Manifestation contre l’esclavagisme moderne

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La Fédération européenne du bâtiment et du bois (European Federation of Building And Woodworkers) a organisé, mercredi, une manifestation à Bruxelles pour dénoncer “l’exploitation économique” et le dumping social dont sont victimes les travailleurs en Europe.

Les syndicats, regroupés dans cette fédération, attendent des actions réelles de l’Union européenne. Ils étaient environ 3.500, selon la police, à défiler à Bruxelles pour s’opposer à la concurrence déloyale dans les secteurs de la construction, du transport et de l’alimentation. “Ce nouveau type d’esclavagisme concerne plus d’1,5 million de travailleurs en Europe, rien que dans le secteur du bâtiment”, a-t-on entendu lors d’une conférence de presse organisée en marge de la manifestation.

L’exploitation des ouvriers, souvent originaires d’Europe de l’Est, est le fait de nombreux employeurs qui profitent de l’absence d’une harmonisation législative européenne et des lacunes juridiques pour exploiter la main-d’oeuvre. La plupart des entreprises qui pratiquent le dumping social le font via des sociétés boîte aux lettres. “En ce sens, ces entreprises corrompues dépouillent les travailleurs de leurs droits sociaux”, a expliqué un syndicaliste suédois. Les travailleurs, considérés comme une simple marchandise, se voient offrir des conditions de travail alléchantes en phase de recrutement. Mais, une fois sur place, la situation est plus sombre: faux contrats, non-paiement de bas salaires, heures supplémentaires, menaces, absence de congé…

Les employeurs peu scrupuleux profitent de la faiblesse de la directive européenne sur le détachement des travailleurs, datant de 1996. Une directive qui doit être amendée pour le mois de mars 2013. Les syndicats européens, dont la FGTB et la CSC, espèrent, par cette manifestation, attirer l’attention des parlementaires européens sur l’urgente nécessité de modifier et de réglementer plus sévèrement la libre circulation des personnes.

“Nous courons droit à la catastrophe”

La CSC a participé à la manifestation organisée à Bruxelles par plusieurs fédérations des secteurs de la construction, du transport et de l’alimentation contre le dumping social et la concurrence déloyale. Pour le syndicat chrétien, si rien ne change, “c’est vers un affaiblissement général de l’Union européenne que l’on se dirige”. Il prévient aussi: “nos PME montrent des signes de faiblesse fort inquiétants”.

La CSC, comme les autres syndicats, considère que la gestion de ce problème passe par l’Europe. “Avouez qu’il n’est pas normal que seuls les syndicats ou l’inspection sociale s’émeuvent d’une situation qui s’empire. Nos contrôles sont trop limités par rapport au nombre de cas”, a commenté Pierre Cuppens, secrétaire général de la CSC bâtiment. M. Cuppens estime que l’Union européenne dispose de trois leviers pour faire évoluer la situation sur le terrain de la concurrence déloyale entre entreprises européennes et entre travailleurs issus des 27 pays. “L’Europe doit sans tarder se doter d’un passeport social européen pour améliorer le marché du travail. Il faut ensuite qu’elle coordonne les inspections au sein de chaque Etat-membre. Enfin, la directive sur le détachement des travailleurs doit enfin contenir les éléments de contrôle nécessaires à sa bonne application”, insiste le syndicaliste.

Selon la CSC, l’UE semble bloquer sur la notion de libre circulation des personnes, véritable socle du marché libre européen. “Il faut bien entendu de la compétitivité, mais lorsqu’un sous-traitant polonais ou roumain remet un devis de 30 à 40% moins cher qu’une PME belge, c’est tout simplement déloyal. Et cela suscite, nous le remarquons depuis peu, une certaine xénophobie à l’égard de ces travailleurs étrangers”. La CSC rappelle également que le dumping social coûte des millions d’euros à l’État belge chaque année.

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