Grexit : la Grèce sur les traces de l’Argentine…

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Pour réussir son Grexit, Athènes devra réussir à résoudre une très difficile équation budgétaire. Un pays dans une situation similaire l’avait fait : l’Argentine au début des années 2000.

Interrogé par le site Politico, Guillermo Nielsen, ancien secrétaire au Trésor argentin qui avait piloté pour son pays les négociations avec le FMI le négociateur estime que pour la Grèce, une sortie de l’euro n’est pas la fin du monde : “La vie continue. La Grèce doit s’apprêter à une traversée du désert qui durera un an avant de pouvoir afficher des résultats budgétaires au monde financier et se représenter sur les marchés. Ce n’est pas si terrible que ça en a l’air”, dit-il.

Le cas argentin est en effet très similaire à celui de la Grèce. Les deux pays ont mis en place une politique économique inappropriée, abandonnant leur souveraineté monétaire, en tirant profit pendant les premières années, mais vacillant dès l’arrivée de fortes turbulences économiques.

En 1992, l’Argentine lie en effet son nouveau peso au dollar, via un système de “currency board” : dans les faits, l’Argentine s’oblige, en liant le peso au dollar, à ne créer de nouveaux pesos que si des dollars rentrent dans le pays. La banque d’Argentine n’a plus la capacité de faire tourner la planche à billets et d’être prêteur en dernier ressort. Cette politique mène à l’explosion du système financier lorsqu’arrive la crise internet, au début des années 2000. La crise provoque un rapatriement de dollars aux Etats-Unis. Le FMI qui intervient. Mais il exige des mesures d’austérité trop sévères, qui plongent le pays dans une sévère récession et aggravent son problème budgétaire plutôt que le résoudre.

Le FMI bloque…

La décision de l’Argentine, le 1er décembre 2001, de pratiquer un contrôle des changes (en fait, de limiter les retraits bancaires dans le pays et d’interdire toute expatriation de capitaux) précipite la faillite. Le 5 décembre, FMI refuse en effet une nouvelle tranche d’aide de 1,3 milliard de dollars, en arguant que le gouvernement argentin n’a pas respecté son plan budgétaire…

Les mois qui suivent sont chaotiques : le gouvernement doit décider de mesures d’aide d’urgence pour soutenir les ménages les plus pauvres, mais l’hyperinflation mange le pouvoir d’achat de tous… Le peso, qui valait 1 dollar avant la crise, n’en vaut plus que 0,25 en 2002.

En 2002, le PIB argentin connait une chute de 11% et le taux de pauvreté (la population qui vit avec moins de 60% du revenu médian) monte à 57%. Ce n’est qu’après une année terrible que l’économie argentine redresse la tête, grâce notamment à la reprise de son industrie agro-alimentaire dopée par la dévaluation. En 2003, la croissance atteint 9%.

Parallèlement, l’Argentine, qui parvient à rembourser le FMI avec retard, entre en guerre contre ses créanciers privés internationaux. Environ 93% d’entre eux accepte finalement une restructuration de dette qui leur fait perdre 70% de la valeur nominale des obligations argentines. Mais 7% refusent.

Guérie, mais avec des séquelles

Aujourd’hui, l’Argentine, dont la population bénéfice d’un niveau de vie proche de la Pologne avec des écarts de richesse peu élevé, s’en est sortie. Mais le pays garde la trace de ces événements. Le taux de pauvreté est retombé à une vingtaine de pourcent, le chômage qui touchait 25% de la population active en 2002 est retombe à 7,2%, mais pendant les années de convalescence l’inflation a été très importante et la bataille continue avec ses créanciers. Et l’an dernier, suite à l’échec des négociations avec les fonds vautours le pays a à nouveau été déclaré en défaut de paiement “technique”.

Voilà ce qui pourrait attendre la Grèce : le chaos, suivi d’un redressement, mais une économie devenue sensiblement plus instable qu’avant…. Certes, ce n’est pas la fin du monde. Mais une sortie de l’euro devrait pousser Athènes dans des mois très difficiles.

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