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Mourir pour Kiev aujourd’hui ou demain pour Taïwan ?

Lire la chronique d' Amid Faljaoui Amid Faljaoui, directeur des magazines francophones de Roularta.

C’est à un véritable coup de tabac auquel on a assisté ce lundi sur les marchés financiers. La plupart des indices boursiers étaient en baisse, à cause d’un risque d’invasion imminente de l’Ukraine par la Russie.

Jusqu’à présent les investisseurs n’y croyaient pas trop à cette guerre, car si la Russie peut nous faire mal avec son gaz, elle a encore plus à perdre que nous dans cette guerre. Mais voilà, au fil des déclarations des uns et des autres, les investisseurs se disent que Vladimir Poutine pourrait agir de manière irrationnelle. Autrement dit, la Bourse intègre aujourd’hui le danger d’une guerre dans les cours.

Le raisonnement est le suivant : si une action militaire devait avoir lieu, cela provoquera automatiquement des sanctions économiques contre la Russie, et cette dernière rétorquera en coupant son approvisionnement en gaz pour l’Europe. Ce serait une catastrophe pour l’industrie européenne. Le pétrole risquerait aussi de passer la barre des 100 dollars le baril. Tous ces chocs alimenteraient encore plus l’inflation, cela alourdirait la facture énergétique des entreprises qui n’en ont pas besoin en ce moment. Quant aux particuliers – vous et moi – on se retrouverait avec des prix à la pompe exorbitants, à un moment où les ménages se débattent pour préserver leur pouvoir d’achat.

Voilà en résumé les risques d’engrenage qu’anticipe la Bourse. Pourtant, encore une fois, la Russie a plus à perdre que nous dans une guerre. Si elle a une armée importante, la Russie est un nain économique. C’est la 11e puissance économique, son PIB est tout juste supérieur à celui de l’Espagne et en termes de richesse par habitant, la Russie se classe à la 65e position mondiale. Sachez aussi que le secteur énergétique russe ne peut pas fonctionner sans la technologie des entreprises occidentales. Même la défense russe importe encore 30% de son électronique de pointe d’Europe.

Selon les experts, s’il y a une offensive russe contre l’Ukraine, elle sera précédée d’une cyberattaque de très grande ampleur pour bloquer l’économie ukrainienne et notamment son système bancaire et désorganiser ses services publics. Sachez aussi, et on en parle peu, que la Chine regarde tout ça avec plus d’intérêt que les autres pays. Comme vous le savez, la Chine estime que Taiwan fait partie de son territoire national malgré son indépendance. Or, un traité de défense lie Taiwan aux Etats-Unis. En clair, en cas d’invasion de Taiwan, les Américains sont en principe obligés de riposter. Je vous en parle parce que 60% des importations européennes de semi-conducteurs viennent de Taïwan. Et si demain Taïwan n’était plus en mesure d’exporter, en trois semaines l’ensemble des usines du monde s’arrêterait a prévenu le commissaire européen Thierry Breton.

Ca veut dire quoi ? Ca veut que si on ne meurt pas aujourd’hui pour Kiev, il faudra peut-être le faire demain pour Taïwan comme l’indiquent mes confrères du Monde.

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