Olivier Mouton

Energie: il faut aller bien plus loin que cet accord nucléaire

Olivier Mouton Chef news

Le besoin massif en électricité rend ce laborieux deal entre Engie et l’Etat belge insuffisant pour l’avenir. La Belgique a repris la main? Qu’elle le prouve! En évitant les dérives: ce secteur, depuis tant d’années, a généré trop d’abus en tous genres, payés par le citoyen.

Une étude réalisée par Luminus, basée sur des chiffres d’Elia et de l’Europe, le démontre: la décarbonation de notre société passera par une électrification massive de nos usages. Les chiffres parlent d’eux-mêmes: entre 2020 et 2050, la production en électicité devra tripler (!), en passant de 80TWh à 245 TWh.

Si l’accord sur la prolongation des réacteurs nucléaires de Doel 4 et Tihange 3, laborieusement conclu ce lundi 9 janvier, est une bonne nouvelle, ce n’est toutefois qu’une première goutte d’eau dans l’océan des besoins.

“Nous reprenons le contrôle de notre destin énergétique”, s’est félicité le Premier ministre, Alexander De Croo (Open VLD), en présentant l’accord. Fort bien. Mais si tel est le cas, alors notre pays doit désormais anticiper pour ne plus se retrouver démuni comme il l’a été ces derniers temps, soumis aux bons vouloirs d’Engie et de sa stratégie industrielle.

Qu’est-ce à dire?

Un. Il convient de pousser plus loin la porte ouverte par cet accord et d’envisager la prolongation de davantage de réacteurs nucléaires pour garantir l’avenir proche. Bonne nouvelle: la ministre de l’Energie, Tinne Van der Straeten (Groen), a reconnu elle-même que cette prolongation du nucléaire constituait “une étape importante pour notre sécurité d’approvisionnement et la transition vers une énergie 100% renouvelable”. Les tabous tombent.

Deux. Vu ce besoin massif d’électricité à l’horizon 2050, on ne peut plus laisser de côté un débat rapide sur les investissements dans le nucléaire de nouvelle génération. Nous ne pouvons pas perdre cette excellence belge, même si l’on sait que cela ne se fera pas du jour au lendemain. D’autres pays, scandinaves notamment, ont déjà franchi le pas.

Trois. Tous les obstacles doivent être levés pour envisager autant de renouvelable que possible et tendre vers le 100%. Faire de la mer du Nord la “plus grande centrale électrique européenne”, c’est en bonne voie, mais il convient aussi de déminer les difficultés mises aux nécessaires relais de cette énergie sur le sol. Une révision du plan de secteur va être – enfin – être décidée par la Région wallonne pour la Boucle du Hainaut et une “Pax Eolenica” a vu le jour en Wallonie, mais le phénomène Nimby reste un vrai problème.

Quatre: Dans ce débat, attention à veiller à notre indépenance énergétique, à tout le moins au niveau européen. La guerre en ukraine a démontré que l’on ne pouvait plus miser sur un contexte géopoltique serein dans un avenir proche.

Enfin, cinq: évitons les dérives financières. Que le public reprenne la main en partie dans le dossier énergétique, très bien. Mais le contexte difficile des négociations avec Engie laisse planer un doute sur la facture finale de l’accord. En outre, voir le public reprendre le main dans ce secteur, c’est craindre de voir les gabegies du passé revenir à l’horizon. Comment sera garnie et contrôlée cette structure mixte gérant la prolongation? Comment éviter de nourrir encore cette facture d’énergie devenue une feuille d’impôt déguisée? Quelles sont les garanties de ne pas assister à d’autres épisodes de type Publifin? Comment éviter qu’Engie ne profite de l’opération pour renflouer ses comptes en France?

Autant de questions qui ne sont pas vaines: ce secteur, depuis tant d’années, a généré trop d’abus en tous genres, payés par le citoyen.

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