Le PIB est-il encore pertinent ?

Image d'illustration © istock

PIB comme “problème” intérieur brut? L’instrument universel de mesure de la croissance est remis en question à Davos, où l’on doute de sa capacité à véritablement fournir un instantané des ressources d’un pays.

Le produit intérieur brut (PIB) est un instrument universel de mesure de la croissance ou de repli d’une économie. Mais certains intervenants au Forum économique mondial de Davos (Suisse) se demandent si cet indicateur n’a pas fait son temps.

“Il y a un sentiment grandissant que le type de statistiques que nous avons utilisé par le passé ne fonctionnent tout simplement plus”, a expliqué l’économiste britannique Diane Coyle, professeur à l’Université de Manchester, lors d’un entretien à avec l’AFP dans la station de ski huppée.

Elle défend l’idée que de nouveaux critères pourraient être incorporés pour mieux refléter l’évolution des richesses d’un pays, face aux grands décideurs économiques et politiques réunis en Suisse.

L’économiste évoque par exemple le capital humain, pour rendre compte entre autres du niveau d’éducation, des infrastructures, de la qualité de l’environnement; ou encore le “capital social”, qui permettrait entre autres de jauger si un pays est uni ou divisé.

Diane Coyle mentionne également le “capital intangible” pour intégrer les données numériques et les brevets.

L’exemple Wikipedia

Quantifier la valeur des données numériques est une question urgente, comme le montre l’exemple Wikipedia, souvent utilisé.

L’encyclopédie participative en ligne a, dans les modèles comptables traditionnels utilisés pour le PIB, une valeur quasiment nulle.

“Nous devons trouver un autre mécanisme pour inclure une part plus conséquente de la population et des paramètres différents pour mesurer le succès d’une nation”, a jugé Inga Beale, la patronne du Lloyd’s, le marché d’assurance britannique, sur la chaîne CNBC.

Créé en 1934 par l’économiste américain Simon Kuznets pour permettre d’évaluer les progrès des États-Unis dans la sortie de crise après la Grande Dépression, le PIB mesure la valeur totale des biens et services créés à la fin de chaque trimestre et de chaque année.

Il rend compte aussi bien de la croissance que de la récession, définie comme deux trimestres successifs de repli.

Utilisé universellement, il permet aux pays de se mesurer entre eux.

Mais il ne rend pas compte de la répartition des richesses dans un pays. Il peut en effet gonfler grâce par exemple à de riches ressources pétrolières, sans pour autant que la croissance bénéficie à l’ensemble de la population.

Cette question est revenue sur le devant de la scène avec la montée du populisme, sur fond de mécontentement quant au partage des fruits de la croissance.

Autre écueil important: il ne tient pas compte du marché noir, passant sous silence des pans parfois substantiels de ressources et de revenus.

‘Respirer l’air de Pékin’

Dans les milieux universitaires, le PIB fait aujourd’hui l’objet de critiques, jusque sous la plume de Prix Nobel de l’économie comme Joseph Stiglitz ou Amartya Sen.

Une des questions de fond est de savoir si le PIB encourage la croissance à tout prix, au détriment des ressources à long terme, et au risque de piller la nature.

La Chine par exemple a connu une phase d’expansion spectaculaire, se hissant au rang de deuxième plus grande économie mondiale à l’aune du PIB.

Mais “il suffit d’aller respirer l’air à Pékin pour en mesurer le coût”, critique Diane Coyle.

Même le président Xi Jinping entend désormais privilégier la qualité de la croissance.

Alors comment tenir compte du réchauffement climatique, de l’épuisement des ressources naturelles ou de la fracture sociale?

Signe des temps, les organisateurs du Forum économique mondial, un rendez-vous acquis à la cause du capitalisme libéral, ont publié cette semaine une étude mettant en avant un indice de développement inclusif (IDI).

Cet indice examine 103 pays sous l’angle du développement, de l’inclusion et de l’équité intergénérationnelle.

Sous cet angle, la Norvège se hisse au sommet des pays les plus riches, suivie par l’Islande et le Luxembourg.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content