Le Venezuela suspendu du Mercosur, Caracas refuse

Nicolas Maduro. © Belga

Les quatre pays fondateurs de la communauté économique du Mercosur – Argentine, Brésil, Paraguay et Uruguay – ont suspendu leur cinquième partenaire dans ce bloc, le Venezuela, pour non-respect de la charte de l’organisme, une décision rejetée par Caracas.

Selon une source au sein du gouvernement brésilien, s’exprimant jeudi auprès de l’AFP sous couvert d’anonymat, les quatre pays ont adressé au Venezuela un “courrier” lui notifiant que ses droits au sein du Mercosur étaient “suspendus”.

Cette décision intervient à l’expiration de l’ultimatum de trois mois lancé en septembre aux autorités de Caracas pour qu’elles adaptent leur législation à la charte du marché commun sud-américain.

Les ministres des Affaires étrangères des quatre pays fondateurs ont “rédigé des rapports concluant que le Venezuela n’a pas respecté ses engagements”, a expliqué cette source. “Par conséquent, ils lui ont adressé un courrier lui notifiant que ses droits sont suspendus”.

“Le Venezuela ne reconnait pas cette décision” venue de “fonctionnaires qui détruisent le Mercosur”, a réagi vendredi la ministre vénézuélienne des Affaires étrangères, Delcy Rodríguez, sur son compte Twitter.

Le Mercosur n’a pas encore annoncé officiellement sa décision, probablement parce qu’elle n’a “pas encore été” reçue formellement par Caracas.

La suspension du Venezuela du Mercosur était dans l’air depuis que les quatre pays fondateurs avaient bloqué en septembre l’accès de Caracas à la présidence semestrielle du bloc sud-américain. Ces pays avaient alors décidé d’assumer collégialement cette présidence tournante.

‘Une décision naturelle’

Ils avait exhorté le président vénézuélien Nicolas Maduro à se conformer, avant décembre, à toutes les règles d’adhésion au Mercosur, comme la libre circulation des marchandises et la “clause démocratique”.

La suspension du Venezuela “est une décision naturelle qui était attendue”, a ajouté la source interrogée par l’AFP.

“Quand un pays signe un accord international, il doit se plier à la législation interne ou formuler des réserves, et le Venezuela n’a pas exprimé de réserves”, avait anticipé le 21 novembre le ministre paraguayen des Affaires étrangères, Eladio Loizaga.

Son homologue vénézuélienne avait pourtant indiqué mardi dans une lettre à ses homologues que Caracas était prêt à adhérer à l’un des accords commerciaux en attente, relatif aux barrières douanières communes et à la libre circulation des biens.

“Nous n’en sortons pas et on ne nous en sort pas”, avait-elle commenté, lançant “un appel aux peuples des capitales du Mercosur à défendre le Venezuela, parce que cela veut dire défendre les plus grands idéaux d’intégration, d’union et de coopération”.

Sur Twitter, jeudi soir, Delcy Rodríguez avait dénoncé “l’agression et l’hostilité” manifestée contre son gouvernement et son pays: “Nous demandons aux pays qui fragilisent le Mercosur qu’ils s’abstiennent de quelque mesure que ce soit contre notre pays”.

Le ministère vénézuélien des Affaires a annoncé une conférence de presse ce vendredi, sans préciser si le thème des débats serait cette suspension du Mercosur.

‘Dérives autoritaires’

Les tensions entre le gouvernement bolivarien de M. Maduro et ses partenaires régionaux se sont fortement dégradées au fur et à mesure que le régime se raidissait face à ses opposants et que des gouvernements libéraux de centre-droit arrivaient au pouvoir dans la région.

D’abord en Argentine, où Mauricio Macri a remporté les élections fin 2015, puis au Brésil, poids lourd diplomatique de la région, où Michel Temer a remplacé fin août la présidente de gauche Dilma Rousseff, destituée par le sénat.

Le nouveau gouvernement brésilien a fortement durci le ton sur les “dérives autoritaires” du régime Maduro, dénonçant ses “atteintes au droit de l’homme” et la persécution de ses opposants.

Le Venezuela, en pleine crise politique et économique, a perdu un à un ses alliés au sein du Mercosur et se trouve désormais isolé.

Il avait intégré le Mercosur sous la présidence d’Hugo Chavez en 2012, alors que le Brésil, l’Argentine et l’Uruguay étaient gouvernés par des alliés.

La suspension du Venezuela n’aura aucune conséquence sur les négociations laborieuses entre le Mercosur et l’Union européenne en vue d’un accord commercial, car Caracas ne faisait pas partie de cet accord et ne participait pas aux négociations.

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