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La prochaine réforme fiscale est déjà ratée

Lire la chronique de Thierry Afschrift Professeur ordinaire à l'Université libre de Bruxelles.

L’idée de base – toujours la même dans ce pays – est que si l’on réduit un impôt quelque part, il faut au moins en augmenter un autre dans la même proportion, et de préférence plus.

Parmi les ambitions du gouvernement dit “Vivaldi” figure celle de réaliser une “grande” réforme fiscale de l’impôt des personnes physiques. La déclaration gouvernementale ne contenait guère de détails significatifs à ce sujet.

La majorité parlementaire contre-nature, alliant la gauche et l’extrême gauche, d’une part, à des partis plus ou moins libéraux d’autre part et à des chrétiens démocrates flamands qui louvoient sans cesse entre ces deux branches, n’a déjà réalisé que des compromis boiteux sur d’autres sujets, comme le nucléaire, et paraît décidément à bout de souffle au moment où elle doit faire face à son projet le plus complexe.

Le ministre des Finances, Vincent Van Peteghem, ne propose rien à ce jour. Ce politicien CD&V dont le curriculum vitae ne mentionne aucun lien avec les questions fiscales a hérité, comme les nombreux “fils de…” de la politique belge, de sa fonction de bourgmestre de la riante commune De Pinte et de son mandat de député. D’après un dernier sondage, son parti est en chute libre dans l’opinion flamande, au point que le président a démissionné. Jusqu’ici, la politique du ministre a consisté à s’en prendre systématiquement aux droits des contribuables et à augmenter les pouvoirs de l’administration, en jouant surtout sur les règles de procédure très nettement durcies. C’est causer un préjudice considérable pour le futur aux droits des individus face à l’Etat, même si en soi, ces réformes n’augmentent pas immédiatement les impôts.

La seule chose sur laquelle les partis gouvernementaux semblent d’accord, c’est sur l’idée qu’il faut enfin réduire les charges fiscales et sociales qui pèsent sur les revenus professionnels. La question paraît évidente puisque dans ce domaine, la Belgique est le pays le plus taxé au monde. Mais jusqu’ici, le gouvernement n’a rien réalisé en la matière et a même aggravé la situation en taxant plus lourdement l’avantage de toute nature résultant de la mise à disposition d’une voiture. Parce que oui, ce ne sont pas les voitures mais les travailleurs qui payent ces impôts.

A part cela, on se contente, au 12 rue de la Loi, de laisser sortir des “fuites” de rapports dont on ne peut même pas certifier s’ils existent, et qu’en tout cas personne n’a jamais lus. Il y a eu un avis d’une commission présidée par le professeur Mark Delanote, non assumé par le ministre, puis un rapport préliminaire du conseil supérieur des Finances, que plus personne n’attendait et dont on fait citer quelques extraits dans la presse sans jamais s’assurer de leur authenticité… puisque le rapport n’est pas publié. Autant de ballons d’essai pour brouiller le débat. Des petits jeux politiciens bien belges mais qui ne font pas avancer la discussion.

En gros, l’idée de base – toujours la même dans ce pays – est que si l’on réduit, même de manière marginale, un impôt quelque part (en l’occurrence sur les revenus du travail), il faut au moins en augmenter un autre dans la même proportion et de préférence plus. D’où ces idées d’augmentation de la TVA (une bonne manière d’encore augmenter l’inflation! ) ou de taxation des loyers réels ou des plus-values immobilières. Sans se rendre compte que si les propriétaires sont davantage taxés, ils investiront moins (notamment dans le domaine des économies d’énergie), ne construiront plus ou augmenteront les loyers. Une politique qui conduira soit à la crise du logement, soit à la réduction du pouvoir d’achat des locataires, et sans doute aux deux.

De peu brillantes perspectives à un moment où il faudrait se rendre compte que, tout simplement, l’Etat dépense trop et taxe trop.

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