Le Rhin à sec: des conséquences déjà visibles sur l’économie allemande

Les barges qui transitent par le fleuve ne sont plus remplies qu'à 25 ou 35% de leur capacité. © Belgaimage

Environ 10% des marchandises allemandes sont transportées par le fleuve. Mais ce sont les 10% qui comptent: minerai, houille, pétrole, gaz… Et on sait que si l’économie allemande s’enrhume, l’économie belge tousse.

Les problèmes s’accumulent pour l’économie allemande, et plus spécialement son industrie. Dépourvues d’alternative face à la fermeture de l’approvisionnement de gaz russe, affaiblies par la forte baisse de la croissance de la Chine qui est une grande cliente, les entreprises doivent affronter un problème supplémentaire: la baisse inquiétante du niveau du Rhin.

Cette artère vitale pour l’Allemagne connaît une nouvelle période de sécheresse: à la mi-août, on a failli devoir suspendre la navigation. La pluie de ces derniers jours a permis de remonter le niveau de quelques centimètres mais l’étiage est toujours entre 30 et 50% en dessous de la moyenne historique pour la saison. Et avec le changement climatique, les prévisions pour les années à venir ne sont pas réjouissantes.

Certes, il est actuellement toujours possible de naviguer. Mais pour pouvoir emprunter le fleuve, les barges ne sont remplies qu’à 25 ou 35% de leur capacité. “Cela signifie qu’il faut faire trois ou quatre transports plutôt qu’un seul. Cela engorge un fleuve déjà difficilement navigable et augmente le coût des transports, souligne l’économiste en chef de CBC, Bernard Keppenne. Aujourd’hui, le Rhin est proche des niveaux historiquement bas qui avaient été enregistrés en 2018 (lorsque la navigation avait été interrompue pendant près de deux mois en automne, Ndlr). La sécheresse du Rhin avait alors amputé de 0,4% la croissance du PIB allemand sur l’ensemble de l’année.”

Effets en cascade

Le Rhin, qui court sur près de 1.300 km, est un axe stratégique. On estime qu’il accueille 10% des marchandises transportées en Allemagne. Mais c’est le dixième qui compte: ce sont les livraisons de charbon pour les centrales électriques, de houille et de minerai pour les hauts-fourneaux, de pétrole, de gaz… La sécheresse a déjà obligé Shell à réduire la production d’une de ses raffineries, et une centrale électrique au charbon du groupe Uniper a elle aussi été obligée de tourner au ralenti. Ces produits énergétiques et matières premières fournissent les géants industriels comme Thyssen Krupp et BASF. “Si les producteurs d’énergie et les métallurgistes réduisent leur production, cela va avoir un impact sur l’industrie automobile, etc. Et il y aura des effets en cascade“, poursuit Bernard Keppenne.

Cet impact souligne aussi le manque d’investissement dans les infrastructures et ailleurs, dont l’Allemagne souffre depuis des années. “Il montre très clairement, en dehors de la guerre en Ukraine, la grande fragilité de l’économie allemande et l’absence de réflexion que le pays aurait dû avoir sur son modèle de développement.”

La sécheresse du Rhin pourrait réduire de 0,2 à 0,3% la croissance allemande, déjà très faible. Ce lundi, la Bundesbank, la banque centrale allemande, a averti que cet hiver, “la probabilité d’une récession est de plus en plus forte”. Et s’il y a une récession en Allemagne, pour Bernard Keppenne, “la Belgique sera directement impactée ; on peut malheureusement penser que nous aurons alors aussi une récession en Belgique”.

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