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La voiture électrique, miroir aux alouettes ?

Lire la chronique d' Amid Faljaoui Amid Faljaoui, directeur des magazines francophones de Roularta.

L’interview choc de ce début d’année, en tout cas celle qui m’a le plus intéressée, c’est celle de Carlos Tavares, le patron du groupe automobile Stellantis.

Stellantis est le nom du groupe qui chapeaute d’un côté les marques Peugeot-Citroën et de l’autre côté, Fiat et Chrysler. Au total, Carlos Tavares gère 14 marques automobiles et plutôt avec brio. En principe, quand il prend la parole sur le secteur automobile, les experts l’écoutent, car il sait de quoi il parle. Dans sa dernière interview accordée à 4 médias européens, il parle sans langue de bois.

La première chose qu’il dit, c’est que le choix d’arrêter la vente des moteurs thermiques en Europe à partir de 2035 est un choix politique et pas industriel. Selon lui, c’est une erreur de mettre une telle pression sur l’industrie automobile qui reste le premier employeur en Europe. Il y avait d’autres solutions moins chères et plus rapides pour diminuer l’impact carbone du secteur automobile, il pense notamment à la voiture hybride.

Sa deuxième attaque concerne le prix des voitures électriques : il rappelle que le coût des technologies électriques est 50% plus cher que celui des voitures thermiques et il précise que pour amortir ce coût, le secteur automobile devra faire des gains de productivité de 10% par an alors que ce secteur enregistre en moyenne des gains de productivité de 2 à 3% par an seulement. Donc, pour Carlos Tavares, c’est simple, la classe moyenne risque de ne pas pouvoir se payer une voiture électrique de 30.000 euros. En filigrane, quand il dit que les gains de productivité devront passer de 3% par an à 10% par an, comprenez que l’industrie automobile va encore plus automatiser ses processus de fabrication. Il y aura donc de la casse sociale à la clé.

Carlos Tavares ajoute que l’Etat sera encore sollicité pour subsidier ces voitures électriques, ce qui creusera plus le déficit de l’Etat et donc la dette publique.

Enfin, Carlos Taveres explique qu’une voiture électrique doit rouler au moins 70.000 kilomètres pour compenser l’empreinte carbone liée à la fabrication de sa batterie. Bref, vous l’avez compris, c’est une attaque de front contre la politique énergétique européenne.

Est-ce qu’il exagère ? Les plus optimistes diront oui, car lorsque les voitures à cheval ont cédé la place aux voitures thermiques, les boulots de cocher et de palefrenier ont disparu et ce sont uniquement les riches de l’époque qui pouvaient s’acheter une voiture thermique. Mais avec le progrès technique, la voiture a été rendue accessible à tous après quelques décennies. Mais la mentalité d’aujourd’hui n’est plus la même. Imagine-t-on sérieusement qu’une partie importante de la population va devoir patienter 10 ou 15 ans avant de s’acheter une voiture électrique convenable ? Qui va payer cette transition et amortir le coût social des pertes d’emplois du secteur ?

Au fond, la question que pose le patron de Stellantis aujourd’hui est très claire : la voiture électrique n’est-elle pas le miroir aux alouettes de la transition énergétique ?

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