La Russie fait défaut sur sa dette extérieure

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Techniquement mis dans l’impossibilité de verser les intérêts représentant environ 100 millions de dollars dus le 25 mai, Moscou a été mis en défaut de paiement.

Une première depuis 1918

La Russie a été mise ce lundi en défaut de paiement sur sa dette extérieure, celle qui est libellée en devises étrangères. C’est une première depuis 1918. La Russie avait été déclarée en défaut en 1998, mais c’était sur sa dette intérieure, libellée en roubles. Le pays avait aussi été obligé de déclarer un moratoire sur le paiement de sa dette extérieure à ce moment.

Mais que se passe-t-il aujourd’hui ?

“La Russie avait à payer, le 27 mai, des coupons, donc des intérêts, pour 29 millions d’euros sur des obligations émises en euros, et pour 71 millions de dollars sur des obligations émises en dollars. Ensemble, ces paiements d’intérêts représentent à peu près 100 millions de dollars, explique Eric Dor, directeur des études économiques à l’IESEG School of Management.

“Normalement, poursuit-il, le paiement des coupons par la Russie aux investisseurs occidentaux doit suivre une procédure bien précise. La banque russe du gouvernement russe doit envoyer l’argent des coupons à une banque correspondante sur le territoire d’un pays occidental. Cette banque correspondante envoie alors l’argent des coupons à la banque qui a été désignée par le contrat d’émission obligataire comme l’agent payeur. Ensuite cette banque agent payeur envoie l’argent des coupons à une chambre de compensation. Cette chambre de compensation peut alors envoyer l’argent des coupons aux différentes banques dépositaires de titres, chez qui sont stockées les obligations détenues par les investisseurs. Ces banques dépositaires de titres paient alors les coupons aux investisseurs. Au départ, bien que des sanctions aient été promulguées contre la Russie, ses paiements des coupons aux investisseurs occidentaux ont été possibles parce que les autorités américaines compétentes, l’OFAC, avait accordé une dérogation aux banques et organismes financiers des États-Unis pour participer aux paiements d’intérêt ou principal sur les obligations russes, jusqu’au 25 mai.”

Impossibilité de payer

Mais l’OFAC n’a pas prolongé cette dérogation après le 25 mai. La Russie avait néanmoins encore un mois pour payer ses intérêts sur sa dette avant d’être vraiment déclarée en défaut, mais n’a pas réussi à trouver de solution, puisqu’il est désormais interdit aux banques correspondantes, aux agents payeurs, aux chambres de compensation ou aux dépositaires de participer au paiement en recevant l’argent provenant du gouvernement russe, explique encore Éric Dor.

Ce défaut est donc la conséquence d’une coupure de la Russie du système financier, et non d’un manque d’argent dans les caisses. C’est ce qui a fait dire au ministre russe des Finances que ce défaut de paiement était “une farce”.

Voilà pour l’explication technique.

Pour les conséquences, elles sont de plusieurs ordres. D’une part, pour les détenteurs de la dette russe, qui pour la plupart adoptent une attitude attentiste. La dette extérieure russe pèse environ 450 milliards de dollars actuellement.

Il y a aussi des effets sur les CDS (credit default swap), des instruments permettant d’être remboursé en cas de défaut de paiement. Ces CDS couvrent environ 1,5 milliard de dollar de dette russe.

Et il y a la conséquence à plus long terme. On l’a vu par le passé, avec la Russie en 1998 mais aussi l’Argentine au début des années 2000, un pays défaillant met pas mal de temps à reconquérir la confiance des investisseurs étrangers et entretemps il ne peut compter que sur les investisseurs locaux pour couvrir ses besoins financiers.

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