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Pékin, l’interdiction des jeux vidéo et la “fabrique du crétin digital”

Lire la chronique d' Amid Faljaoui Amid Faljaoui, directeur des magazines francophones de Roularta.

Puisque nous sommes tous revenus, ou presque, au présentiel, j’ai envie de vous proposer un magnifique sujet à débattre autour de la machine à café : vous vous souvenez, durant la pandémie, certains se sont posé la question de savoir si les pays autoritaires, comme la Chine, par exemple, n’avaient pas mieux géré la crise sanitaire que nous. Le débat n’est d’ailleurs pas encore clos.

Aujourd’hui, j’ai envie de vous poser la question suivante : est-ce que la Chine, réputée dictatoriale, en fait trop lorsqu’elle interdit aux jeunes de moins de 18 ans d’avoir plus de 3 heures d’exposition aux jeux vidéo par semaine. Et encore, ces 3 heures sont limitées aux weekends et à des heures bien précises. Mieux ou pire encore, selon votre humeur ou opinion, la Chine va encore plus loin, cette semaine (sous la pression du gouvernement de Pékin), les propriétaires de l’application Douyin, la version chinoise de TikTok, vont limiter son utilisation à 40 minutes par jour pour les moins de 14 ans. Afin de préserver le temps de sommeil de ces adolescents, l’accès à cette application sera bloqué de 22 heures à 6 heures du matin.

Et c’est là où le débat va démarrer entre ceux qui diront que c’est une ingérence de plus de la Chine dans la vie privée des gens, et des jeunes en particulier, et d’autres qui vont surenchérir en disant que c’est une atteinte à la liberté et que sais-je encore ? Pour ma part, je pense comme vient de le faire auprès de mes confrères du Figaro l’essayiste Olivier Babeau : “qu’il faut aller au-delà des apparences”.

D’abord, même si les effets négatifs ne sont pas encore totalement documentés sur le plan scientifique, il est clair que l’usage abusif des écrans détériore la vue, la mémoire, la capacité d’attention, encourage une vie sédentaire, et parfois suscite de l’angoisse ou une forme d’anxiété. D’après Olivier Babeau, et il n’est pas le seul à penser de la sorte, si la Chine combat les jeux vidéo et les applications addictives, c’est parce que le pouvoir en place estime que c’est un nouvel opium du peuple. Surtout, la Chine a compris que la 3ème guerre mondiale ne sera pas militaire mais une guerre des cerveaux : la qualité de l’éducation de notre jeunesse déterminera le futur des nations. Le docteur Laurent Alexandre nous a déjà prévenu à ce sujet, la population de la Chine a un quotient intellectuel moyen supérieur à 105, c’est nettement au-dessus du QI moyen des Etats-Unis et de l’Europe. Il n’y a d’ailleurs qu’à regarder le classement Pisa des écoles au niveau international !

La Chine a donc compris que l’avenir c’est le contrôle de l’intelligence artificielle mais aussi de l’éducation des cerveaux biologiques. De plus, la maîtrise du temps passé sur les écrans est aussi une question importante pour lutter contre les inégalités sociales car il est prouvé que les milieux plus populaires sont moins bien outillés pour détourner leurs enfants de l’addiction aux écrans.

Philippe Bouvard avait coutume de dire que lorsqu’on vit trop à crédit, les ardoises deviennent des tuiles. Dans le même ordre d’idée, comment peut-on faire pour que nos enfants ne soient victimes de ce que Michel Desmurget appelait dans son livre “la fabrique du crétin digital” ?

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