Fraude fiscale : les sociétés de management dans le viseur

© Image Globe/Herwig Vergult

John Crombez, nouveau secrétaire d’Etat en charge de la Lutte contre la fraude fiscale, semble vouloir surtout s’attaquer aux sociétés de management. Typique pour un socialiste ? “Je déteste quand la discussion est menée de cette manière”, rétorque-t-il.

En ces temps de disette, la lutte contre la fraude fiscale est devenue un enjeu budgétaire. Elle doit rapporter de l’argent : 720 millions d’euros en 2012, 1 milliard l’année suivante et 1,5 milliard en 2014. Ce n’est pas rien. Mais “il s’agit d’objectifs réalistes, estime John Crombez (SP.a), nouveau secrétaire d’Etat en charge de la Lutte contre la fraude fiscale et sociale. Ils ne sont pas trop supérieurs à ce que mon prédécesseur Carl Devlies a déjà réalisé.”

“Néanmoins, poursuit-il, les mesures que je compte appliquer visent surtout l’évasion fiscale. Si je réussis, cela se traduira par une augmentation des impôts et des cotisations sociales perçues.” Et d’ajouter encore, le sourire aux lèvres : “Mieux je fais mon boulot, plus il y aura de rentrées pour Steven Vanackere, Laurette Onkelinx et Monica De Coninck. Nous devons absolument engranger des résultats.”

La chasse aux excès est ouverte

Ces résultats, John Crombez compte les engranger en s’attaquant notamment aux sociétés de management. “Les excès auxquels je pense sont connus et nombreux : usufruit, apport à la société d’une deuxième habitation, gonflement artificiel des coûts, des fêtes privées qui sont déclarées comme frais professionnels, etc., dit-il. Par le biais des sociétés de management, celui qui a de gros revenus peut de manière indue créer une situation dans laquelle il s’attribue les avantages liés aux revenus faibles. Je ne peux pas l’admettre.”

Le fond du problème ne se situe-t-il pas dans la pression fiscale qui est trop élevée chez nous ? Par le passé, seuls les top managers avaient des sociétés de management. De plus en plus nombreux sont aujourd’hui les professions libérales (médecins, etc.) et les cadres qui exercent leur profession au travers d’une société de management.

“Cela fait des années que je dis que la fiscalité sur le travail est trop élevée dans ce pays, rétorque le socialiste flamand. Sans crise bancaire et sans déficit budgétaire, un allégement de la pression fiscale aurait certainement fait partie d’un accord de gouvernement. Mais nous devons faire face à un énorme trou budgétaire. On demande à la population de faire un effort de 11 milliards. Dans ce contexte, il me semble logique qu’on mette fin aux pratiques d’un petit groupe de contribuables qui profite de manière irréaliste du système.”

Hausse du précompte mobilier

En marge de cette chasse aux excès, il est une autre nouvelle mesure imaginée par le nouveau gouvernement, qui concerne de près ces sociétés dites de management. A savoir, l’augmentation du précompte mobilier frappant les dividendes. Jusqu’à présent, celui-ci s’élevait à 15 %. Majoré de 6 %, il s’établira à l’avenir à 21 %.

Outre les revenus d’intérêt générés par les obligations d’Etat ou celles émises par les entreprises, les comptes à terme et les comptes d’épargne non réglementés (exception faite donc du livret d’épargne et du tout récent bon d’Etat), le relèvement de 15 % à 21 % du précompte mobilier frappera en effet dorénavant aussi les dividendes d’actions émises après 1994. Ce qui concerne des dizaines de milliers de PME (sprl, etc.). Dont de nombreuses sociétés de management.

John Crombez dit pouvoir se retrouver dans la mesure : “Quand une société de management octroie-t-elle des dividendes ? Lorsque le salaire attribué par la société à son dirigeant est trop bas par rapport à la réalité économique. Sinon, cela se fait au moment de la liquidation de la société. Mais le salaire est généralement davantage taxé que les dividendes. C’est pour cela que je dis : si le lien avec la réalité économique n’existe pas, il faut mettre un terme au stratagème.”

Patrick Claerhout

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