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“Le pari de la Commission européenne sur l’hydrogène vert”

Ce n’est pas encore une réalité quotidienne mais ce n’est déjà plus de la science-fiction. Des bus et des taxis roulent à l’hydrogène et la Commission européenne a décidé de faire de cette source d’énergie l’un des leviers essentiels de la transition écologique. Elle a présenté, en ce début du mois de juillet, une ambitieuse alliance hydrogène vert impliquant des investissements évalués de 180 et 470 milliards d’euros d’ici 2050.

Cette initiative mérite d’être saluée à plus d’un titre. D’abord parce qu’elle illustre le concept d’Etat-stratège, remis à l’honneur avec la crise du coronavirus. S’en remettre aux seules lois du marché ne suffit pas pour veiller à l’efficacité à long terme du tissu économique, en l’occurrence pour décarboner notre économie et limiter ainsi les effets du réchauffement climatique. L’un des grands intérêts de l’hydrogène, c’est en effet d’apporter une possibilité de stockage de l’énergie. Il peut être produit par électrolyse de l’eau, en utilisant les périodes où les panneaux photovoltaïques et les éoliennes produisent plus d’électricité que nécessaire. Inconvénient : ce processus coûte très cher et le rendement énergétique est faible (plus de 50% de déperdition). Il ne peut donc se développer qu’avec une intervention publique, tant pour cofinancer les investissements que pour fixer le cap à long terme dont les entreprises ont besoin. A une plus petite échelle, c’est ce que la Wallonie fait avec le projet de construction d’une usine de recyclage des plastiques usagés. Il a été initié par les pouvoirs publics, après le refus de la Chine de continuer à traiter ces déchets, et semble séduire des groupes internationaux. Le projet pourrait se concrétiser d’ici la fin de l’année.

Mais revenons à l’hydrogène vert. La Commission a eu l’intelligence d’assortir son cap d’une feuille de route, avec des progrès dans la production d’hydrogène vert à enregistrer dès 2024 et 2030. On s’offre ainsi la possibilité de rectifier rapidement le tir en fonction des évolutions technologiques et scientifiques. Enfin, les pouvoirs publics n’ont pas produit une réflexion en chambre mais ils ont veillé à embarquer les entreprises avec eux au sein d’une ” Alliance pour l’hydrogène vert “. Celle-ci réunit ceux qui produiront cette énergie, ceux qui la transporteront et ceux qui l’utiliseront. L’objectif est bien de bâtir toute une filière industrielle autour de l’hydrogène afin de réduire notre dépendance vis-à-vis du reste du monde. Une analyse de Morgan Stanley pointe notamment les retombées potentielles importantes pour l’industrie ferroviaire, des TGV alimentés à l’hydrogène remplaçant les avions pour les déplacements intra-européens. Cela profiterait à un groupe comme Alstom.

Une fois n’est pas coutume, la Belgique avait anticipé le chantier. En mars dernier, le SPF Economie a invité les entreprises à manifester leur intérêt pour les grands projets relatifs à l’hydrogène vert. Une vingtaine de sociétés y avaient répondu. Aucun nom n’est officiellement cité mais on imagine volontiers que les DEME, Colruyt et Fluxys, qui ont déjà présenté des projets de construction d’usine de production d’hydrogène vert, en font partie. De même que John Cockerill, producteur d’hydrolyseurs et partenaire de projets à plus petite échelle à l’aéroport de Liège. De quoi compenser, on l’espère, l’attentisme politique et l’absence d’un plan de relance digne de ce nom dans notre pays alors que les Pays-Bas, le Portugal et la France sont dans les starting-blocks et que l’Allemagne projette d’investir de 7 à 12 milliards d’euros dans le développement de l’hydrogène vert.

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