Lire la chronique d' Amid Faljaoui
La Bourse, la bulle et l’impossibilité de pleurer
Nous sommes ou serions face à une bulle. Elle pourrait exploser d’un moment à l’autre. Sauf qu’en Bourse, le timing est crucial. Et s’il est possible de reconnaitre une bulle, il est en revanche impossible de savoir quand elle va exploser. Explications.
Récemment, on me demandait pourquoi la Bourse était quasi le seul endroit où les rendements étaient positifs. La meilleure manière de répondre, c’est maintenant, car la Bourse est sans doute dans une bulle. Bien entendu, tout le monde ne veut pas encore le reconnaitre, mais pour certains commentateurs boursiers, la bulle est là.
Vous me direz “comment le savent-ils ?” : via plusieurs indices. Le premier, c’est que les particuliers se ruent en masse sur la Bourse aux Etats-Unis et même en Europe. C’est généralement un mauvais signal. Il y a aussi la valorisation de certaines sociétés qui ne correspond à aucune réalité. C’est par exemple le cas de la société Tesla, qui a multiplié par 8 son cours durant cette année.
Mais c’est aussi le cas pour certaines sociétés qui entrent en Bourse ou vont y entrer. Prenons l’exemple d’Airbnb : cette plateforme numérique qui permet à des particuliers de loger chez d’autres particuliers est valorisée par la Bourse à hauteur de 42 milliards de dollars. Non seulement, c’est fou car à cause du virus le tourisme mondial est à l’arrêt, mais en plus Airbnb affiche déjà une perte de 700 millions de dollars pour cette année.
J’en reviens donc à la question initiale : oui, la Bourse attire les regards et surtout les liquidités car c’est l’un des rares placements – je n’ai pas dit le seul – qui procure un rendement positif. Quant aux placements les plus sûrs, ils offrent un rendement nul ou négatif. Donc oui, la Bourse attire toutes ces liquidités qui ne savent pas où aller.
Mais je disais aussi que nous sommes ou serions face à une bulle. Donc, elle pourrait exploser d’un moment à l’autre si ce scénario est juste ? Oui, sauf qu’en Bourse, le timing est crucial, comme le rappelle Marc Fiorentino. Et s’il est possible de reconnaitre une bulle, il est en revanche impossible de savoir quand elle va exploser : ça peut prendre des mois ou des années. J’ai un ami homme d’affaires d’une grande expérience qui me disait : il faut savoir vendre et pleurer. Pourquoi disait-il pleurer ? Parce que le cours risque sans doute de continuer à grimper alors que vous avez déjà vendu. Mais au moins, vous avez sécurisé vos gains. C’est vrai, mais les clients détestent vendre trop tôt, et ils détestent encore plus pleurer. Si la Bourse chute rapidement après, ils se disent qu’ils ont eu le nez fin. Et si la chute se fait attendre, ils pestent contre leur conseiller en disant que c’est de sa faute s’ils sont raté la hausse.
Voilà pourquoi les conseillers, sauf exception bien entendu, tiennent souvent des discours alambiqués, du type “je pense que, mais…” Bref, ils essaient de ne pas trop se mouiller. Ils savent qu’avoir raison trop tôt, c’est avoir tort aux yeux du client. Et c’est bien connu : le client a toujours raison !
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