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L’automne social. Et après ?

Nous avons eu droit à quelques escarmouches, plus ou moins spontanées, plus ou moins violentes. Voici maintenant l’heure de la contestation officielle et organisée contre les mesures du gouvernement Michel. Une manifestation nationale donnera le ton le jeudi 6 novembre. Elle sera suivie de grèves tournantes par province, chaque lundi jusqu’au 15 décembre, date retenue par le front commun syndical pour une journée de grève nationale.

Quel sera l’impact de ces actions ? Jusqu’à présent, les débrayages ont surtout servi à souder la coalition gouvernementale. Et leurs excès ont déjà retourné une partie de l’opinion. Les organisations syndicales sont dès lors face à un double défi : maîtriser leurs troupes pour éviter de nouveaux dérapages contre-productifs et veiller à une participation équilibrée dans les différentes communautés du pays. S’il devait se confirmer que la grogne concerne surtout la Wallonie, cela n’ébranlera certainement pas les positions des partis flamands de la majorité, N-VA en tête.

Charles Michel s’attendait évidemment à ce que son programme soit très fraîchement accueilli par les représentants des travailleurs. Il constate que, tout comme les excès syndicaux ont soudé la coalition, les mesures gouvernementales ont rassemblé la famille socialiste, “l’action commune”, comme on dit. La FGTB ne critique que du bout des lèvres les économies dans les régions où le PS est au pouvoir et le patron de la mutualité socialiste, Jean-Pascal Labille, a manifestement pris goût à la politique active durant son passage au gouvernement Di Rupo. Ce resserrement des liens entre camarades ne doit rien au hasard et pèsera dans l’évolution des relations sociopolitiques. Les piliers chrétiens et libéraux sont, en revanche, dans l’expectative, tant ils ne se retrouvent plus dans leurs relais politiques naturels.

Après les escarmouches, voici maintenant l’heure de la contestation officielle et organisée contre les mesures du gouvernement Michel.

Il n’est toutefois de l’intérêt de personne, et certainement pas de l’économie belge, de voir un bras de fer social s’éterniser. Tôt ou tard, la concertation devra reprendre ses droits. Mais il faudra oser franchir le pas. Et ça, manifestement, ce n’est pas évident. Quand ils ont été désignés coformateurs en juillet dernier, la toute première démarche de Charles Michel et Kris Peeters ne fut pas destinée aux partis politiques mais bien au Groupe des 10, cette instance qui regroupe les mondes patronal et syndical. Les représentants des travailleurs ont décliné l’invitation, manquant ainsi une occasion de fixer les balises entre ce qui devait relever de la concertation et ce qui était laissé au politique.

Depuis, on court derrière ce dialogue avorté. On doute qu’il puisse se rétablir dès le lendemain des grèves automnales pour conclure un accord interprofessionnel. Les décisions en matière d’index et de modération salariale le vident de toute façon largement de sa substance. Heureusement, la négociation paritaire ne s’arrête pas là. L’accord de gouvernement insiste sur la concertation sociale afin d’imaginer une réforme des carrières et des barèmes, d’affiner les nouveaux dispositifs de pension ou de répartir une enveloppe bien-être, désormais portée à 1,2 milliard d’euros.

Le Premier ministre, qui se veut “rassembleur”, devra sentir le moment opportun pour prendre une initiative en ce sens. Cela impliquera sans doute d’élargir l’éventail des discussions (parler de relance économique, de formation en alternance…) pour attirer les interlocuteurs autour de la table. Il devra aussi apporter la garantie que les accords conclus au sein du Groupe des 10 ne seront pas détricotés ensuite en Conseil des ministres. En d’autres termes, il doit offrir aux syndicats une possibilité réelle de peser, ne serait-ce qu’un peu, sur la politique d’un gouvernement qui n’est manifestement pas le leur. Et les représentants des employeurs doivent l’accepter.

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