La politique wallonne de soutien à l’agriculture bio “manque de vision”

La politique de soutien de la Wallonie à l’agriculture biologique “souffre d’un manque de vision à moyen et long terme” et “relève davantage de l’accompagnement que d’une orientation forte du développement futur de l’agriculture biologique”, estime la Cour des comptes dans un rapport publié jeudi.

L’agriculture biologique a le vent en poupe depuis plusieurs années en Wallonie. Ce mode de production recouvre désormais près de 12% des superficies agricoles au sud du pays, la Wallonie comptant, au 31 décembre 2019, 1.816 fermes bio, soit une ferme sur sept.

En 2013, le gouvernement wallon avait adopté un plan stratégique de développement de l’agriculture biologique (PSDAB) qui fixait une série d’objectifs chiffrés pour 2020 et notamment d’atteindre la barre des 2.000 exploitations agricoles certifiées bio fin 2020 ainsi qu’une part de 18% de la surface agricole utile consacrée à ce type d’agriculture.

Si ce plan constitue une “avancée importante dans la structuration du soutien apporté par la Région wallonne à l’agriculture biologique”, reconnaît la Cour des comptes, il n’a pas permis d’atteindre plusieurs de ses objectifs. Il n’a pas non plus fait l’objet d’une évaluation, ce qui empêche de déterminer son impact sur le développement des filières bio en Wallonie. “Il est donc impossible d’isoler les effets du plan de la tendance structurelle du marché bio”, estime la Cour des comptes.

Le plan adopté en 2013 “ne repose pas sur un état des lieux précis des forces et faiblesses de l’agriculture wallonne” et ignore le fait que, pour une part significative, l’agriculture wallonne n’est pas orientée vers l’alimentation humaine et qu’elle transforme peu ses productions, relève-t-on encore.

“De même, le dispositif de la politique publique ne prend pas en compte les évolutions de la demande selon les catégories de produits. Cela se répercute notamment dans la répartition des primes de la PAC, qui ne correspond pas aux productions permettant de répondre à la demande des consommateurs”, pointe la Cour des comptes.

Pas d’intégration de politiques pourtant proches

Dans son rapport, transmis au Parlement wallon, la Cour des comptes souligne en outre que la politique de la Wallonie en matière d’agriculture biologique “n’est pas intégrée à d’autres politiques qui lui sont pourtant proches”. Ainsi, la contribution de l’agriculture biologique à la réduction de la pollution d’origine agricole n’est pas définie.

Par ailleurs, la Cour des comptes relève une série de risques “systémiques” qui pèsent sur le développement de l’agriculture biologique wallonne, comme le risque d’un déséquilibre entre l’offre et la demande dans certaines filières ou le fait que la pérennité du soutien financier aux aides à l’agriculture biologique n’est pas assurée au-delà de 2020 dans un contexte de versements en baisse à la Wallonie au titre de la Politique agricole commune (Pac).

Enfin, la Cour des comptes pointe également des problèmes en matière de certification. Si les opérateurs bio sont contrôlés en moyenne deux fois par an par les organismes certificateurs (OC), ce qui est davantage que dans les pays européens, les OC, eux, ne sont pas suffisamment supervisés par la Wallonie. Il peut en résulter, notamment, une application non uniforme de la réglementation en matière de bio.

Quant aux importations de produits bio de l’extérieur de l’UE, un contrôle documentaire est organisé systématiquement mais pas de contrôles physiques ni de prise d’échantillons, même ponctuels. “Le risque d’importation de produits qualifiés de ‘bio’ alors qu’ils ne le sont pas est donc réel”, avertit la Cour des comptes.

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