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Il faut combattre la pauvreté et pas la richesse, svp

Lire la chronique d' Amid Faljaoui Amid Faljaoui, directeur des magazines francophones de Roularta.

Je vais vous parler aujourd’hui d’un sujet qui excite ou fâche à peu près tout le monde dès qu’on en parle : je vais vous parler des riches !

Si j’en parle, c’est parce que notre secrétaire d’Etat au Budget Fédéral, Eva De Bleeker, inconnue du côté francophone, a avoué hier qu’en tant que responsable du budget national, nous allons tous devoir nous serrer la ceinture durant les 10 prochaines années. Elle a tenu ses propos durant une conférence sur le numérique dans une haute école dans la bonne ville de Hasselt. Voilà, le lieu du crime défini.

Et alors, me direz-vous ? Ce genre de commentaire, de la part d’une femme politique, nous dit que bientôt nous ne parlerons plus du vaccin Astrazeneca, mais de qui va payer la crise. Et donc, on va reparler des “riches” qu’il faudra mettre à contribution. C’est un classique car à chaque sortie de crise, que ce soit après la seconde guerre mondiale ou après la crise de 2008-2009, les politiques nous parlent des riches ou des “épaules les plus larges” qui, bien entendu, doivent être “solidaires”.

Le souci, c’est de définir, ce qu’est un riche (chacun a sa définition). Souvenez-vous, François Hollande avait défini un “riche” comme quelqu’un qui gagne 4.000 euros par mois. C’est une vision qui est loin d’être partagée par tout le monde. Un autre homme politique français, François Bayrou, a essayé de dire récemment que les ménages qui gagnent 4.000 euros font partie de la classe moyenne. Il s’est fait déchirer sur les réseaux sociaux par ceux qui estimaient qu’il vivait hors sol ou sur une autre planète. C’est donc la raison pour laquelle, les hommes politiques restent vagues : le riche, c’est l’autre, le voisin, jamais soi bien entendu.

Je ne vais pas prendre parti pour ne pas me faire étriper mais j’aimerai juste montrer que comme toujours la réalité est plus complexe. Les uns diront que les plus riches n’ont qu’à payer cette crise. OK, pourquoi pas, mais il ne faudrait pas conclure hâtivement que ces personnes ne paient rien. En Belgique, les 10% les plus riches paient déjà 50% des impôts ; c’est une réalité statistique. Tout comme les Flamands paient plus d’impôts que les francophones ; c’est aussi une réalité déplaisante à dire mais réelle. Et puis qui est le riche de qui ? L’indépendant peut considérer que le fonctionnaire qui n’a pas perdu son salaire pendant la crise est un privilégié et devrait faire un effort vu qu’il a été épargné par la crise.

Bref, le danger d’une rhétorique sur les riches ou les ménages aisés, c’est de dresser des catégories de population les unes contre les autres. Le philosophe André Comte-Sponville faisait état dans l’un de ses livres d’une conversation qu’il avait avec un ami juif qui lui disait : “vous êtes bizarre, vous, les goys : vous croyez que le problème, c’est la richesse ! Nous, on a compris depuis longtemps que le problème n’est pas la richesse, c’est la pauvreté ! C’est donc la pauvreté qu’il faut combattre, point la richesse”.

Voilà une autre vision nettement moins clivante et qui mérite d’être entendue à défaut d’être partagée.

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