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“Obsession climatique des partis: à force de marteler qu’un seul sujet, on risque d’en dégoûter l’opinion”

Que le monde politique, poussé dans le dos par la mobilisation de la jeunesse, ait enfin pris la mesure des enjeux climatiques, on ne s’en plaindra pas. Mais de là à en faire l’unique thème de ce début de campagne, cela vire à l’excès.

Les premiers meetings, qui se tenaient le week-end dernier, se résumaient à une sorte de concours pour qui lavera le plus vert, à qui sera le plus écolo-pragmatique, écolo-réaliste ou écolo-socialiste. Parcourez le programme wallon du PS, vous y trouverez du ” durable ” et de ” l’écologique ” à quasiment tous les paragraphes. On a même failli s’esclaffer en découvrant la proposition phare (sic) en matière d’infrastructures sportives : ” Intégrer une dimension d’écoresponsabilité pour toutes les infrastructures sportives “. Eh oui, vraiment aucun sujet n’y échappe.

Parfois, on en perdrait presque tous ses repères idéologiques. Que le PTB lie l’enjeu climatique à la sortie du capitalisme, cela ne surprend personne. Mais quand le ministre libéral Jean-Luc Crucke réclame une banque publique pour le climat et des investissements comparables à ceux consentis pour le sauvetage des banques (2.500 milliards d’euros), avouez qu’on commence à s’embrouiller sérieusement entre la gauche et la droite.

On ironise, on ironise… mais ne vous méprenez pas : il est salutaire de voir les grands courants idéologiques converger pour tenter d’apporter des réponses, supportables par tous, à ce défi planétaire. Ce qui nous dérange, ce n’est même pas la conversion rapide de certains acteurs (ce qui, précisons-le, n’est pas le cas de Jean-Luc Crucke, convaincu depuis longtemps de la nécessité de revoir nos modes de production et de consommation d’énergie), c’est le fait que les dérèglements climatiques éclipsent tout le reste. Comme si les inégalités sociales avaient soudain cessé de croître ou que les métiers en pénurie avaient enfin trouvé preneurs. De tels thèmes doivent aussi trouver leur place dans une campagne électorale.

Les premiers meetings en vue du scrutin du 26 mai se résument à une sorte de concours pour qui lavera le plus vert.

Et attention au retour de manivelle : à force de ne marteler qu’un seul thème, on risque d’en dégoûter l’opinion. Notez, c’est peut-être ce que cherchent les partis (hors Ecolo évidemment). Tant que nous sommes dans la campagne monothématique, tout roule pour les Verts, au point que les derniers sondages leur permettent de rêver à des présidences d’exécutifs. Personne n’avait en fait anticipé l’incidence que le scrutin communal pourrait avoir sur la campagne législative qui allait suivre. L’épisode du Pacte de Marrakech et de la chute du gouvernement Michel s’explique largement par les scores de la N-VA en dessous des attentes, même s’ils demeurent incroyablement élevés. En multipliant leurs participations dans des majorités communales, les Verts ont, eux, acquis la crédibilité qui pourrait les aider à franchir des paliers électoraux supplémentaires. Ils sont logiquement devenus la cible privilégiée de leurs adversaires, lesquels pointent la perspective de nombreuses taxes environnementales ou de politiques très normatives pour détourner les électeurs potentiels. Jusqu’ici sans trop d’effets.

A ce petit jeu, il est intéressant de noter le comportement du parti socialiste, le seul à ne quasiment jamais attaquer de front les écologistes. Faut-il d’ores et déjà y voir une option privilégiée pour les futures alliances ? Peut-être. Mais, plus prosaïquement, le scrutin communal – toujours lui – nous a indiqué qu’Ecolo et le PS n’étaient pour l’instant plus vraiment en rivalité électorale directe. Le recul du PS profite surtout à la gauche radicale tandis qu’Ecolo séduit désormais dans des milieux d’ordinaire plus proches du cdH et plus encore du MR. Mais cela, c’est la situation à trois mois de l’échéance. Et trois mois, cela peut parfois sembler très long.

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