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Les vrais gagnants et les vrais perdants de 2022

Lire la chronique d' Amid Faljaoui Amid Faljaoui, directeur des magazines francophones de Roularta.

Pour cette avant-dernière chronique de l’année 2022, je voulais partager avec vous un sentiment très fort : au niveau mondial, n’avez-vous pas l’impression que les gagnants du début de l’année sont finalement les perdants de la fin de l’année ?

On nous disait, par exemple, que les États-Unis étaient essoufflés, qu’ils n’étaient plus les leaders du monde. Les médias s’amusaient des gaffes, des trous de mémoire et de l’âge avancé de Joe Biden. Finalement, ce président endormi, comme les médias l’ont trop rapidement décrit, a réussi à sauver son pouvoir au parlement américain en limitant la casse face au soi-disant raz-de-marée républicain. Et avec ses subventions massives à l’économie américaine (y compris au détriment de ses alliés européens), il est en train de réaliser le rêve de Donald Trump : restaurer la grandeur économique des États-Unis. En soutenant à fond l’Ukraine, il aura même réussi à laver l’humiliation du départ des troupes américaines d’Afghanistan.

Et comme le fait remarquer Jean-Baptiste Noé, rédacteur en chef de la revue Conflits, l’arrivée du président ukrainien à Washington (et non pas à Paris, Londres ou Bruxelles) montre bien que le déplacement de Zelenski, c’est en quelque sorte le vassal qui se rend chez son seigneur. Comme il le dit si bien, cette première visite à l’étranger du président ukrainien montre bien que l’on est dans une guerre États-Unis contre Russie via l’Ukraine interposée. Même si cette guerre coûte de l’argent aux États-Unis, ces derniers vont la noyer dans l’inflation, comme le dit Jean-Baptiste Noé, mais surtout cela ne leur coutera aucune vie humaine, c’est je le cite “une manière très habile de faire la guerre, d’avoir des succès, sans n’avoir aucun mort à déplorer”. Surtout, c’est une manière de montrer à la Chine ce qui pourrait se passer en cas d’attaque de Taïwan.

Donc, oui, le grand gagnant économique et géopolitique de l’année 2022, ce sont les États-Unis.

En revanche, la Chine, présentée comme ayant bien géré le covid, ce pays qui est sorti avant nous de la crise sanitaire est aujourd’hui justement rattrapé par sa politique de “zéro-Covid”. À force de boucler des villes entières dès qu’un cas de covid se présentait, la croissance chinoise est tombée cette année à 3%. C’est du jamais vu depuis l’époque de Mao ! L’Américain Jamie Dimon, le patron de JP Morgan, la plus importante banque au monde, l’a encore rappelé à ses compatriotes : “Je dis souvent aux Américains, prenez du recul, nous avons des ressources agricoles, de l’eau, de l’énergie, des voisins avec lesquels nous entretenons de bonnes relations, et nous avons des alliés fidèles. Les Chinois, eux, ont comparativement de nombreux défis : pas assez de ressources agricoles ou hydriques, de la corruption, 400 millions de personnes dans une situation de pauvreté, ils doivent importer 11 millions de barils de pétrole par jour pour l’économie. Et pour ne rien arranger, ils entretiennent des relations compliquées avec leurs voisins : les Philippines, le Japon, la Corée, l’Indonésie, le Vietnam, l’Afghanistan, le Pakistan, l’Inde et la Russie.”

Bref, vous l’avez compris, la Chine est plutôt la perdante de l’année 2022, exactement comme son allié russe. Les experts s’attendent à deux millions de morts en Chine du fait de la levée de la politique de “zéro-Covid” et comme les citoyens se terrent chez eux, par peur d’attraper le covid, ils consomment moins, les usines tournent au ralenti et un jeune Chinois sur cinq est au chômage.

Nous, en Europe, nous risquons d’avoir un souci pour trouver du paracétamol, car la Chine fabrique 50% du paracétamol mondial et certains experts craignent qu’en raison de la vague d’épidémie actuelle, les autorités chinoises réquisitionnent ce produit pour le donner en priorité à sa population.

Vous le voyez, les apparences sont souvent trompeuses : les gagnants et les perdants de l’année 2022 ne sont pas ceux que l’on croyait être il y a quelques mois à peine. C’est une leçon de modestie, y compris pour les experts.

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