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“Paul Magnette et Bart De Wever ont pris un sacré risque en osant ce rapprochement”
Le refrain revient à intervalles irréguliers depuis le 26 mai 2019 : la N-VA et le PS, les plus gros partis de chaque communauté, doivent prendre “leurs responsabilités” et lancer activement la formation d’un gouvernement fédéral.
Ces responsabilités, ils les ont prises en cet été caniculaire. Ces deux partis que tout opposait (ou presque, manifestement) ont fait un bout de chemin l’un vers l’autre, au point de parvenir à rédiger une note commune aux contours institutionnels décapants.
Sincèrement, nous n’avions jamais cru à l’hypothèse d’un tel rapprochement. Mais la gravité de la crise du Covid-19, le besoin de s’inscrire rapidement dans les plans européens et la peur d’être contournés par une coalition alternative ont eu raison des exclusives et positions péremptoires de chacun.
Paul Magnette et Bart De Wever ont pris un sacré risque en osant ce rapprochement. Ils ne peuvent plus faire marche arrière.
Paul Magnette et Bart De Wever ont pris un sacré risque en osant ce rapprochement. Ce risque change fondamentalement la donne : ils ne peuvent plus faire marche arrière et miser sur des élections anticipées cet automne. Ils ont en effet besoin de résultats concrets avant d’aller expliquer aux électeurs pourquoi ils ont pactisé avec “le diable”.
Cette obligation de résultat leur impose maintenant de convaincre des partenaires à les rejoindre. A l’heure où nous écrivons ces lignes, cinq partis (N-VA, PS, sp.a, CD&V et cdH) ont accepté de finaliser un accord gouvernemental sur base de la note Magnette-De Wever. Ils représentent ensemble 69 sièges sur 150. Pour atteindre une majorité, il faut y ajouter soit les libéraux (26 élus), soit les écologistes (21). Le tandem de négociateurs est prêt à amender sa note pour y apposer des marqueurs bleus ou verts, indispensables pour amener de nouveaux partis autour de la table.
Que la N-VA puisse envisager de gouverner avec Ecolo, c’est encore plus improbable que son rapprochement avec le PS. Et pourtant, la démarche est sincère, nous assure-t-on. A la fois parce que le parti nationaliste n’est pas un bloc aussi monolithique qu’on ne le perçoit du côté francophone, que les Verts sont la seule famille politique à avoir progressé lors des dernières élections et que les plans européens pousseront de toute façon à privilégier les investissements dans la transition écologique.
En outre, fin stratège, Bart De Wever prépare sans doute déjà le coup d’après : la réforme de l’Etat qu’il dessine actuellement devrait être votée lors de la législature suivante (la Constitution nous protège de réformes trop impulsives) et la famille écologiste, qui a voté les trois dernières réformes de l’Etat, sera alors peut-être nécessaire pour atteindre la majorité des deux tiers. Dans cette optique, commencer dès à présent à dégeler ses relations avec les Verts, ce n’est pas du temps perdu. Reste à savoir si les écologistes sont suffisamment armés pour prendre le même risque politique que le parti socialiste…
Autre hypothèse : ne prendre que l’Open Vld (12 élus). La coalition serait à nouveau très minoritaire du côté francophone – ce qui ne semble pas émouvoir grand monde – et renverrait dans l’opposition un MR dont le président Georges-Louis Bouchez a été publiquement rabroué par Bart De Wever. Jusqu’à présent, l’unité de la famille libérale semble toutefois bien résister à des sollicitations qui vont pourtant jusqu’à offrir le poste de Premier ministre à l’Open Vld (Alexander De Croo). Mais aujourd’hui, en politique belge, on a appris à ne plus être sûr de rien et certainement pas des positions inflexibles des uns et des autres…
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