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Le Diable, les croquettes pour chien et le pouvoir d’achat

Depuis la guerre en Ukraine, les politiques et les médias n’ont qu’un mot à la bouche, ou plutôt deux et c’est “pouvoir d’achat”. Chacun y va de sa ritournelle pour nous dire comment le protéger. Oui, quand le pouvoir d’achat va mal, ou risque d’aller mal, il n’y a pas de petites économies.

Je dédie donc cette chronique aux jeunes et aux ménages les plus fragilisés en leur disant qu’ils doivent se méfier comme de la peste des abonnements car mine de rien, ces abonnements supposés indolores leur coûtent plusieurs centaines d’euros par an. Je vise bien entendu les abonnements aux sites de streaming vidéo comme Netflix, Amazon Prime ou Disney +. Je vise aussi les abonnements aux streaming audio comme Spotify ou Deezer. Je vise les abonnements aux jeux vidéo, voire même des abonnements pour se faire livrer du café chez soi. Tous ces abonnements participent à un phénomène récent, et leur coût s’ajoute à ce que les économistes appellent les dépenses contraintes (c’est-à-dire les loyers, les remboursements de prêts hypothécaires, l’abonnement au gaz et à l’électricité, les assurances, les frais de transports et j’en oublie certainement).

Bref, ce sont des dépenses contraintes, dans le sens où il faut les payer quoiqu’il arrive, raison pour laquelle, le budget des jeunes est aujourd’hui de plus en plus vulnérable face à la multiplication de ces abonnements annexes. D’ailleurs, cette tendance ne grève pas que les budgets des jeunes ou des ménages les moins aisés, si vous prenez une famille de la classe moyenne avec plusieurs adolescents qui ont des goûts différents, vous êtes partis pour 6 ou 7 abonnements sans difficulté. L’objet de cette chronique n’est pas d’interdire ces abonnements ou d’empêcher les jeunes d’avoir accès aux “loisirs à domicile”, non, c’est juste de leur dire qu’ils doivent faire le tri.

Mes confrères du Figaro ont repéré une étude, en France, qui montre qu’en plus de la multiplication de ces abonnements, 44% des jeunes Français interrogés ont aussi des abonnements “fantômes”, autrement dit, des abonnements qu’ils ont payés mais qu’ils n’utilisent pas. C’est souvent le cas des abonnements pour des salles de fitness, et cet oubli est souvent favorisé par le système marketing du premier mois gratuit qui aboutit le plus souvent à ce qu’on oublie de résilier son abonnement passé ce premier mois. Les jeunes doivent garder à l’esprit que si le communisme utilise la propagande pour séduire les foules, le capitalisme, lui, utilise la publicité. A chacun son arme.

Sauf qu’au-delà du pouvoir d’achat, l’objet de cette chronique est aussi de montrer que nous sommes entrés dans une économie de l’abonnement à notre insu. S’inspirant de Netflix ou du monde de la presse, les industriels et les banquiers usent et abusent de ce nouveau mode de consommation : pensez aux croquettes pour chien, aux couches, aux capsules de café, aux livraisons de repas à domicile, aux placements financiers, aux vélos électriques, aux boxes de vin, etc.

Et devinez quoi, ce qui a favorisé l’essor de ce qu’on pourrait appeler la “netflixisation” de nos économies, c’est le COVID-19. En étant enfermés chez nous, nous avons changé d’habitudes de consommation. Le consommateur plébiscite aujourd’hui l’abonnement, autrement dit, il préfère la location à la propriété, et bonne pâte, le consommateur pense qu’il est libre. En réalité, comme le géant Gulliver, il ne se rend pas compte qu’il est prisonnier de multiples petits liens – il parait que la ruse suprême du Diable, c’est de faire croire qu’ils n’existent pas – nous y voilà !

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