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Le parti communiste chinois a 100 ans

Lire la chronique de Thierry Afschrift Professeur ordinaire à l'Université libre de Bruxelles.

La Chine demeure une dictature, et même ses milliardaires, désormais nombreux, vivent une vie qui dépend entièrement du bon vouloir des hiérarques du Parti.

Avec son faste habituel, caractéristique des régimes totalitaires, le Parti communiste chinois fête actuellement ses 100 ans d’existence. Ce n’est pas le parti le plus ancien du monde et il est, par exemple, dépassé dans ce domaine par le Parti socialiste belge, créé en 1885. Mais le PCC s’est montré beaucoup plus efficace, si l’on peut dire: sur ses 100 années d’existence, il a exercé le pouvoir pendant 72 ans, soit depuis 1949, et ce sans partage. Et il l’a fait d’une manière particulièrement autoritaire, n’hésitant jamais à recourir à chacune des méthodes courantes dans les dictatures (exécutions sommaires, camps de concentration, jugements politiques, police secrète ultra-puissante) pour imposer la terreur. Les exactions sont tellement multiples que l’on a du mal à les dénombrer, quelque part entre 50 et 100 millions de morts …

La Chine demeure une dictature, et même ses milliardaires, désormais nombreux, vivent une vie qui dépend entièrement du bon vouloir des hiérarques du Parti.

Au départ, cette terreur s’est doublée, comme dans tous les Etats communistes, d’une misère quasi absolue. L’introduction forcée des méthodes communistes, aussi inefficaces qu’inhumaines, a affamé les populations, anéanti une bonne partie de la production industrielle – ramenée en outre à un niveau de très faible qualité – et multiplié le nombre de personnes dépendant de l’Etat, c’est-à-dire du Parti, devenu du même coup d’autant plus puissant.

Il en fut ainsi jusqu’aux réformes introduites dès les années 1980 par un des successeurs de Mao, Deng Xiaoping. Celui-ci a, de fait, autorisé l’expansion de l’entreprise privée, allant jusqu’à prononcer des termes (“enrichissez-vous!”) qu’aucun dirigeant occidental n’oserait aujourd’hui énoncer.

Il s’en est suivi une expansion économique sans précédent, accrue par la quasi-inexistence, au départ, de lois sociales ni, en général, de dispositions protégeant les travailleurs ou l’environnement. Bref, ce que la gauche occidentale aujourd’hui qualifierait de “capitalisme sauvage”. Sauvage mais redoutablement efficace lorsqu’on voit qu’en 2021, la Chine, anciennement sous-développée, n’est pas loin d’atteindre le PIB global des Etats-Unis (qui reste évidemment très supérieur si l’on prend le PIB par habitant).

Ce régime n’est plus le communisme. Il se rapproche en revanche de certains systèmes plus proches de l’extrême droite, autorisant parfois (mais pas toujours) certaines formes d’initiative privée tout en conservant le système autoritaire et les méthodes répressives qui sont nécessaires à son soutien. Parce que la Chine demeure une dictature et que même ses milliardaires, désormais nombreux, vivent une vie qui dépend entièrement du bon vouloir des hiérarques du Parti qui, lorsque le besoin s’en fait sentir ou qu’ils y voient un intérêt, leur rappellent brutalement les vieux principes communistes. Le célèbre Jack Ma, fondateur et patron d’Alibaba, a récemment dû comprendre que toutes les fortunes, voire les vies, sont fragiles lorsqu’on croit pouvoir ignorer le Parti.

Même Hong Kong, libre pendant toute la durée du régime maoïste, est désormais presque entièrement tombée sous le joug des dirigeants de Pékin qui ne doivent leurs fonctions qu’au Parti et non aux électeurs.

La réussite économique du système et son ordre public parfois enviable ne devraient pas en faire un modèle pour nous. Or, son système de surveillance de masse est copié en Europe et aux Etats-Unis, sans le dire. Et certains de nos meilleurs économistes vantent “l’Etat stratège” dont le PCC est un des meilleurs exemples. A méditer: les stratèges doivent se faire obéir…

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