Christophe De Caevel

“L’économie wallonne souffre d’un gros manque de confiance et la saga politique vient ajouter de l’incertitude à l’incertitude”

Christophe De Caevel Journaliste Trends-Tendances

Le même jour, quasiment à la même heure, l’Union wallonne des entreprises (UWE) présentait son baromètre conjoncturel et le Parlement de Wallonie décidait de se mettre à l’arrêt, le temps de clarifier une situation politique pour le moins confuse. Le lien entre ces deux actualités ? La confiance, celle qui donne de l’élan mais celle aussi qui se mérite.

Ces derniers mois, l’économie a créé de l’emploi, les exportations ont bondi et le revenu disponible des ménages a augmenté. Normalement, dans une telle situation, la consommation privée doit amplifier le phénomène et les entreprises multiplier les investissements. Or, que constate-t-on ici ? Une hausse de l’épargne, alors que celle-ci affiche pourtant un rendement proche de zéro. Les ménages et les entreprises préfèrent thésauriser plutôt que dépenser. ” Le cercle vertueux ne s’enclenche pas, déplorait Didier Paquot, le responsable du département économique de l’UWE. Il y a une crise générale de confiance, dans un monde devenu très incertain. En dépit des chiffres positifs, les acteurs économiques restent inquiets. ”

Pendant ce temps, donc, le Parlement wallon a ajouté de l’incertitude à l’incertitude en suspendant ses travaux. L’instance censée incarner la démocratie admet qu’elle ne sait pas où l’on va, qu’elle ne peut pas garantir que la Wallonie sera effectivement gouvernée jusqu’aux élections et qu’elle n’a pas de solution de rechange sous la main. Et après cela, vous voudriez que les acteurs économiques aient confiance et qu’ils regardent l’avenir avec optimisme…

Le gouvernement reporte des réformes (APE, assurance autonomie) que, la veille encore, il jugeait fondamentales pour l’avenir de la Région. Et, surtout, il refuse à l’opposition toute possibilité de l’interroger sur ses choix, renoncements ou intentions. Quand il a perdu sa majorité en décembre, au moins le Premier ministre Charles Michel a-t-il eu le cran de ne pas chercher à annuler la séance de questions d’actualité et de s’expliquer devant les parlementaires. Ici, on botte en touche et on attend que ça passe. Le gouvernement wallon se retranche derrière l’argument des ” circonstances exceptionnelles “, en l’occurrence la défection d’une députée libérale qui a choisi de rejoindre les Listes Destexhe. Il y a 20 mois, le MR et le cdH avaient fait le pari d’une coalition avec une seule petite voix de majorité. Manifestement sans la moindre anticipation de l’éventualité de voir une élue changer d’avis en cours de route. Quand celui qui tient le gouvernail n’anticipe pas les dangers, les passagers n’ont pas spécialement confiance…

” Pour réussir la transformation de l’économie, nous expliquait Marcus Dejardin (UNamur), il faut susciter l’adhésion. ” Cette adhésion passe bien entendu par un travail pédagogique sur les mesures prises et les efforts attendus des uns et des autres mais, ajoutait ce professeur d’économie, ” il ne faut pas uniquement envisager l’aspect économique, il faut aussi que le fonctionnement de la société soit perçu comme irréprochable “. Un parlement qui fuit ses responsabilités, des soupçons de fraude électorale à Neufchâteau impliquant un éminent parlementaire, avouez qu’on a déjà vu des fonctionnements plus irréprochables.

De tels comportements balaient dans l’opinion les effets positifs qu’auraient pu impulser les annonces de levées de fonds de start-up ou de l’arrivée d’un nouvel investissement chinois. Ils minent la confiance. Et si cette crise de confiance devait se matérialiser par des votes extrémistes le 26 mai, la situation pourrait être encore plus problématique demain.

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