverture de financements bancaires (ce qui souvent s’avère déterminant pour l’obtention d’un crédit bancaire).

Les interventions financières peuvent prendre la forme de prêts subordonnés, c’est-à-dire des prêts dont le remboursement dépend du remboursement préalable des autres créanciers, ce qui en fait des quasi-fonds propres. Enfin, le fonds peut prendre des prises de participation. ” Mais alors avec un exit rapide “, avance le CEO.

Wallonie Santé vient d’être dotée d’une enveloppe supplémentaire de 30 millions d’euros en vue d’améliorer la performance énergétique des établissements de soins via le mécanisme du tiers investissement.

Déjà une dizaine de projets soutenus

En un an, le fonds a pris des décisions dans une dizaine de projets en mobilisant 48% des capitaux déjà libérés par la Région wallonne. ” Pour l’instant, nous sommes deux à travailler sur ces dossiers mais demain, nous souhaitons mobiliser les forces en présence avec par exemple la SRIW pour augmenter notre volume d’action. A ce sujet, le fait que nous serons bientôt dans le même bâtiment est une opportunité “, se réjouit le gestionnaire.

En effet, en 2020, les SRIW, Sowalfin, Sogepa, Spaque et Wallonie Santé occuperont le même bâtiment. ” L’année à venir devrait être aussi celle où nous serons self supporting financièrement “, espère le patron de Wallonie Santé. Il se réjouit d’ailleurs du soutien apporté à Wallonie Santé par les ministres Christie Morreale, Willy Borsus et Jean-Luc Crucke.

Enfin, Philippe Buelen espère que 2020 verra aussi la naissance d’un conseil consultatif composé d’experts sectoriels au sein de Wallonie Santé. ” Cet outil nous permettrait d’établir une vision à cinq ans grâce à une veille économique et prospective “, conclut le dirigeant wallon.

Par Jérémie Demeyer

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